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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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   Ne me dites pas que la photographie est en noir et blanc. Vous êtes supposée l'avoir vue le 3 juillet.
    Il y eut un long moment de silence.
    —    Je ne sais plus, siffla-t-elle en colère.
    Il y eut un murmure dans la salle, personne ne l'entendit souffler :
    —    Il y a trois mois que je l'ai vue.
    Laurent Marchais affichait un sourire satisfait, accumulant les points en sa faveur. Il n'allait pas s'arrêter là :
    —    Vous affirmez que les hommes avec cette jeune femme venaient de la Haute-Ville. Comment pouvez-vous dire cela ? Vous les connaissiez ?
    —    Je ne connais personne à la Haute-Ville. Ils étaient bien habillés et avaient de grosses voitures.
    —    Mais vous n'avez aucune idée de leur identité.
    Elle ne répondit rien. De toute façon, ce n'était pas une question, mais une affirmation. Il continua :
    —    Vous pouvez au moins nous dire le type de voiture ?
    —    Non. Je ne m'intéresse pas aux voitures.
    —    Mais vous savez si une voiture vient de la Haute-Ville ou de la Basse-Ville.
    Encore là, ce n'était pas une question. L'avocat continua :
    —    Que cherchiez-vous dans la rue Saint-Vallier, au moment de faire cette rencontre étonnante ? Vous devez au moins savoir cela.
    Il y eut un long silence, suffisamment long pour l'inciter à ajouter:
    —    Selon des amies à vous, justement celles que notre jeune journaliste a poursuivies dans le tramway, vous cherchiez quelque chose.
    —    De la bière.
    Il y eut un éclat de rire dans la salle.
    —    Il ne vous en restait déjà plus au début de la soirée ?
    Alain Touchette se leva d'un bond pour protester, mais il décida de se rasseoir. «Pourquoi ne demande-t-il pas le retrait de la question?» se demanda Renaud. Il examinait la dame Fortier attentivement. Avec un sourire, le professeur de droit conclut: «Il ne souhaite pas engager la conversation sur la sobriété de son témoin vedette... Et il a bien raison.»
    —    Une toute dernière question, dit encore Marchais, vous avez bien reçu cinquante dollars de L'Evénement ?
    —    Oui.
    Sa voix était blanche de colère. Elle eut envie de s'écrier: «Tous les avocats présents dans cette salle reçoivent bien plus que cette somme. Cela en fait-il tous des menteurs ? » Le juge ne lui en laissa pas l'occasion :
    —    Vous pouvez regagner votre place, madame Fortier.
    Dans la salle, les conservateurs affichaient des têtes d'enterrement, les libéraux jubilaient. Renaud Daigle se tourna vers Thomas Lavigerie, assis dans la rangée derrière lui, pour lui dire :
    —    Si ce sont là les témoins qui vous sont favorables, je suis curieux de voir ceux de la partie adverse.
    L'autre se contenta de lui lancer un regard dépité. Raoul Richard fut ensuite appelé à la barre. Celui-ci déglutissait à un rythme effréné, ses mains tremblaient un peu au moment de prêter serment. Malgré les regards rassurants d'Alain Touchette, cet homme aurait donné cher pour se trouver ailleurs.
    —    Monsieur Richard, pourquoi vous êtes-vous intéressé à l'affaire Blanche Girard ?
    —    Cette jeune fille vertueuse a été la victime des mœurs dissolues de certains habitants de cette ville. Tous les bons citoyens désirent que justice soit faite.
    —    Vous avez alors décidé de prendre les choses en main ?
    —    J'ai mené ma propre enquête, pour trouver les coupables.
    De la part de ce petit homme malingre, affligé d'un tic répugnant, cela paraissait si prétentieux. Dans la salle, plusieurs s'esclaffèrent.
    —    Qu'est-ce que votre enquête a donné ?
    —    J'ai découvert un témoin. Cet homme a vu une connaissance de la victime au volant d'un camion, le soir de sa disparition.
    —    Pourquoi cela vous a-t-il paru important ?
    —    Si elle avait été enlevée en pleine ville, des témoins s'en seraient rendu compte. Cette pauvre fille a suivi l'une de ses connaissances, en qui elle avait confiance. Cette personne l'a conduite à ses assassins.
    Tout le scénario de la petite brochure de Raoul Richard se trouvait dans cette conviction.
    —    En somme, vous avez conçu une théorie, vous avez joué au détective pour trouver les coupables. Quel fut le résultat de vos efforts ?
    —    Je n'ai pas trouvé les coupables. J'ai alors écrit une œuvre de fiction, La Non-Vengée.
    Tout au long de cette explication, Raoul Richard cherchait les yeux de Renaud Daigle dans

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