Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
Vom Netzwerk:
vaudois et présentement à Paris pour affaires. Métaz, Guillaume Métaz, c’est mon nom.
     
    En voyant, à trois pas d’elle, son mari en conversation avec un officier, Charlotte se retourna et eut un pincement au cœur en reconnaissant le général Ribeyre. Guillaume fit signe à sa femme d’approcher et lui présenta l’officier, expliquant que le général était passé par le pays de Vaud en allant vers le Grand-Saint-Bernard, en mai 1800.
     
    Ribeyre s’inclina devant Charlotte, sans marquer le moindre signe de reconnaissance, et rappela les souvenirs de son trop bref séjour à Vevey.
     
    – Un beau pays, une ville propre comme un sou neuf, une population accueillante et quels vins délicats produisent vos vignes ! Mon palais ne les a pas oubliés.
     
    Métaz, flatté, révéla qu’il était propriétaire d’un grand vignoble, que ses barques avaient transporté, de Genève à Villeneuve, les fournitures et provisions de l’armée de réserve, que ses carrières fournissaient pierre et chaux au chantier de la route du Simplon et qu’il comptait bien développer ses relations avec le négoce parisien.
     
    – Les Suisses sont les amis naturels des Français, monsieur, vous le prouvez assez. Des amis un peu turbulents, quand ils se disputent entre eux pour choisir une Constitution par exemple, mais des amis sincères qui ont, en ce moment même, toute la sollicitude du Premier consul, dit le général.
     
    Comme Guillaume allait demander où en était la médiation de la France, souhaitée par les patriotes vaudois, pour mettre fin aux affrontements entre fédéralistes et unitaires, Bonaparte fit son apparition. Ribeyre désigna aux Métaz plusieurs personnalités qui entouraient le Premier consul : le frère de ce dernier, Lucien Bonaparte, président de la section de l’Intérieur au Tribunat, les consuls Lebrun et Cambacérès, le général Berthier, qui avait commandé l’armée d’Italie, et plusieurs généraux, allemands ou anglais, accueillis aux Tuileries « depuis que le traité d’Amiens leur a ôté la qualité d’ennemis ! » précisa Ribeyre. Au milieu de cette foule d’invités, que Guillaume évalua à plus de trois cents personnes, les Métaz virent d’assez près le général Bonaparte. De tous les officiers présents, il leur parut le plus sobrement vêtu : habit bleu sans galons, petites épaulettes, gilet de casimir blanc, pantalon de daim gris, bottes à l’anglaise. Son chapeau à corne sans plumet, orné de la seule cocarde tricolore, rappela à Charlotte la revue de Vevey.
     
    – Il a toujours le même chapeau, glissa-t-elle à son mari.
     
    Métaz trouva Bonaparte de petite taille, mais empreint d’une grande dignité, sans rien de rebutant ou de vaniteux. Bien qu’assez peu souriant, il avait l’air attentif aux propos des hôtes de marque qu’on lui présentait. Guillaume ne le quittait pas des yeux et Ribeyre trouva cette curiosité naturelle.
     
    – Le Premier consul est un homme conscient de sa grandeur et de ses responsabilités. Si les souverains d’Europe ont l’intelligence de composer avec lui et de renoncer à la tyrannie comme forme de gouvernement, une ère de paix et de prospérité nous est promise. Ce qui sera très bon pour les affaires, monsieur Métaz, souffla le général Ribeyre en fixant Charlotte d’un regard malicieux qui restaura leur complicité.
     
    L’hymne des Marseillais, joué par la musique de la Garde des consuls, signala l’approche d’un drapeau, que le peloton d’honneur devait présenter au Premier consul. Au passage des couleurs, tous les officiers saluèrent, tandis que les civils se découvraient. Bonaparte s’inclina devant l’emblème, puis le porte-drapeau et sa garde firent demi-tour pour se diriger vers la sortie de la salle d’audience, dont les portes avaient été ouvertes à deux battants. Sans perdre de temps, le général Bonaparte emboîta le pas au détachement et, dans une aimable cohue, la foule suivit cette procession républicaine jusqu’à l’esplanade, où des centaines d’invités, moins favorisés, attendaient le commencement de la revue.
     
    Une horloge sonna midi et le Premier consul se mit avec aisance en selle. Son cheval d’armes, couleur isabelle, « celui qu’il montait à Marengo et que vous avez peut-être vu à Vevey », souffla Ribeyre aux Métaz, portait plus de dorures que le cavalier. Ce dernier se dirigea vers le fond des jardins, précédant une

Weitere Kostenlose Bücher