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Grands Zhéros de L'Histoire de France

Grands Zhéros de L'Histoire de France

Titel: Grands Zhéros de L'Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Clémentine Portier-Kaltenbach
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Armée qu’il envoie en Prusse à marche forcée, direction… Austerlitz ! Quant au bilan de Trafalgar pour les autres belligérants, l’amiral Monaque le dresse en ces termes : « La tragédie de Trafalgar reste vivante dans la mémoire collective de trois nations. Pour les Britanniques, c’est avant toute l’apothéose du grand Nelson et la confirmation d’une supériorité maritime qui remplit d’orgueil leur nation tout entière. Pour les Espagnols, c’est une défaite glorieuse, un sacrifice consenti pour l’honneur, au profit d’un allié imposé. Pour les Français, c’est un malheur et une blessure qui les conduisent à renoncer à disputer la suprématie maritime à l’Angleterre. (16) »
    Certains historiens – plutôt français – ont prétendu que Trafalgar aurait été un triomphe au lieu d’un fiasco si Villeneuve avait suivi à la lettre les ordres de l’Empereur. D’autres – Anglais pour la plupart, cela n’étonnera personne ! – jugent Villeneuve coupable, mais attribuent à Decrès et Napoléon, qui sans cesse modifiait ses plans, une part de responsabilité dans la défaite.
    Au soir de Trafalgar, Villeneuve devait être complètement déprimé. S’il connaissait l’histoire de l’Invincible Armada, il dut avoir une petite pensée pour Medina Sidonia, son homologue en débandade ! Qu’allait-il devenir, lui, le plus grand zhéro du moment, après cette débâcle dont son Empereur et la France entière le tenaient pour fautif ? Comble de déshonneur : non seulement l’opinion lui imputait la défaite, mais elle lui reprochait aussi d’être le seul des trois amiraux de Trafalgar à avoir survécu à la bataille. Nelson et Gravina étaient en effet morts auréolés de gloire, tandis que lui était condamné à passer les années qui lui restaient dans la honte. Or, aussi justement que l’expriment ces vers de Rotrou : « La vie aux plus heureux passe comme un moment. Et doit être importune à qui vit lâchement » ; pour Villeneuve, le désagrément promettait de traîner en longueur : il n’avait que quarante-trois ans !
     
    Par chance – et compte tenu de sa cote du moment chez ses compatriotes, le mot n’est pas trop fort ! –, le jour même de la bataille, Villeneuve est capturé par les Anglais. Il va rester leur prisonnier près de six mois, d’octobre 1805 à avril 1806. C’est d’ailleurs pendant sa captivité qu’il assiste aux obsèques de Nelson à Saint-Paul et s’incline devant le cercueil de son vainqueur.
    Finalement libéré en avril 1806, notre marin d’eau douce regagne la France, où il s’attend à avoir droit à un procès, qui lui permettrait de justifier sa conduite. Sur le chemin du retour, il s’arrête à Rennes, à l’hôtel de la Patrie. Ce sera là sa dernière escale. Le 22 avril 1806, l’amiral Villeneuve s’enferme dans sa chambre et se donne la mort.
    Dans une lettre adressée à sa femme, il écrit : « C’en est fait, j’en suis arrivé au terme où la vie est un opprobre et la mort un devoir. Seul ici, frappé d’anathème par l’Empereur, repoussé par son ministre qui fut mon ami, chargé d’une responsabilité immense dans un désastre qui m’est attribué et auquel la fatalité m’a entraîné, je dois mourir […]. Quel bonheur que je n’aie aucun enfant pour recueillir mon terrible héritage et qui soit chargé du poids de mon nom. Ah ! Je n’étais pas né pour pareil sort, je ne l’ai pas cherché, j’y ai été entraîné malgré moi. Adieu, adieu. (17) »
    Ironie du sort, Villeneuve trouve le moyen de se suicider sur l’autel de la patrie… à l’hôtel de la Patrie ! Un dénouement beau comme l’antique, mais bien trop mélodramatique à mes yeux. Pourquoi ce geste, de la part du zhéro le plus tragique de notre florilège ? Croyait-il vraiment que sa mort viendrait redorer son blason ? Hélas, quand bien même il serait mort au combat plutôt que par sa main, il eût été maudit de la même manière et condamné à voir son nom associé jusqu’à la fin des temps à celui de Trafalgar. Pour ne rien arranger, la postérité a mis en doute la noblesse de son acte en s’empressant de voir dans son suicide une lâcheté supplémentaire de sa part pour éviter le conseil de guerre. La possibilité d’un assassinat a également été évoquée : les Anglais ont fait courir le bruit que Napoléon avait fait exécuter son amiral par ses mameluks. D’autres rumeurs mettent en cause un certain

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