Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Haute-savane

Haute-savane

Titel: Haute-savane Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
était parfaitement reconnaissable à ses yeux couleur d’ambre, à la forme triangulaire de son visage de chat sauvage, à la forêt de cheveux crépus qui s’étaient échappés pendant sa lutte avec Moïse du madras où elle les tenait serrés.
    Les yeux jaunes dardaient sur lui tant de haine que Gilles eut l’impression désagréable de se trouver en face d’un crotale. Mais il n’eut même pas le temps de lui poser la plus petite question. La femme lui cracha au visage puis, détournant la tête, enfonça ses dents acérées dans la main de Moïse, si férocement que le sang jaillit. Moïse hurla, desserra instinctivement son étreinte. La femme glissa de ses bras et, arrachant la robe blanche peinte de fantastiques figures noires qui la recouvrait, s’enfuit, rapide comme une gazelle, vers l’abri des bois où elle disparut instantanément. Lancés à sa poursuite, Gilles et Moïse furent incapables de la retrouver. Furieux et déçus, ils revinrent vers Pongo.
    Chemin faisant Gilles ôta sa chemise et la déchira pour bander la main de Moïse qui saignait. La femme n’avait pas seulement le comportement d’une panthère, elle en avait aussi les dents.
    — On ramène ceux-là, dit Gilles désignant les Noirs qui revenaient lentement à la conscience. Je ne crois pas que la femme tentera encore quelque chose cette nuit mais on va tout de même envoyer une garde.
    Moïse chargea sur une épaule l’un des deux hommes encore incapable de marcher tandis que Gilles guidait l’autre du canon de son pistolet enfoncé dans ses reins. Mais les deux captifs n’avaient rien de héros et il ne fut pas difficile de se faire confirmer par eux ce que Gilles pensait bien avoir deviné. La belle sauvage n’était autre qu’Olympe, la dangereuse maîtresse de Legros.
    En revanche, il fut impossible d’apprendre quelque chose concernant le lieu de retraite de l’ancien gérant. Les deux prisonniers étaient des « marrons » appartenant à une bande, celle de Macandal le Manchot, pour qui la belle Olympe avait des bontés et qui, en échange, pouvait en recevoir toute l’aide dont elle avait besoin le cas échéant. Ses compagnons d’aventure savaient qu’elle avait une maison au Cap (où d’ailleurs elle n’avait pas remis le pied depuis la révolte) mais rien d’autre…
    Gilles hésita un instant sur la conduite à tenir envers ces deux-là mais, après tout, ils n’avaient commis aucun crime en venant enlever, de nuit, les pierres d’une tombe et ils juraient en pleurant qu’ils n’avaient participé en rien au meurtre de la « mamaloï » : c’était Olympe qui, d’un coup de machette qu’elle maniait habilement, avait à demi décapité la vieille femme. Après avoir demandé l’avis de Pongo et de Moïse, il les relâcha purement et simplement.
    — Allez dire aux autres que le maître de « Haute-Savane » vous a tenus entre ses mains et qu’il vous a rendu la liberté. Mais ne servez plus cette Olympe.
    Ils détalèrent sans demander leur reste. L’un d’eux néanmoins revint brusquement sur ses pas, prit la main de Gilles, la posa sur son front puis repartit en courant suivi par le regard méditatif de Moïse.
    — Nous avons eu raison peut-être… ou peut-être pas, dit le géant, mais je crois qu’ils ont dit la vérité…

    Lentement, « Haute-Savane » et ses habitants s’enfonçaient dans une anxiété qui peu à peu se résignait à l’inévitable. Il n’y avait aucun moyen de remplir cette tombe vide ou de retrouver son occupant momentané. Tous attendaient, chacun à sa manière, que sonne l’heure du destin. Gilles veillait comme d’habitude aux affaires de la plantation, Judith vaquait avec un zèle nouveau à ses devoirs de maîtresse de maison, ne faisant plus qu’une courte promenade à cheval chaque matin et n’allant même plus jusqu’à son carbet. Moïse surveillait ses travailleurs car c’était le temps des labours et, à travers la plantation, les charrues ouvraient la riche terre noire, y traçaient les vagues profondes d’où surgiraient bientôt les prochaines moissons porteuses d’abondance. Pongo se consacrait tout entier à l’hôpital, négligeant, non sans quelque regret, son cher jardin pour s’efforcer de remplacer le médecin disparu. Ses jeunes aides s’efforçaient, eux, de le remplacer de leur mieux et accomplissaient ses ordres avec une touchante bonne volonté. Quant à la famille Gauthier, à l’exception de Pierre qui

Weitere Kostenlose Bücher