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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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   Je l'ai revu lors de l'enquête du coroner. Je me suis souvenu de lui à ce moment.
    Encore une fois, longtemps après les événements, quelqu'un reconnaissait l'un des protagonistes de cette histoire. Ce récit se révélait aussi fragile que le précédent.
    —    Il ne s'agit donc pas d'une connaissance personnelle. L'avez-vous vu à d'autres reprises?
    —    Non.
    —    Comment était-il habillé ?
    —    Comme à l'enquête. Un habit foncé, un chapeau foncé, bas sur les yeux.
    —    Brun foncé ? Bleu foncé ? Noir foncé ?
    Il y eut un éclat de rire dans la salle.
    —    Je ne me rappelle plus la couleur. C'était foncé, en tout cas.
    —    Où deviez-vous vous trouver le 3 juillet au soir ?
    —    ... A la Citadelle, au cachot. J'étais encore dans l'armée, je m'étais battu.
    —    Vous étiez au cachot, ou à la porte d'une taverne ?
    Cette histoire devenait terriblement compliquée. Renaud appréciait combien les autorités comptaient sur cette procédure pour faire taire les rumeurs.    Les    divagations    les    plus
    délirantes paraissaient trouver des oreilles complaisantes, dans cette ville.
    —    J'étais à la taverne. On me laissait sortir de la prison de la Citadelle.
    —    Monsieur le juge, j'ai ici une déclaration assermentée du geôlier de monsieur Martin. Il était au cachot à la Citadelle, la porte de sa cellule bien verrouillée. Il en est sorti le 5 juillet. Et, bien sûr, j'ai donné des copies de ces documents à mon distingué collègue.
    Laurent Marchais retourna s'asseoir. Même si le témoin semblait vouloir ajouter quelque chose, tout le monde se désintéressait de lui. Le juge consulta l'horloge au mur puis déclara :
    —    Nous nous arrêtons ici. L'enquête on discovery se poursuivra dans cette salle à une heure trente cet après-midi.
    Renaud Daigle se leva pour sortir. Cette procédure devenait une véritable farce. Il fallait sans doute se livrer à cet exercice grotesque pour faire taire les rumeurs, mais cela lui paraissait une bien mauvaise façon de dépenser l'argent des contribuables. Il se retrouva à la hauteur de Thomas Lavigerie, qui descendait la rangée derrière la sienne en direction de la porte.
    —    Qu'allez-vous faire à propos de Raoul Richard maintenant? demanda l'avocat conservateur. Ce matin, il était complètement terrorisé.
    —    Ma cliente prendra connaissance des journaux demain, appréciera elle-même si sa réputation a souffert de la brochure, et décidera de la suite à donner.
    —    Il a tout nié aujourd'hui. Vous n'allez pas vous acharner ?
    L'homme perdait un peu de sa superbe. Le professeur de droit s'accorda le plaisir d'une petite leçon :
    —    Il aurait dû réfléchir un peu avant de s'engager dans son aventure littéraire. S'il doit en subir les conséquences, il n'aura que lui à blâmer.
    —    Vous allez le ruiner, comme vous l'en avez menacé d'ailleurs. Il a pu agir pour un noble motif.
    —    Je ne vois rien de noble dans le fait de traiter une jeune femme de dévergondée et de complice du meurtre de sa meilleure amie.
    La salle s'était vidée autour d'eux, ils restaient seuls à discuter.
    —    Là-dessus, vous avez raison. Cependant, tout cela vient de son désir d'obtenir justice pour cette pauvre victime. Le titre de sa brochure, La Non-Vengée, n'a pas été choisi au hasard. Notre conviction, à lui et à moi, c'est que les autorités ont dissimulé un ou des coupables, pour éviter tout contrecoup électoral. Ou même, au pire, pour protéger des gens proches du pouvoir.
    —    Vous revenez avec l'histoire de la personne la plus en vue de Québec. C'est du roman. Votre ami vient de l'admettre lui-même. Du mauvais roman en plus.
    —    Vous voulez souper avec moi ce soir? Nous pourrons en discuter.
    —    Je suppose que vous êtes le procureur de Raoul Richard ? Si cela peut vous faire plaisir, je veux bien.
    À une heure trente, l'assistance se révéla moins nombreuse que le matin. Le scandale, souhaité par les uns et redouté par les autres, n'aurait pas lieu. Avec de pareils témoins, les conservateurs se couvraient de ridicule. Au début des travaux de l'après-midi, le chef de police Ryan se retrouva à la barre. Il faisait rassurant avec son uniforme chamarré, son embonpoint et son sourire.
    —    Monsieur Ryan, demanda Laurent Marchais, avant aujourd'hui connaissiez-vous les deux

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