Grands Zhéros de L'Histoire de France
un gros baril de son, afin de pouvoir continuer à donner des ordres jusqu’à son dernier souffle. La légende prétend que son dernier ordre fut que le pavillon tricolore soit cloué au mât afin qu’il ne puisse être amené, signe de reddition dans la marine.
Cet homme-là, dans sa jeunesse, avait bu les paroles de Kerguelen, marin brillant mais désobéissant, piètre découvreur, mais très grand conteur dont les fautes furent amendées par les héros qui crurent en ses rêves.
Villeneuve et Trafalgar
Puisque l’évocation de Dupetit-Thouars dans son baril nous a conduits à Aboukir, restons-y ! Si, pour les Égyptiens, Aboukir n’est qu’un modeste village situé à l’est d’Alexandrie, pour les Anglais, ce nom évoque la grande victoire navale de l’amiral Nelson sur la flotte française les 1 er et 2 août 1798, tandis que, pour nous Français, il désigne la victoire terrestre remportée par Bonaparte contre les Turcs le 25 juillet 1799.
C’est donc une victoire d’Aboukir contre les Turcs, remportée un an après une défaite d’Aboukir contre les Anglais, qui permit à Bonaparte de rentrer en France auréolé de gloire et de faire oublier la manière intempestive et peu avouable dont il s’était « carapaté » d’Egypte !
On devinera sans peine que la victoire d’Aboukir évoquée par le sculpteur Bernard-Gabriel Seurre sur la face sud de l’Arc de triomphe est plutôt la bataille terrestre !
Les exemples ne manquent pas dans l’histoire de ces petits accommodements avec les noms : la défaite de Gravelotte contre les Prussiens, qui fut un désastre pour l’armée française, est qualifiée de « victoire de Saint-Privat » dans les livres d’histoire allemands. Dans un autre genre, en 1904, afin d’éviter les sujets qui fâchaient lors de la signature de l’Entente cordiale, il fut décidé que Fachoda, gros caillou dans le soulier franco-anglais, s’appellerait désormais Kodok ! La France ayant dû rendre sept ans auparavant à l’Angleterre cette forteresse du Soudan emportée de haute lutte par la mission Marchand, il n’était pas question que ce nom humiliant pour la France figure sur quelque carte que ce fut.
Mais revenons en Égypte en 1798. Côté anglais, le grand vainqueur d’Aboukir et de Trafalgar est évidemment l’amiral Horatio Nelson (1758-1805), sans doute le plus grand héros de l’histoire militaire britannique. Dans son pays, il fait l’objet d’une véritable vénération. Sa statue trône à Trafalgar Square, en plein cœur de Londres placée bien haut afin que l’amiral puisse voir la mer et protégée à sa base par quatre lions monumentaux fondus dans le bronze de canons pris aux Français.
Tué le jour même de la bataille de Trafalgar, le 21 octobre 1805, selon le Journal d e L’ Empire du 2 décembre, par une balle française ou espagnole, qui vint se loger dans sa colonne vertébrale, l’amiral Nelson fut inhumé en grande pompe en la cathédrale Saint-Paul de Londres, le 8 janvier 1806, après que sa dépouille eut été rapatriée dans un fût de rhum. Son cercueil, placé dans un sarcophage de marbre, fut confectionné à partir du mât de l' Orient , navire français capturé à Aboukir. Tous les objets liés à cet épisode ont été pieusement conservés : la balle qui tua Nelson est exposée dans le grand vestibule du château de Windsor et l’uniforme qu’il portait sur lui le jour de la bataille est présenté au musée national de la Marine de Greenwich. Quand l’Angleterre veut vraiment marquer le coup, elle « offre du Nelson » ! C’est ainsi qu’après la guerre russo-japonaise de 1905 la Royal Navy offrit une mèche de cheveux du grand amiral à la marine impériale japonaise, à l’occasion de la commémoration de sa victoire de Tsushima. Toute relique ayant de près ou de loin touché Nelson vaut de l’or. En 2002, lors de la vente aux enchères, chez Sotheby’s, à Londres, des souvenirs de Nelson, la bourse de tissu vert remplie de pièces d’or qu’il portait sur lui le jour de sa mort, réticule taché de son sang, s’est vendue 423 000 euros. La même année, dans l’émission de la BBC déjà mentionnée, 100 Greatest Britons , l’amiral Nelson se retrouva, presque deux cents ans après sa mort, à la neuvième place du classement après John Lennon, là où Napoléon I er ne décrocha chez nous que la seizième place, entre Jules Verne et Louis de Funès !
Voilà donc, on l’aura
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