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Grands Zhéros de L'Histoire de France

Grands Zhéros de L'Histoire de France

Titel: Grands Zhéros de L'Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Clémentine Portier-Kaltenbach
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d’accord et c’est là le point fort du boulangisme ; il ratisse large, c’est une sorte d’auberge espagnole dont le programme est assez imprécis pour attirer à lui tous ceux qui aspirent au changement de régime. Grâce au flou artistique de ses propositions, Boulanger va cristalliser tous les mécontentements sur sa candidature, séduisant aussi bien les républicains que les réactionnaires désireux de se débarrasser de la République, notamment les bonapartistes et les monarchistes. Ce sont d’ailleurs les monarchistes qui financent son mouvement, grâce aux libéralités de la richissime duchesse d’Uzès, propriétaire des champagnes Veuve-Clicquot. Fort de ces soutiens hétéroclites, Boulanger remporte un premier succès lors de ces élections : il est élu député du Nord.
    Dans son entourage, tout le monde veut prendre le pouvoir ; lui aussi voudrait bien, mais il ne sait pas trop comment ni avec qui ! Il se déclare publiquement prêt à « balayer » le régime, mais le balayer pour mettre quoi à la place ? Un roi, un empereur, un président de la République ?
    Une échéance décisive se présente bientôt : un député de la Seine venant de mourir, son siège doit être pourvu lors d’élections organisées le 27 janvier 1889. La presse radicale met Boulanger au défi de se présenter à Paris, où jusqu’à présent n’ont jamais été élus que des hommes de gauche. Bonne pioche pour Boulanger, les républicains serrent les rangs entre « opportunistes » et « radicaux » et tombent d’accord sur un candidat totalement falot : Jacques, président du conseil général de la Seine, radical, distillateur de son métier ; un vieux monsieur obscur dont Paul de Cassagnac écrit dans l’ Autorité : « L’accord entre les anti-boulangistes semble se faire. On va choisir le plus bête. J’entends par le plus bête, celui dont la nullité, la pâleur intellectuelle, la stupidité politique ne dérangent, ne gênent personne et ne soulèvent ni rivalité ni jalousie (27) . »
     
    Jamais jusqu’à présent on n’avait vu en France une campagne aussi agressive, une telle débauche d’affiches et de tracts, ni d’aussi nombreux incidents. Tandis que Déroulède prend en charge la propagande de Boulanger, le fringant général mène sa campagne tambour battant. Il se révèle un vrai champion de la poignée de main, et il sait à merveille soulever l’enthousiasme de ses auditeurs par les diatribes théâtrales où il dénonce l’« abâtardissement » de la France. Paris en délire chante La Boulangère, la République est en surchauffe et en sursis. Les adversaires de Boulanger l’accusent de vouloir établir une dictature. On s’épie, on se copie, à tel point d’ailleurs que les candidats finissent par avoir les mêmes affiches : « Notre candidat a un nom modeste et bien français, il s’appelle Jacques. » « Notre candidat a un nom modeste et bien français, il s’appelle Boulanger », rétorquent les boulangistes. La police extralucide prévoit la victoire de Jacques.
     
    Le 27 janvier au soir, tout Paris attend les résultats dans un climat de tension incroyable. Boulanger et ses amis se sont regroupés au restaurant Durand, place de la Madeleine. La foule s’y masse, de plus en plus nombreuse, à mesure que se précisent les résultats, et acclame son champion en criant : « C’est Boulanger qu’il nous faut », « Àl’Élysée ! »
    Vers 11 heures du soir, le résultat tombe : à l’exception d’un seul, tous les arrondissements de Paris ont donné la majorité à Boulanger. Dans les rangs gouvernementaux, c’est la panique : on convoque un Conseil des ministres d’urgence. Que faire ? Un ministre propose de faire arrêter Boulanger comme suspect de complot contre la sûreté de l’État, mais Floquet, président du Conseil, et Goblet, ministre des Affaires étrangères, s’y opposent. Pendant que le gouvernement impuissant réfléchit à ce qu’il pourrait bien faire pour contrer l’homme du jour, les Parisiens descendent dans la rue en scandant « À l’Élysée, à l’Élysée ! »
     
    Pour Boulanger, c’est maintenant l’heure du choix. Tenter un coup d’État ? Ce serait facile, la rue est pour lui, la garde nationale lui est favorable, l’officier qui commande la garde du président de la République est un sympathisant royaliste qui a proposé d’ores et déjà à la duchesse d’Uzès de mettre le président aux arrêts… Et puis

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