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Hasdrubal, les bûchers de Mégara

Hasdrubal, les bûchers de Mégara

Titel: Hasdrubal, les bûchers de Mégara Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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frère cadet qu’il me fallait négocier ou,
tout au moins, poser les premiers jalons en vue d’une réconciliation.
    Cela
signifiait prendre de vitesse et éliminer mon rival, Hasdrubal l’étourneau,
dont Mastanabal m’avait appris les agissements suspects. Magon, mon aide de
camp préféré, se rendit à Carthage porteur d’une lettre destinée à mon père.
J’informais ce dernier des tractations menées par le chef de la garnison grâce
à l’une des servantes de son épouse et lui demandais de placer les deux femmes
sous étroite surveillance tout en veillant à ce que celles-ci ne soient pas
molestées. Après tout, l’une d’entre elles était fille et sœur de roi et nos
rapports futurs avec les Numides dépendraient en partie des égards que nous
aurions envers elle. Les espions du Conseil des Cent Quatre eurent fort à faire
pour les piéger car l’épouse d’Hasdrubal l’étourneau et sa servante se
montraient très soupçonneuses et étonnamment prudentes. La bienfaisante Tanit
vint à notre secours de manière inopinée. L’une de nos trirèmes captura en
haute mer un navire romain en route vers Ostie. Dans la cabine de son
capitaine, l’on découvrit, dissimulée dans un coffre, une lettre de Gulussa à
Publius Cornélius Scipion Corculum dans laquelle il racontait à ce dernier par
le menu ses discussions indirectes avec mon rival. À ce message était jointe
une missive écrite de la main d’Hasdrubal l’étourneau, sollicitant du prince
numide son intervention pour obtenir la libération de l’un de ses fils, capturé
lors de la reddition de Néapolis.
    Ce texte
en lui-même n’avait rien d’infamant. J’aurais pu en rédiger un de la même veine
si l’un de mes proches parents était tombé aux mains des Fils de la Louve.
Mutumbaal l’utilisa toutefois pour accuser de haute trahison le commandant en
chef de la garnison de Carthage. Devant ses collègues, mon père soutint que la
requête de ce dernier constituait une offre de service déguisée aux plus cruels
de nos ennemis. Fort habilement, il s’abstint de mentionner le rôle joué dans
cette affaire par la sœur de Gulussa, Micipsa et Mastanabal. Il fit même
l’éloge de cette femme, soulignant que, carthaginoise d’adoption, elle
s’identifiait tellement à la cause de notre cité qu’elle n’avait point songé un
seul instant à intercéder en faveur de son enfant, contrairement à son mari.
L’étourneau avait bien mérité son nom. Il était pris au piège. Il ne pouvait
pour sa défense accuser son épouse car c’eût été la condamner et perdre ainsi
la confiance de Gulussa. Il ne pouvait pas non plus prétendre que les
confidences de ce dernier à Publius Cornélius Scipion Corculum n’étaient qu’un
tissu de mensonges puisque sa lettre prouvait bel et bien qu’il était en
rapport avec les Numides et leurs alliés.
    Ses
explications embarrassées irritèrent les membres du Conseil des Cent Quatre qui
décrétèrent son arrestation. Soumis à la torture, il avoua tout ce que
Mutumbaal lui ordonnait de dire et, à l’issue d’un rapide procès, il fut
condamné à mort. Conduit en dehors de l’enceinte de notre cité, il subit le
châtiment réservé aux traîtres, la crucifixion. Attaché sur une croix par des
cordes solides qui lui meurtrissaient les chairs et exposé en plein soleil, il
agonisa pendant plusieurs jours sous les quolibets de la foule qui n’hésita pas
à s’aventurer hors des murailles pour contempler ce spectacle.
    Mutumbaal
fit preuve d’une feinte magnanimité. Il autorisa la veuve d’Hasdrubal
l’étourneau à quitter Carthage avec tous ses biens et tous ses serviteurs alors
que celle-ci s’attendait à être emprisonnée et à payer de sa vie la faute de
son mari. Il la fit conduire sous bonne escorte jusqu’aux avant-postes numides,
l’officier commandant le détachement accompagnant la malheureuse ayant ordre de
la remettre en mains propres à Gulussa et d’informer ce dernier que le Conseil
des Cent Quatre, bien que n’ignorant rien des démarches entreprises par
l’intéressée, n’entendait pas verser le sang des enfants de Masinissa. Quelques
jours plus tard, un cavalier numide se présenta à l’entrée de mon camp et
demanda à me rencontrer en privé. Je pris soin d’ordonner qu’il ne fût point
désarmé. Je prenais là un risque certain car il était peut-être venu pour me
tuer mais je voulais gagner sa confiance et celle de son maître. Je n’eus

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