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Gauvain

Gauvain

Titel: Gauvain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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baiser de tout chevalier qui passe ici sans s’arrêter. Cet impudent, que Dieu le confonde ! m’a refusé ce baiser avec tant de mépris que j’en suis encore toute retournée. Pourtant, je n’ai ni venin ni mauvaise haleine ! En vérité, seul un cœur bouffi d’orgueil peut inspirer pareils termes et telle attitude. Serait-il fils de roi, je n’aurais de joie qu’il ne se soit acquitté vis-à-vis de moi ! »
    Gauvain, avec beaucoup de douceur, lui répondit : « Dame, loin de te donner tort, je serai trop heureux de te faire rendre justice par les armes. Je ne sais chevalier au monde aussi vaniteux ni aussi injurieux que lui. Aujourd’hui même, j’ai cru devenir fou de colère par sa faute, et si j’ai pu prendre sur moi d’en rien montrer, je suis convaincu qu’il sera ravi de m’affronter, car chacune de mes paroles l’a irrité. Quant à toi, à te voir si sage et si distinguée, je ne doute pas que tu ne sois d’un grand réconfort pour qui sait apprécier la beauté et se montrer courtois à l’endroit des dames. Sois sans crainte, je te promets qu’avant ce soir tu verras lequel de nous deux est le plus fort, et que tu obtiendras satisfaction. – Cher seigneur, répondit la dame, sois béni. On voit assez que tu n’aspires qu’à aider ceux ou celles qui, dans l’affliction, cherchent désespérément du secours. » Gauvain éperonna Gringalet. La dame lui cria : « Quand tu auras dépassé le vallon, tu verras ce malotru devant toi, sur le chemin de droite ! »
    Aiguillonné par son désir de rejoindre le chevalier, Gauvain força l’allure jusqu’au moment où il l’aperçut et, l’ayant rattrapé, le défia. L’autre, non sans lui lancer de fiers regards qui manifestaient son dédain, glissa son bras dans les courroies de son bouclier et fit faire demi-tour à son cheval. De son côté, Gauvain se préparait comme il le fallait. Puis, de toute la vitesse de leurs montures, ils s’élancèrent l’un contre l’autre, lances baissées. Les fers se brisèrent sur leurs boucliers, mais le choc ne les fit pas ciller pour autant. Toutefois, tous deux furent projetés à terre. Le chevalier tira alors son épée d’acier contre Gauvain et, dans son acharnement à l’atteindre, il se découvrait souvent. Gauvain, au contraire, se retranchait derrière son bouclier que l’autre voulait mettre en pièces. Malgré les dégâts, Gauvain résista longuement, donnant moins de coups qu’il n’en recevait. Mais quand son adversaire songea à s’écarter pour se reposer de ses assauts, Gauvain bondit sur lui, le frappa, le malmena et le harcela tant et si bien que force lui fut, à la longue, de s’avouer vaincu.
    Cependant, regardant Gauvain droit dans les yeux avec une arrogance intacte, il dit : « Quant à savoir mon nom, tu n’y dois pas compter. Ce que j’ai refusé par amitié, la force ne me l’arrachera pas. – C’est insensé ! s’écria Gauvain. Tu es fou ou possédé du diable ! Écoute-moi bien : si tu t’étais soucié de savoir mon nom, je te l’aurais dit sur-le-champ. Mais tu ne me l’as pas demandé, aussi n’avais-je aucune raison de te le révéler. – Certes, admit le vaincu, je crois que tu as raison. Maintenant, je te le demande : quel est ton nom ? – Je suis Gauvain, fils du roi Loth d’Orcanie, neveu du roi Arthur.
    — Seigneur ! s’écria le chevalier au léopard, nous n’avions vraiment aucune raison de nous battre, car c’est ton nom que j’espérais entendre prononcer quand je te demandais quel était le plus valeureux des compagnons de la Table Ronde ! Gauvain, je suis ton cousin Hunbaut, et c’est toi que je venais rejoindre à la cour. » Gauvain lâcha son épée, et ils se donnèrent l’accolade, tout joyeux, et se félicitant du fond du cœur de s’être retrouvés grâce à cette épreuve. « Assurément, conclut Gauvain, je sais que tu es plein de bravoure, mais sache-le, la prouesse se déprécie quand l’orgueil s’y mêle ! – Je retiendrai la leçon, dit Hunbaut. J’essaierai désormais de mettre davantage de mesure dans mes paroles et mes actes. »
    Gauvain lui expliqua alors en quoi et comment il avait méconnu la coutume de la dame du pavillon, et tous deux convinrent qu’il fallait réparer ce tort. Ils rebroussèrent chemin. La dame, à l’entrée du pavillon, attendait le retour de Gauvain qu’elle savait toujours empressé à servir les dames et les jeunes filles et qui, pour mériter

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