Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
le temps de travailler, il fallait travailler. Mon père était vraiment intraitable là -dessus.
Mascouche était à lâorigine un modeste petit village entouré de fermes et dâimmenses champs. On y retrouvait de nombreux élevages de chevaux. Une petite rivière de rien du tout, presque un ruisseau, passait tout près de lâartère principale de lâépoque, le chemin Sainte-Marie.
Jâai grandi en voyant cette bucolique campagne se transformer et se remplir de bungalows comme le nôtre. Dans notre région, la croissance de la population était telle que la commission scolaire des Manoirs construisait de nouvelles écoles presque tous les ans.
Notre maison était située à proximité dâun terrain boisé que nous percevions, avec nos yeux dâenfants, comme une très vaste forêt. Avec mon meilleur ami, Dave Gaudreault, nous y passions des journées entières à construire des cabanes ou à prétendre que nous étions perdus au milieu de nulle part. La plupart du temps, ce sont nos mères qui nous extirpaient de ce monde imaginaire quand elles nous annonçaient, au loin, que le souper était servi.
Comme à peu près tous les enfants du coin, jâai commencé à manier les bâtons de hockey et à chausser les patins vers trois ou quatre ans. Et jâadorais le hockey. Toutefois, il nây a rien que jâaimais plus quâenfiler mon gant de baseball pour échanger des lancers avec mon père, qui était un très grand fervent de ce sport.
Jâavais deux ans lorsquâil a commencé à me placer une balle entre les mains et à me demander de la lui lancer. Et de fil en aiguille, le baseball a fini par prendre une place importante dans notre relation père-fils. Jusquâà ce que je quitte le domicile familial, nous avons passé dâinnombrables heures à «nous lancer», comme on dit chez nous.
Mon père aimait tellement le baseball quâil organisait des parties amicales pour les gamins du quartier, alors que nous étions encore trop jeunes pour devenir membres de lâassociation de baseball locale. Il entassait huit ou dix enfants dans sa grosse Malibu et il nous conduisait jusquâau parc Forest, où il se transformait en entraîneur-arbitre.
Dans ces moments-là , le seul fait de pouvoir porter le pantalon de baseball blanc quâil mâavait offert constituait lâun des grands moments de ma journée! Jâavais vraiment ce sport dans la peau.
Quand jâavais huit ans, alors que je faisais partie dâune de mes premières équipes au baseball organisé, au niveau Tee-Ball, une équipe de Radio-Canada était venue filmer lâun de nos matchs dans le cadre de lâémission Les Héros du samedi . Et je mâétais particulièrement distingué dans cette rencontre, ce qui mâavait valu lâinsigne honneur dâêtre interviewé.
â Que feras-tu quand tu seras grand? avait questionné lâanimateur.
â Je vais être lanceur dans les ligues majeures! avais-je répondu le plus naturellement du monde.
Cette réponse prémonitoire était en quelque sorte sortie de nulle part parce que je nâai commencé à lancer que quelques années plus tard.
Comme la plupart des enfants de mon quartier, jâai passé mes hivers à jouer au hockey et mes étés à fréquenter les terrains de baseball. Le sport que nous pratiquions changeait au fil des saisons et cette alternance empêchait la routine de sâinstaller parce quâil nây avait jamais de temps mort. Les séries éliminatoires au hockey chevauchaient le camp dâentraînement au baseball, et vice-versa. à longueur dâannée, nous jouions tout le temps à quelque chose!
En 1991, jâavais 15 ans quand jâai appris quâil était possible de pratiquer le baseball toute lâannée au Québec. Un bon jour, mon coéquipier Philippe Yaworski est arrivé au parc en parlant dâun nouveau programme de baseball sport-études qui venait dâêtre mis sur pied à lâécole secondaire Ãdouard-Montpetit, à Montréal. Ce fut pour moi une sorte dâillumination.
Le père de Yaworski, Eddie, était alors notre entraîneur au baseball mineur. à notre demande, nos deux pères ont fait des recherches, qui leur
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