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Gisors et l'énigme des Templiers

Gisors et l'énigme des Templiers

Titel: Gisors et l'énigme des Templiers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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ou s’en
emparer ou le détruire. S’étant résolu à cette destruction, Philippe le Bel mit
tout en œuvre pour arriver à une conclusion rapide. Dans le drame qui allait se
jouer, le metteur en scène serait bien évidemment Guillaume de Nogaret, sans
lequel Philippe se sentait impuissant à réaliser les « basses œuvres »
qui lui permettraient d’accomplir plus tard, et tout seul cette fois, les
« hautes œuvres ».
    Le 11 septembre 1307, le roi de France a un
entretien avec Clément V à Poitiers. Philippe révèle alors au pape tout ce
qu’il a appris au sujet des Templiers. Clément V prend très au sérieux les
accusations du roi, et lui écrit une lettre pour lui confirmer qu’il se livrera
à une enquête personnelle : « Vous n’avez pas oublié qu’à Poitiers,
vous nous avez plusieurs fois entretenu des Templiers. Nous ne pouvions nous
décider à croire ce qui nous était dit à ce propos, tant cela paraissait
impossible. Cependant, nous sommes forcés de douter et d’enquérir avec un grand
trouble du cœur. » Cette lettre est importante dans la mesure où
Clément V y avoue qu’il commence à être ébranlé. Mais la tactique du pape
est de gagner du temps. S’il manifeste sa volonté de faire procéder à une
enquête, il ne l’ordonne pas. Sans doute a-t-il ses raisons : il sait parfaitement que tout cela est vrai , et il ne
manifeste aucune hâte à faire éclater la vérité au grand jour, car celle-ci
risquerait d’éclabousser la Papauté. Pour Clément V, il faut tergiverser,
attendre, faire traîner les choses en longueur.
    Philippe le Bel connaît très bien son adversaire. Lui aussi connaît la vérité , mais il n’a rien à craindre de sa
publication, au contraire : cela lui assurera le beau rôle et il pourra du
même coup abaisser l’institution papale qui est une gêne considérable pour
l’indépendance du roi. En clair, ce que vise surtout Philippe, c’est le scandale,
car celui-ci ne peut qu’affaiblir la Papauté. Philippe le Bel, ne l’oublions
pas, est le premier souverain à avoir osé s’attaquer ouvertement aux
institutions traditionnelles de l’Église romaine.
    Mais il lui faut agir très vite. Le roi n’est pas sans
savoir que le pape a prévenu Jacques de Molay et que, dans son ensemble,
l’Ordre est parfaitement au courant des menaces qui pèsent sur lui. Il serait
stupide de croire que les Templiers n’ont pas pris alors certaines précautions.
Lors des dépositions, le frère Gérard de Causse précisera que le maître fit à
ce moment retirer les exemplaires de la Règle, détenus par les frères, pour les
brûler. Ils ne le furent cependant pas tous, puisque la Règle – du moins la
Règle officielle – nous est parvenue en plusieurs manuscrits. Mais cela
explique assez bien que les Archives du Temple n’aient jamais été retrouvées. Y avait-il donc quelque chose à cacher ?
    C’est le 14 septembre 1307, au conseil du roi, que
fut décidée l’arrestation de tous les Templiers. Seul l’archevêque de Narbonne,
chancelier du royaume, osa s’opposer à cette décision. Il démissionna de sa
charge qui fut aussitôt confiée à Guillaume de Nogaret. Mais l’arrestation des
Templiers n’eut lieu que le 13 octobre. Il s’écoula donc un mois entre la
décision et l’exécution. Comment nier qu’il pût alors y avoir des fuites ?
Les Templiers ont été très certainement prévenus de ce qui les attendait.
Certains frères, au moment de leur interrogatoire, l’ont reconnu sans qu’il
soit besoin de la torture, en particulier le frère Jean de Vaubellant, sergent
de la maison de Soissons. Ils n’ont certainement pas été les seuls. Pourtant
très peu de Templiers cherchèrent à fuir, et la plupart d’entre eux se
laissèrent arrêter sereinement. Voilà un mystère de plus à mettre au compte du
Temple.
    Ce délai d’un mois s’explique fort bien par la difficulté de
l’opération : elle devait se dérouler à une même heure, le même jour et
partout à la fois. Le roi rédigea des instructions qui furent placées dans des
plis scellés à n’ouvrir que le 13 octobre, et il les fit envoyer à tous
les officiers de la couronne. Ces instructions sont bien connues. Elles
comportent l’ordre d’arrestation des Templiers et d’une enquête immédiate en
attendant le jugement de l’Église. On remarquera la prudence du roi :
« en attendant le jugement de l’Église ». Il savait très bien que

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