Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
du sol, tout contre la réserve de glace. Cela expliquait le long délai entre la disparition de Blanche et la découverte de son corps dans un état faisant penser à une mort récente. Après le meurtre, Trudel avait pu retourner à Québec, voir un tas de gens, même le premier ministre ! Deux heures, pendant la nuit, avaient dû suffire pour revenir chercher le cadavre et le déposer dans le parc.
    Des preuves! Il lui fallait des preuves. Ryan ne prendrait pas une seconde fois sa «conviction intime» au sérieux, pas après avoir arrêté et détenu pour rien les frères Germain. Gagnon chercha dans tous les recoins du caveau, ne trouva ni bas ni souliers ayant pu appartenir à Blanche. Elle avait dû saigner comme une bête, mais le sol en terre battue absorbait les liquides. Appuyé au fond du trou contre l'une des grosses caisses en bois, le policier cherchait sur le sol une tache plus sombre ressemblant à du sang vieux de trois semaines. Peine perdue, toute la surface demeurait humide, sans doute le fruit de l'infiltration de l'eau.
    Le lieutenant aborda la question autrement. Ils étaient six, sept avec la jeune fille. À moins de s'être mis en ligne pour passer sur elle un à un, cela faisait beaucoup de monde. Tous les récits de viols collectifs concordaient: on s'agglutinait autour de la fille pour la retenir, la pincer, la griffer, la faire taire aussi. Cela expliquait les nombreuses ecchymoses sur son corps. Dans cet espace exiguë, le crime s'était nécessairement produit en plein milieu du caveau. Des traces demeuraient perceptibles sur la terre, comme si des caisses avaient été posées là. Il s'agenouilla, fouilla la boue pâteuse à mains nues. Les doigts dans la terre, il imaginait - non, plutôt il ressentait - la terreur de la victime quand la lourde porte s'était refermée derrière eux. Combien de temps cela avait-il duré ? Le docteur Grégoire avait évoqué une longue liste de sévices : la pointe des seins arrachée à coups de dents, le sexe et l'anus déchirés avec un objet volumineux. Cela avait dû être une mort lente, atroce. Dans un éclair, ou pendant le long moment que duraient ses «absences», le policier craignit de s'évanouir tellement la douleur de la jeune femme se communiquait à lui.
    «Je dois commencer à délirer, murmura-t-il. Partout ici, il y a de la boue. Un plancher de terre battue dans une cave ou un caveau, avec de l'eau suintant du plafond et de gros blocs de glace en train de fondre lentement, cela donne ce type de merde. »
    Sa montre lui révéla qu'il se trouvait dans ce foutu trou depuis une heure. Il sortit, ferma la porte derrière lui, s'apprêta à remettre le cadenas. L'homme interrompit son mouvement pour secouer du bran de scie sur la manche droite de son veston. La chemise était souillée elle aussi. Surtout, il avait tout cochonné le nouveau pantalon gris pâle que sa femme trouvait si «chic» au moment de l'acheter. Maintenant, de grosses taches de boue déparaient les deux genoux. Il se pencha un peu pour les frotter. Deux gros ronds bruns demeuraient visibles sur la toile grise, un brun tirant sur le rouge.
    « Christ ! » fit-il en arrachant le cadenas de la porte.
    Il ouvrit celle-ci d'un mouvement brusque, retourna à l'endroit exact où étaient ses deux genoux quelques instants plus tôt. Les deux dépressions rondes se distinguaient très bien. Il sortit son mouchoir, y plaça une généreuse poignée de terre humide, revint au soleil. C'était une boue brune. Après avoir fait une sorte de sac avec son mouchoir, le policier pressa la masse de terre pour en exprimer l'eau. De petites gouttes rougeâtres se formèrent sur le tissu. Il ajouta un peu d'eau du puits à la terre, pressa encore, avec le même résultat. Il mit la terre de côté, secoua son mouchoir, le rinça sous la pompe. Le carré de toile garda une teinte rosée : le sang de Blanche Girard. Mêlé à de la terre humide et froide, il n'avait pu sécher complètement. En retournant un peu le sol pour tout dissimuler, quelqu'un avait peut-être simplement empêché ce sang de sécher en le préservant du contact de l'air ambiant. La preuve se trouvait là.
    Gagnon étendit son mouchoir au soleil, sur le couvercle en bois qui fermait le puits. Il retourna dans le caveau, effaça du pied les marques laissées dans la terre humide. Les étagères contenaient quelques pots en verre. Il en prit deux et sortit. La porte soigneusement fermée et cadenassée, personne ne

Weitere Kostenlose Bücher