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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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de bataille. Il cherche à rattraper le temps perdu, je suppose.
    Elle se sentait pleine de compréhension pour lui, car de son côté, elle pleurait aussi sur le temps gaspillé, dans le passé et aujourd'hui.
    —    Tu es amoureuse de lui.
    Il n'était pas nécessaire de répondre. De toute façon, ce n'était pas une question. Pour ne plus voir son air malheureux, Henri se leva de table et sortit, non sans avoir répété encore une fois :
    —    Je vais m'excuser, je te le promets.
    Ce jeudi-là, Renaud s'était levé avec l'intention de partir tôt et de revenir tard à la maison. Il n'avait aucune envie de rencontrer l'un ou l'autre des membres du clan Trudel. Ni l'arrogant Henri ni la charmante mais quelque peu envahissante Elise, qui voulait l'amener faire une tournée des cuisines
    - non, elle avait dit des salons - de la Haute-Ville. Il se rendit donc à la bibliothèque de l'Assemblée législative pour s'y enfermer.
    Il en sortit pour aller dîner à la salle à manger des députés. Au passage, il salua de loin Antoine Trudel et le premier ministre, attablés ensemble. Ceux-ci ne manifestèrent aucune envie de s'entretenir avec lui, et il n'allait sûrement pas s'imposer. Le professeur s'absorba dans la lecture des journaux tout en mangeant. Il vit Blanche Girard passer comme une revenante dans deux de ceux-ci. Le Soleil y allait d'une histoire rocambolesque. «L'organe du Parti libéral» publiait en effet:
    NOUVEAUX DÉVELOPPEMENTS DANS L'AFFAIRE BLANCHE GIRARD
    Des experts venus de Montréal, prêtés en l'occurrence par la Police provinciale pour aider la force constabulaire de la municipalité de Québec, ont passé la journée d'hier au parc Victoria. Ils ont aussi examiné les premiers témoignages recueillis par les policiers, notamment les informations concernant la position du cadavre, quand il a été découvert.
    Ils ont émis l'hypothèse que la pauvre jeune fille peut avoir été frappée par le tramway. Il est établi qu'elle marchait sur les rails pour rentrer chez elle. Sous la force de F impact, elle pourrait avoir été projetée jusqu'à l'endroit où on l'a trouvée, et son corps, caché par les buissons, être resté là plusieurs jours.
    D’autres analyses diront si cette hypothèse s'avère juste.
    Renaud n'en revenait pas. Si cette histoire venait bien delà police, tout le service devait être frappé d'une folie subite. Le témoignage du médecin responsable de l'autopsie avait été très explicite, lors de l'enquête du coroner. L'article de L'Evénement allait dans un tout autre sens :
    QUE FAIT LA POLICE ?
    On a raison de se désoler de la lenteur de la police de la cité de Québec à trouver les coupables de l'assassinat odieux de Blanche Girard. En effet, si aux premiers jours de l'enquête on nous laissait espérer- un dénouement rapide, tout indique que plus personne ne s'intéresse à l'affaire au poste de police.
    Cette situation est d'autant plus révoltante qu'une rumeur persistante veut que des personnes aient aperçu la jeune femme dans une voiture, le soir du 3 juillet dernier.; en compagnie de jeunes hommes en vue de cette ville. Il est à souhaiter que toutes les personnes concernées par cette enquête fassent leur devoir et tirent au clair le mystère Blanche Girard.
    « Se peut-il qu'il y ait enfin une piste ? » se demanda Renaud.
    Dans ces histoires, on identifiait habituellement un coupable assez rapidement, où l'on n'en trouvait pas du tout. Absorbé dans ses journaux, il ne remarqua pas le visage de cendre du ministre Trudel ni l'air songeur de Philippe-Auguste Descôteaux. De toute façon, même s'il les avait remarqués, il les aurait attribués à l'allure un peu désolante que prenait la campagne électorale fédérale. Si les libéraux faisaient des gains au Québec, au Canada anglais les conservateurs récupéraient une partie des sièges perdus aux mains des progressistes en 1921.
    —    Le mieux est d'ignorer tout cela, plaidait Antoine Trudel.
    Le premier ministre ne partageait pas cet avis. Si L'Evénement parlait de personnes qui avaient vu des «jeunes gens en vue», il devait posséder les noms de ces témoins. Tôt ou tard, il les produirait pour nuire le plus possible à la campagne électorale. Il s'agissait en effet d'un périodique lié aux conservateurs.
    —    On ne peut pas faire semblant d'ignorer une chose comme celle-là, imprimée dans le journal. Dans trois jours, notre inaction sera présentée comme une

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