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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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en obtenir même une réponse satisfaisante. Salut et Fraternité. » Il semble en effet que les Vaudois nous supportent de plus en plus mal, concéda Fontsalte.
     
    – D’autres signes doivent nous inquiéter, mon cher. Savez-vous qu’à la foire d’Orbe, le 13 février, des filous, venus pour détrousser les gens, ont fomenté des bagarres ? Une a opposé un jeune Suisse à un canonnier français. Le Suisse a giflé le canonnier, qui a répliqué en lui jetant une pierre. Ce ne serait rien si, à cette occasion, on n’avait entendu des gens crier à travers la ville : « Vive l’Autriche » ! Les charretiers du Léman, que nous mettons à contribution depuis deux ans, se plaignent de nos façons. Vingt-deux d’entre eux, qui, avec leurs soixante-deux chevaux, ont conduit, au mois de mars, des subsistances et munitions de l’armée, affirment que le conducteur français du convoi, porteur de la feuille de route, a retiré à Moudon des bons de vivres et de fourrage sans leur en avoir remis leur part.
     
    – Il est probable qu’il a vendu tout ça à des particuliers ?
     
    – Sans doute. Mais, chaque fois que se produit un nouvel incident, les autorités nous ressortent de vieilles histoires que vous ne connaissez sans doute pas, mais qui ne sont pas réglées. Or les gens d’ici ont un sens très aigu de la pénitence. Par exemple, depuis que je suis à Vevey, on me demande aussi, sans arrêt, si l’état-major va tolérer longtemps les pillages organisés par le général Xaintrailles et son épouse. Quand ils sont arrivés ici, le 3 juillet 99, avec une escorte et beaucoup de chevaux, m’a-t-on dit, ils ont commencé à glapir, parce que l’appartement qu’on leur avait réservé ne leur plaisait pas, menaçant d’en choisir un eux-mêmes si on ne leur donnait pas satisfaction. Il paraît que les chasseurs et dragons de l’escorte troublaient les nuits veveysannes et que Philippe de Melet, alors syndic de la ville, avait exigé le départ de ces gens, venus on ne sait d’où, pour faire on ne sait quoi. La gendarmerie a fait une enquête pour calmer les plaignants.
     
    – A-t-on entendu des témoins ?
     
    – Oui. Plusieurs ont porté, sous la foi du serment, des accusations très graves. Un certain Borgeaux dit avoir vu un domestique du général qui transportait, sur un char tiré par quatre chevaux, entre Vevey et Lausanne, un chargement si lourd qu’il a pensé que c’était de l’argenterie. Un bourgeois, Jean-Louis Roussy, explique qu’il a, pour le compte de Xaintrailles, chargé du vin volé sur la barque d’un Italien en partance pour Genève. L’aubergiste des Trois-Couronnes 3 , Paschoud, a déclaré que Xaintrailles avait un plein fourgon de marchandises dans sa remise quand il est parti pour le Valais. D’autres témoins ont affirmé que l’épouse du général a vendu publiquement, à Lausanne, des effets et des meubles que des gens ont reconnus pour avoir été volés dans le haut Valais. Ne trouvez-vous pas que cela fait beaucoup ? Vous ne pourriez pas, aux Affaires secrètes, nous débarrasser de ces gens qui déshonorent l’armée ? Il faut qu’on arrête Xaintrailles, qu’on le juge et lui fasse rendre gorge !
     
    – Hélas, dit Blaise de Fontsalte, les écumeurs ne sont pas rares. Hier, à Lausanne, on a surpris un chirurgien de l’armée qui vendait de l’argenterie d’église cassée et on a arrêté un garde-magasin qui venait de négocier, à son profit, dix des trente-cinq quintaux de farine qu’il détenait pour nourrir la troupe. Et peut-être ignorez-vous encore, ici, que des soldats de la division Watrin ont détroussé le courrier de Saint-Maurice !
     
    Ce fut au tour du colonel de lever les bras, en signe d’impuissance.
     
    – Mais, en ce qui concerne Xaintrailles, je puis vous assurer que la gendarmerie a des ordres. Il sera arrêté et jugé. Ce sabreur doit tenir de son ancêtre le maréchal Jean Poton, sire de Xaintrailles, qui, après s’être battu sous l’oriflamme de Jeanne d’Arc, au siège d’Orléans, et avoir conquis la Mayenne, ne craignit pas d’utiliser les services des Écorcheurs pour mettre à sac bourgs et villes, puis rançonner bourgeois et taverniers.
     
    – Je crois me rappeler, capitaine, que ce sont les Suisses qui, sous Charles VII, débarrassèrent le pays des Écorcheurs, compléta, avec un sourire satisfait, le colonel féru d’histoire.
     
    – Il serait à la fois cocasse et

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