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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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Français et tiennent sous leur coupe la Romagne et la Vénétie ! renchérit Flora.
     
    Bien qu’ayant toujours détesté Napoléon, celle-ci raisonnait en femme italienne pour qui la famille représente une cellule sacrée. Charlotte Métaz, à l’étonnement de son mari et de Flora Baldini, fut seule à prendre la défense de l’ex-impératrice.
     
    – N’importe comment, le mariage de cette Autrichienne avec Napoléon était une union politique. Il n’y a sans doute jamais eu d’amour entre les époux. Ce que l’empereur voulait, c’était l’héritier que la bonne Joséphine n’avait pu lui donner. Alors, Marion a bien rempli ses devoirs. Qu’elle profite maintenant de sa liberté !
     
    Martin Chantenoz, qui venait de vider coup sur coup plusieurs verres de vin, toussota d’une façon ironique, ce qui alerta Charlotte. Le poète pressentait que, certains jours, M me  Métaz, estimant, elle aussi, avoir bien rempli, aux yeux de tous, son rôle d’épouse et de mère, rêvait d’une certaine liberté !
     
    Comme la déclaration de Charlotte risquait d’ouvrir une de ces disputes dont on faisait à Rive-Reine le délice des soirées, Simon Blanchod, le doyen écouté et respecté, estima qu’il était assez tard et donna le signal de la séparation.
     
    – Je ne vois rien d’immoral, en effet, dans l’attitude de Marie-Louise, dit gravement Martin en saluant la compagnie.
     

    Au lendemain de la réception organisée par la femme du syndic, Mrs. Moore fit porter à celle-ci un grand flacon d’eau de lavande et à Charlotte Métaz, pour la remercier par avance de son invitation à une promenade sur le lac, un coffret de bois de santal qui contenait trois savonnettes parfumées.
     
    Ces attentions permirent aux Métaz de nouer des relations privilégiées avec les dames anglaises, comme les nommait Guillaume, enchanté que sa femme fût la bourgeoise veveysanne la plus prisée de la très aristocratique lady. Axel, présenté à Mrs. Moore et à sa fille, devint, en quelques jours, l’accompagnateur attitré de la jeune fille. Comme sa mère, Janet remarqua tout de suite le regard bicolore de ce bel adolescent dont la taille, l’assurance, les traits virils et la distinction naturelle ne pouvaient manquer de séduire.
     
    Axel promena Janet sur le lac avec les jumelles Ruty, la conduisit à Belle-Ombre dans le cabriolet de sa mère, lui ouvrit les chais où se bonifiaient, dans d’énormes tonneaux de chêne clair, les vins des Métaz. Comme la jeune fille sortait d’un caveau, un peu étourdie par les effluves vineux, elle osa, pour la première fois, évoquer le regard d’Axel.
     
    – Vos yeux sont difficiles à regarder. Je n’en ai jamais vu de semblables, c’est un accident ou…
     
    – Non, je suis né avec ces yeux-là. C’est une anomalie… naturelle, pas une maladie, s’empressa de répondre le garçon d’un ton sec.
     
    Janet, consciente de sa bévue, crut bon d’ajouter une considération propre à augmenter l’agacement d’Axel, mais qui, au contraire, l’amusa.
     
    – Chez nous, on dit d’un cheval qui a les yeux comme vous qu’il est walleyed .
     
    – Alors, je suis comme un cheval anglais, miss ! dit Axel en riant, ce qui accrut à tel point la confusion de la jeune fille qu’elle enchaîna dans sa langue maternelle :
     
    »  But have you… good eyesight 4  ? demanda-t-elle, gentille et rougissante.
     
    –  I have eyes for nobody but you 5   ! répliqua-t-il sur le même ton, prouvant ainsi qu’il possédait assez d’anglais pour faire un compliment en forme de déclaration.
     
    Janet se détourna pour dissimuler une délicieuse émotion, puis, avec une vivacité expéditive, posa ses lèvres fraîches sur la joue de son compagnon. Ce baiser maladroit, presque brutal, émut Axel sans le troubler. Initié par Tignasse aux embrassades voluptueuses, il prit ce geste pour ce qu’il était : emportement innocent et tendre d’une enfant.
     
    Il devint vite évident pour les Métaz et leurs familiers que la jolie miss Janet se plaisait en compagnie d’Axel. Les adolescents passaient des heures ensemble, à parler de tout et de rien. Le garçon découvrit bientôt que les études des jeunes filles de l’aristocratie d’outre-Manche se limitaient à la lecture de quelques auteurs anglais du xviii e  siècle – comme Pope, lady Montagu, la M me  de Sévigné britannique, Tobias Smollett, Henry Fielding, Oliver Goldsmith et

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