Grands Zhéros de L'Histoire de France
Motte-Piquet et Chaumareys !) C’est également Boulanger qui fera mettre au point et adopter le fusil Lebel, un fusil à dix coups qui vient remplacer le fusil Gras à un coup, arme totalement dépassée depuis l’apparition du mauser dans l’armée allemande.
Boulanger se révèle à la population parisienne au cours d’une revue militaire à Longchamp, le 14 juillet 1886. Il plastronne sur un beau cheval noir. Quelle prestance ! Oui, le voilà, c’est bien lui, le futur sauveur de la France ! Sa cote monte au firmament, d’autant que le gouvernement en place est impopulaire et maladroit. En quelques mois à peine, Boulanger devient une personnalité politique de premier plan.
Obsédé par la revanche contre l’Allemagne, le nouveau ministre de la Guerre va entretenir tout un réseau d’espions en Alsace, sans en tenir informé le gouvernement auquel il appartient. En avril 1887 éclate l’affaire Schnæbelé : des policiers allemands arrêtent de leur côté de la frontière Guillaume Schnæbelé, commissaire spécial à Pagny-sur-Moselle, accusé d’espionnage et mis au secret à Metz. Une réunion de crise est immédiatement organisée à Paris, au cours de laquelle Boulanger remet au président de la République, Jules Grévy, un ordre de mobilisation générale. Le signer, ce serait déclencher une nouvelle guerre contre l’Allemagne. Fort heureusement, l’affaire Schnæbelé se dégonfle, car on parvient à prouver aux Allemands que Schnæbelé a été attiré dans un traquenard par son homologue alsacien allemand, un certain Gautsch. La guerre est évitée in extremis , mais l’affaire Schnæbelé a créé une émotion indescriptible dans l’opinion publique française. Schnæbelé est finalement libéré. Devenu héros national, il est acclamé lorsqu’il prend le train pour Paris à Pont-à-Mousson le 30 avril. Ce n’est que par la suite que le gouvernement français aura connaissance des réseaux d’espionnage mis en place par Boulanger.
Ce côté cavalier seul de Boulanger, sa popularité croissante qui ravive les espérances des ennemis de la République et de tous ceux qui souhaitent la revanche militaire de la France sur l’Allemagne commencent à inquiéter sérieusement le gouvernement : il en est donc exclu. On tente de se débarrasser de lui en l’expédiant en garnison à Clermont-Ferrand, mais le 8 juillet 1887, jour où il doit prendre le train à la gare de Lyon, ses admirateurs survoltés, passionnés, tentent de l’empêcher de partir. Dans le journal Le Socialiste , Paul Lafargue raille « l’extravagante et grotesque popularité du général sans victoire » qui « ne demandait qu’à être un ministre nul et ami de tout le monde ».
Boulanger se présente dans plusieurs départements à des élections partielles en 1888. C’est le bon moment, la cote du gouvernement est au plus bas, car on est en plein scandale des décorations. De quoi s’agit-il ? On a découvert que Daniel Wilson, le gendre du président de la République, Jules Grévy, volait la griffe de son beau-père pour attribuer des décorations contre espèces sonnantes et trébuchantes. Daniel Wilson, un tout petit zhéro à ajouter à notre tableau de chasse ? Sans aucun doute, car, par sa faute, son beau-père doit donner sa démission. On imagine sans peine l’atmosphère chaleureuse des réunions de famille qui suivirent cet événement ! Le scandale est d’autant plus grand que Wilson, pourtant condamné à deux ans de prison et privé pour cinq ans de ses droits civiques, restera néanmoins député et sera même réélu ! Le mouvement boulangiste naîtra aussi de la colère et du dégoût inspirés par ce genre de scandales. « Quand le peuple souffre, quand il se sent mal gouverné ou qu’il soupçonne les dirigeants de se livrer à des trafics honteux, instinctivement il cherche un maître, un sauveur qui chassera les marchands du temple et nettoiera les écuries parlementaires », conclut le bâtonnier Henri Robert (26) .
Le programme des boulangistes tient en trois mots : « dissolution, révision, constituante ». Ses affiches électorales sont truffées de points d’exclamation, astuce typographique permettant de manifester au lecteur à quel point l’on est indigné par la situation actuelle : « À bas les coteries parlementaires ! », « Plus de pots-de-vin ! Vive la République honnête, vive la France ! »
Vive la République honnête… on ne peut être que
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