Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Hasdrubal, les bûchers de Mégara

Hasdrubal, les bûchers de Mégara

Titel: Hasdrubal, les bûchers de Mégara Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
Vom Netzwerk:
pour toute réponse cette
phrase : « Tu le sais : aussi ne nous fais pas perdre notre
temps. »
    Publius
Cornélius Scipion Corculum reçut notre ambassadeur pour lui expliquer les
raisons de cette attitude. Le Sénat avait durci ses positions depuis l’arrivée
d’une délégation en provenance d’Utique. Ses membres étaient venus proposer la
signature d’un traité d’amitié entre eux et la cité de Romulus, moyennant
l’octroi à leurs négociants de privilèges exorbitants. Ceux-ci seraient
exemptés de droits de douane et de taxes sur les marchandises qu’ils
débarqueraient à Ostie, en particulier le blé, le vin et l’huile, ce qui leur
permettrait d’éliminer leurs rivaux carthaginois. En échange, les navires de
guerre romains pourraient relâcher librement dans leur port et y débarquer des
contingents militaires en nombre illimité supposés assurer la sécurité des
négociants installés à Cirta. Bien entendu, aucune de ces troupes ne se
rendrait dans la capitale numide mais installerait ses cantonnements à
proximité d’Utique. Lorsque Hannon le Rab me fit prévenir de ces négociations,
cela me rappela les propos que m’avait tenus mon fidèle Bodeshmoun à Oroscopa.
Nous devions nous rendre à l’évidence : les autres cités puniques
d’Afrique avaient choisi de nous abandonner à notre triste sort. Elles se
placeraient, les unes après les autres, sous la protection des fils de la Louve
dans l’espoir que ceux-ci les autoriseraient à conserver leurs lois et leurs
libertés.
    Certes, je
ne pouvais leur donner entièrement tort. Nous les avions trop souvent traitées
avec mépris et dédain, exigeant qu’elles nous livrent fantassins et cavaliers
sans jamais les associer à la direction des opérations. Nos sénateurs
traitaient leurs magistrats comme des lourdauds et des rustres et se refusaient
à leur donner leurs filles en mariage par crainte d’une mésalliance. Sur ma
suggestion, Hannon le Rab décida d’envoya à Tyr mon vieux maître Himilkat,
grand prêtre du sanctuaire d’Eshmoun, pour solliciter la médiation des
desservants du sanctuaire de Baal Melqart dont nous reconnaissions tous
l’autorité et auxquels chaque comptoir punique payait un tribut annuel. Eux seuls
étaient capables de faire entendre raison aux citoyens d’Utique.
    Il n’eut
pas à effectuer ce voyage. Alors qu’il était sur le point de s’embarquer, nous
apprîmes la signature d’un traité en bonne et due forme entre Rome et notre
voisine. Et une mauvaise nouvelle n’arrivant jamais seule, nos compatriotes
installés sur les bords du Tibre nous informèrent de la désignation comme
futurs consuls de Manius Manilius et Marcius Censorinus, deux émules fanatiques
de Marcus Porcius Caton. Ils avaient battu les candidats soutenus par Publius
Cornélius Scipion Corculum et obtenu du Sénat la levée de quatre légions et de
contingents auxiliaires, soit en tout quatre-vingt mille fantassins et quatre
mille cavaliers immédiatement envoyés en Sicile. Le prétexte officiel était de
prévenir une révolte des esclaves dans cette île qui nous avait jadis
appartenu. En fait, comme le prouva l’arrivée de cinquante quinquérème dans le
port de Lilybée [8] , ces troupes s’apprêtaient à franchir la grande mer et à débarquer en
Afrique.
    La guerre
paraissait inéluctable mais Hannon le Rab, contre l’avis de ses propres
partisans, demeurait d’un calme étonnant et il décida d’envoyer une nouvelle
ambassade à Rome composée de Giscon, Mides, Gillica et Magon. Elle avait pour
mission d’annoncer au Sénat que Carthage se mettait, avec ses habitants et ses
biens, à la merci du peuple romain, c’est-à-dire que nous acceptions à l’avance
les conditions qui nous seraient dictées. Je ne puis blâmer Hannon le Rab
d’avoir agi de la sorte. Hostile dès le début de sa carrière politique aux
entreprises guerrières de Hannibal et de ses frères, qui avaient été pour lui
la cause de la ruine de notre cité, il était farouchement attaché au maintien
de la paix et croyait naïvement compter sur l’amitié indéfectible des Scipions.
Il était prêt à tout pour éviter un conflit dont il pressentait l’issue fatale
et il faisait une confiance aveugle à ses interlocuteurs, estimant que ceux-ci
possédaient les mêmes valeurs morales que lui. De plus, savoir que les efforts
qu’il avait déployés toute sa vie pour parvenir à ses fins se révéleraient
vains était une

Weitere Kostenlose Bücher