Grands Zhéros de L'Histoire de France
il est question : dans la décennie qui précéda la guerre de 1914, les Anglais et les Allemands dotèrent leurs troupes d’uniformes kaki et vert-de-gris. Au tout début du conflit, le ministre de la Guerre, Adolphe Messimy, qui avait commandé des troupes dans les Balkans en 1913-1914 et compris l’avantage de ce type de couleurs ternes se confondant avec l’environnement, les proposa pour les troupes françaises. Cela provoqua un tollé général. « Les Français considéraient que leurs pantalons rouges et leurs vestes bleues étaient çonsubstantiellement gauloises », ironise Geoffrey.
Par voie de presse, on accusa Messimy de vouloir faire porter aux troupes françaises des couleurs déshonorantes, incompatibles avec leur prestige et contraires au goût français. Messimy tentait simplement de leur sauver la vie plutôt que de les laisser faire office de cibles ! Quant à Eugène Étienne, notre zhéro national qui avait précédé Messimy au portefeuille de la Guerre jusqu’en décembre 1913, il déclara : « Eliminer le pantalon rouge ? Jamais ! Le pantalon rouge, c’est la France ! » La bataille de la Marne vint bientôt montrer à quel point cet entêtement était criminel. Les soldats du 24 e régiment d’infanterie, qui traversaient une vaste plaine en plein jour et en plein soleil avec leurs beaux pantalons rouges, constituaient des cibles immanquables que l’on repérait à 1 000 mètres ! Ce régiment fut presque intégralement décimé.
Voilà qui valait bien une mention spéciale pour Eugène Étienne, non ? À ceci près que ce zhéro, qui tenait des propos aussi inconscients en 1914, était aussi celui qui, un an auparavant, déposait comme sénateur le projet de loi de réintégration de Dreyfus dans l’armée, mettant ainsi un terme définitif à l’affaire. Décidément, au royaume des zhéros, rien n’est jamais cousu de fil blanc !
Resquiescat in pace ?
Nos « zhéros zhéros 7 » ont tous été ostracisés. Ils sont enterrés à l’étranger ou ont purement et simplement disparu. Ils n’ont donc pas grand-chose à envier aux marins d’eau douce.
Soubise : pas de tombe ! Il fut inhumé dans le caveau de l’église des Pères de la Merci, située dans l’ancienne rue du Chaume (aujourd’hui, rue des Archives), à Paris. Cette église fut détruite sous la Révolution. Où donc furent transférées les dépouilles de tous les Rohan inhumés en ce lieu ? En tout cas, pas au Père-Lachaise. Et l’époque n’était pas à prendre soin des dépouilles d’aristocrates. Alors peut-être aux catacombes ? Mystère !
Grouchy : une tombe bien à part ! L’ostracisme dont Grouchy fit l’objet le poursuivit jusque dans la mort. En effet, s’il est bien enterré au Père-Lachaise, comme de très nombreux maréchaux du Premier Empire, il n’a pas été inhumé dans le « Quartier des maréchaux » mais assez loin de là, dans la 57 e division (avenue latérale du Nord, première ligne). Son cœur est tout de même aux Invalides, mais aucune plaque ne le mentionne dans l’église.
Bazaine : mort en exil ! Inhumé au cimetière de San Justo, en Espagne.
Jules Favre : inhumé au cimetière Notre-Dame à Versailles, non loin des soldats prussiens tombés pendant le siège de Paris.
Boulanger : mort en exil ! Il fut enterré au cimetière d’Ixelles, près de Bruxelles, dans la même tombe que sa maîtresse. Il avait demandé que l’on place dans son cercueil le portrait de Marguerite et une mèche de ses cheveux. Sur la pierre tombale furent ajoutés les mots : Georges, 29 avril 1837 - 30 septembre 1891. « Ai-je bien pu vivre deux mois et demi sans toi ! »
Dupleix : pas de tombe ! Inhumé au cimetière de la Madeleine, comme Louis XVI, Marie-Antoinette et tant d’autres, mais ce cimetière disparaît dans les années qui suivent la Révolution. Les dépouilles qu’il contenait furent transférées aux cimetières des Errancis, puis, de là, aux catacombes.
Montcalm : « désossé » à Québec ! Inhumé en 1759 dans la chapelle des Ursulines, il eut le cercueil et les funérailles des pauvres. Son crâne est aujourd’hui encore présenté dans une vitrine de cette chapelle.
Post-scriptum : dans la mesure où nous avons choisi de circonscrire notre panorama des nullités historiques à la fin du XIX e siècle, les zhéros de l’armée de l’air échapperont pour cette fois à notre enquête ; mais ils ne perdent rien pour attendre !
IV
Doubles
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