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Gauvain

Gauvain

Titel: Gauvain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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idées. Regardant autour de lui, il se vit dans l’écurie, avec pour seule compagnie celle de Gringalet. Mais celui-ci avait abondance de bon fourrage et de belle avoine. Quant aux armes de Gauvain, elles gisaient sur le sol, prêtes à l’équiper.
    Gauvain n’eut plus alors qu’une idée en tête : quitter au plus tôt cette forteresse où il avait été témoin d’un si étrange spectacle, où gisait un vieillard mort depuis longtemps mais qu’il avait vu de ses propres yeux boire le sang contenu dans une coupe portée par une jeune fille d’une éclatante beauté. Il assembla ses armes, sella et brida Gringalet, ramassa son bouclier et sa lance, et, sans plus s’attarder, sortit de l’écurie puis, piquant des deux, sitôt en selle, lança son cheval par-delà la porte de la demeure ensorcelée.
    Or une nouvelle surprise l’attendait là. Autant la cour et l’intérieur de la forteresse étaient illuminés par les rayons du soleil levant, autant, dehors, tout était sombre, enténébré, brumeux. De sorte que Gauvain dut, comme la veille, mettre pied à terre et marcher à tâtons, pas à pas, en tenant la bride du cheval et en s’efforçant de suivre les cailloux du chemin. Mais il ignorait complètement où il se trouvait et où il allait. Brusquement, le désespoir le saisit, et il fut tenté de s’allonger à même le sol et d’attendre là Dieu sait quoi.
    « Gauvain ! Gauvain ! » cria une voix lointaine qui le fit tressaillir et tendre l’oreille. « Gauvain ! Gauvain ! » répéta la voix. Il eut l’impression que cette voix ne lui était pas inconnue. Des images confuses lui revinrent en mémoire. Oui, la dernière fois qu’il avait entendu cette voix, c’était lorsqu’il errait, dans la forêt de Brocéliande, à la recherche de Merlin. Les intonations étaient les mêmes, quoique le timbre en fût enfoui dans l’épaisseur du brouillard. Gauvain s’écria : « Merlin ! est-ce toi ? » Un éclat de rire lui répondit, puis la voix reprit : « Je suis heureux que tu me reconnaisses, Gauvain, car la plupart de tes compagnons m’ont bien oublié ! – T’oublier, Merlin ! Comment le pourrais-je ? Où es-tu ? – Je ne suis nulle part et partout, tu le sais bien, Gauvain. Mais je suis près de toi, quoique ma voix te parvienne du fond des âges. Que fais-tu donc en ce moment ? – Je suis perdu dans un brouillard dont je ne sais comment sortir. – Ce n’est pas grave, Gauvain. Tous les hommes errent dans le brouillard, mais ils ne veulent pas le reconnaître. Toi, du moins, tu le dis. »
    Gauvain s’était appuyé sur l’encolure de Gringalet, et il éprouvait un merveilleux réconfort à écouter cette voix si lointaine et pourtant si proche, si familière, si amicale. « Merlin, dit-il, je ne sais plus où j’en suis. Je t’en prie, aide-moi. Que dois-je faire ? – Il faudrait d’abord savoir ce que tu as fait. D’où viens-tu ? – D’un château dont j’ignore même le nom. – Et qu’as-tu vu dans ce château ? – Un vieillard à qui l’on faisait boire une coupe remplie de sang et qui, en réalité, était mort. – Et cela t’étonne ? – On serait étonné à moins, répondit Gauvain. – Dans ce cas, reprit la voix, pourquoi n’avoir pas posé de questions ? » À ces mots, Gauvain se souvint brusquement de l’avertissement donné par la jeune fille qui marchait à pied, derrière le char aux cerfs blancs, ainsi que des reproches de la demoiselle chauve à propos de son bras. Il se souvint aussi de tout ce qu’il avait entendu dire des chevaliers qui, admis dans la demeure du Roi Pêcheur et n’ayant pas su poser la question qu’on espérait d’eux, étaient responsables de la langueur de leur hôte. Il eut brusquement honte de son attitude insensée. « Gauvain ! Gauvain ! cria la voix, m’entends-tu ? – Je t’entends, Merlin, mais je te confesse que je ne suis pas fier de moi ! – Tu as fait bien pire : pourquoi t’être lancé dans cette quête ? – Pour savoir la vérité au sujet de la Lance qui saigne. – As-tu vu la Lance qui saigne ? – Oui, je l’ai vue, assurément. – Et la question qu’il fallait poser à son sujet, l’as-tu posée ? – Non, Merlin, je n’ai pas osé. »
    Un énorme éclat de rire accueillit sa réponse piteuse. Puis la voix reprit : « Alors, il ne faut pas te plaindre, ne t’en prends qu’à toi-même. Sans audace, tu n’obtiendras jamais rien. Crois-tu que

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