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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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vous me comprenez, mais de certaines maladies féminines.
    Son interlocuteur acquiesça gravement d'un geste de la tête. Pareille opinion ne lui paraissait pas trop hérétique. Ceux qui avaient des épouses connaissaient ces maladies particulières.
    —    Je me dis aussi, continua Renaud, que pour soigner les tout jeunes enfants, ceux qui ne parlent pas encore, les femmes ont peut-être des qualités particulières. Personnellement, je suis à l'aise avec les enfants qui ont commencé à apprendre la philosophie. Avant cet âge, je me sens bien incompétent.
    L'image les fit rire. Le nouveau venu dans ce petit cénacle n'exprimait pas des idées très différentes des leurs. Sur ces questions, ils sortaient du même moule. Les plus réticents à toute innovation craignaient qu'une fois les premiers progrès obtenus, les femmes en réclameraient plus. Il valait mieux s'opposer à tout, afin d'éviter de les voir envahir petit à petit les diverses professions.
    Armand Bégin ne voulait pas en rester là. Il demanda encore :
    —    En ce qui concerne le droit, vous ne trouvez pas cela inadmissible ?
    —    Pourquoi? Là aussi, il y a des sujets qui...
    —    Oui, sans doute, l'interrompit-il. Mais imaginez-les dans les prétoires. Elles se trouveraient tôt ou tard dans des situations où elles devraient se livrer à des interrogatoires auprès de personnes s'étant livrées à des crimes crapuleux, comme des viols, par exemple. Mes filles sont sûrement aussi capables de débattre    d'une    question    juridique    que
    mon fils, croyez-moi. Elles ne pourraient toutefois souffrir des situations de ce genre. Leur sensibilité ne le leur permettrait pas.
    —    Vous savez, monsieur Bégin, je ne me suis jamais posé cette question. Le droit constitutionnel est souvent ennuyeux, jamais scabreux. Cela doit dépendre de la sensibilité, du tact des personnes concernées, hommes ou femmes. Voyez, j'ai assisté à l'enquête du coroner concernant l'affaire Blanche Girard. On a fait sortir toutes les femmes au moment où le médecin a livré les résultats de l'autopsie. Une autre femme a pourtant subi toutes ces horreurs. Je me demande si nos compagnes n'auraient pas traité la question avec plus de respect, plus de délicatesse. Mais vous me posez une question qui mériterait une plus longue expérience que la mienne.
    Il prêtait attention à son interlocuteur, cela le priva de voir les grimaces de certaines personnes présentes, à l'évocation de Blanche Girard. Il participa ensuite mollement aux échanges pendant une demi-heure, le temps de siroter son porto, puis plaida la fatigue pour rentrer à son hôtel. En réalité, la fumée devenait étouffante. Encore quinze minutes, et ce serait des quintes de toux incontrôlables. Il salua à la ronde et sortit.
    Le maître de la maison l'accompagna chez les dames pour qu'il puisse les saluer aussi. Ils étaient tout juste sortis du bureau que Trudel disait :
    —    Vous avez suscité un certain émoi avec votre uniforme. Nous voyons peu de Canadiens français qui se sont portés volontaires. Cela pourrait servir. Quand nous avons des négociations difficiles à mener avec le Canada, un émissaire comme vous, des médailles sur la poitrine, pourrait être utile. En plus, vous ne devez pas parler british, mais plutôt oxfordish: cet accent fait très bonne impression. Il faudra que nous en reparlions.
    «La soirée n'a pas été un désastre», se dit Renaud.
    Dans le salon, les femmes avaient parlé chiffons. Les plus vieilles complimentèrent les plus jeunes sur leur élégance, quoique l'une se fit dire que sa robe était plutôt basse par le haut, l'autre haute par le bas. Rien ne pouvait être parfait : celle d'Elise était longue et décolletée, celle de Helen courte et boutonnée jusqu'au cou.
    Après un moment, la petite Irlandaise avait demandé à madame Trudel si Henri retournait à Québec le lendemain.
    —    Non, il passera encore une bonne semaine ici à réviser l'examen du barreau.
    —    J'avais espéré qu'il me reconduise à Québec. Ma tante malade m'a invitée chez elle pour l'aider, et voilà bien dix jours que je l'ai désertée. Je me sens un peu honteuse. Oh j'y pense! Renaud Daigle rentre sûrement demain. Je n'ose pas le lui demander moi-même, mais si vous vous en chargiez ?
    —    Je me demande si ce serait bien convenable, intervint Elise. Effectuer tout ce trajet, seule avec lui.
    Elle eut

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