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Gauvain

Gauvain

Titel: Gauvain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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entendit une voix pousser à trois reprises un cri douloureux. Il ignorait, certes, qui criait ainsi, mais l’intonation ne laissait aucun doute sur ses sentiments. La voix n’avait pas encore achevé son cri pitoyable que jaillit une grande plainte, et si forte sous les voûtes de la chapelle que Gauvain en fut ébranlé et tomba comme mort sur le pavé.
    Or, en rouvrant les yeux, il constata que la clarté du jour illuminait la chapelle. Regardant autour de lui, il vit les lieux aussi vides qu’auparavant, à ceci près qu’on entendait un prêtre invisible dire la messe. S’étant dûment assuré qu’il n’y avait personne, Gauvain sortit de la chapelle pour regagner la salle où il avait laissé le vieux seigneur. Il descendit et monta plusieurs escaliers, il ne put retrouver celle-ci. Il croisa cependant un groupe de chevaliers qui le saluèrent et lui firent un magnifique accueil, l’assurant qu’il ne manquerait de rien pendant son séjour au château. Puis, comme la nuit tombait, ils l’entraînèrent dans la salle qu’il avait cherchée en vain et où, toujours à la même place, trônait le vieux seigneur qu’il avait déjà vu. Personne ne prononça un seul mot, mais le dîner était prêt : après que l’on eut installé le vieillard à table, les autres convives s’assirent, Gauvain parmi eux.
    Il mangea et but comme tous les autres. Le service était parfait, les mets qu’on leur servit délicats et précieux ; mais, Gauvain le remarqua, le vieillard, lui, ne mangea ni ne but. Et, ils avaient presque achevé de souper quand entrèrent quatre jeunes filles d’une grande beauté qui portaient quatre chandeliers d’or, chacun muni de cierges allumés. Toutes ceintes d’une couronne, elles arboraient de somptueux vêtements de soie. Après avoir déposé les quatre chandeliers, elles repartirent et sortirent de la salle. Alors apparut une autre jeune fille, encore plus belle que les précédentes et encore plus magnifiquement parée, qui tenait entre ses mains une coupe d’où irradiait une lumière non pareille. En regardant attentivement, Gauvain vit qu’elle recelait un liquide rouge en tout point semblable à du sang. La jeune fille avança silencieusement, sans prêter d’attention à quiconque et, quand elle fut arrivée devant le vieux seigneur, elle s’agenouilla et lui tendit la coupe. Le vieillard saisit celle-ci de ses mains tremblantes et la porta à ses lèvres. Après avoir bu abondamment et longuement, il rendit la coupe à la jeune fille. Mais Gauvain, au comble de la stupeur, s’avisa que la coupe était aussi pleine qu’avant que le vieux seigneur y eût trempé ses lèvres.
    Gauvain se demandait ce que tout cela signifiait. Il réfléchissait et se posait tant de questions en lui-même qu’il n’osa en poser aucune à son entourage. D’ailleurs, puisque personne ne parlait à cette table, il ne voyait aucune raison de rompre lui-même un silence qui paraissait inhabituel. Et dès qu’ils eurent fini de manger, les chevaliers se levèrent. Aucun d’eux ne demeura là. Ayant pris le vieil homme sous les bras, ils l’avaient couché sur le lit. Désormais, Gauvain était seul. Il pensa d’abord que les autres allaient bientôt revenir, mais il eut beau attendre, il ne vit rien, n’entendit rien. On eût dit que tous les habitants du château s’étaient brusquement endormis. Il resta ainsi à sa place une bonne moitié de la nuit sans voir personne, ce qui l’attrista fort.
    Se levant enfin, il avisa une chandelle qui brûlait encore, s’en empara, et s’en servit pour en allumer quatre autres qui étaient fichées autour du lit. Il désirait prier le vieux seigneur alité de lui révéler le sens de l’aventure. Mais il ne trouva, gisant sur le lit, qu’un corps inerte et froid. Le vieillard semblait mort depuis bien longtemps déjà. Saisi de crainte et d’émotion, Gauvain quitta la salle et, s’éclairant de la chandelle, dégringola l’escalier qui menait à la cour. Celle-ci était déserte. Il retrouva, non sans peine, la porte de l’écurie. Aucun cheval ne s’y trouvait, sauf Gringalet qui lui fit fête en le reconnaissant. Mais, épuisé de fatigue et d’émotion, Gauvain n’eut pas la force de faire autre chose que de s’étendre près de lui, dans la paille, où il s’endormit comme une masse.
    C’est la lumière du jour qui le réveilla. Il commença par se demander où il était et remit péniblement de l’ordre dans ses

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