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HHhH

HHhH

Titel: HHhH Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Laurent Binet
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sécurité chez ces gens. Alors pourquoi ne pas
rester ? insiste le concierge. Valičík lui explique qu’il a reçu des
ordres, que c’est un soldat, qu’il est tenu d’obéir et qu’il doit rejoindre ses
camarades. Le concierge n’a pas à s’inquiéter, on leur a trouvé un abri sûr.
Seulement, il y fait très froid. Il leur faudra des couvertures et des
vêtements chauds. Valičík prend son manteau, se met une paire de lunettes
vertes sur le nez et suit Ata qui doit le conduire à sa nouvelle cachette. Il
oublie chez le concierge le livre que son hôte précédent lui avait prêté. A
l’intérieur du livre, il y a inscrit le nom du propriétaire. Celui-ci aura la
vie sauve grâce à cet oubli.
231
    Capitulation et servilité sont
les deux mamelles du pétainisme, un art dans lequel le vieux président Hácha,
ni plus ni moins gâteux que son homologue français, est décidément passé
maître. En témoignage de sa bonne volonté, il décide, au nom du gouvernement
fantoche dont il a la charge, de doubler la récompense offerte pour la capture
des assassins. Les têtes de Gabčík et Kubiš passent donc à dix millions de
couronnes chacune .
232
    Les deux hommes qui se
présentent à la porte de l’église ne viennent pas pour assister à la messe. L’église
orthodoxe Saint-Charles-Borromée, aujourd’hui rebaptisée église des
Saints-Cyril-et-Méthode, est un édifice massif accroché au flanc de la rue
Resslova, cette rue en pente qui part de la place Charles et descend vers le
fleuve, en plein cœur de Prague. L’instituteur Zelenka, alias « oncle
Hajsky » de l’organisation Jindra, est reçu par le père Petřek,
prêtre orthodoxe. Il lui amène un ami. C’est le septième. C’est Gabčík. On
le fait pénétrer par une trappe dans la crypte de l’église. Là, au milieu des
casiers de pierre où jadis on rangeait les morts, il retrouve ses amis :
Kubiš, Valičík, mais aussi le lieutenant Opálka, et trois autres
parachutistes, Bublík, Švarc et Hrubý. Un par un, Zelenka les a rassemblés ici,
parce que la Gestapo continue sans relâche à perquisitionner les appartements
en ville mais n’a pas encore eu l’idée de fouiller les églises. Il n’y a qu’un
seul parachutiste dont on n’a aucune nouvelle : Karel Čurda est
introuvable, personne ne sait où il est, s’il se cache ou s’il a été arrêté, et
si même il est encore vivant.
    L’arrivée de Gabčík fait
sensation dans la crypte. Ses camarades se précipitent pour l’embrasser. Il
reconnaît Valičík, teint en brun, affublé d’une fine moustache brune, et
Kubiš, l’œil gonflé, le visage encore marqué, qui manifestent le plus
bruyamment leur joie de le revoir. Gabčík, brisé par l’émotion, pleure, ou
rit aux éclats. Il est évidemment très heureux de retrouver ses amis à peu près
sains et saufs. Mais il est tellement désolé par la tournure des événements. A
peine les retrouvailles achevées, Gabčík commence une litanie amère à
laquelle ses amis vont devoir s’habituer : mélange d’excuses et de
lamentations, il maudit cette foutue Sten qui s’est enrayée au moment où il
tenait Heydrich en joue. Tout est ma faute, dit-il. Je l’avais devant moi,
c’était un homme mort. Et puis cette merde de Sten… C’est trop con. Mais il est
blessé, tu l’as eu, Jan ? Gravement ? Tu crois ? Les gars, je
suis tellement désolé. Tout est ma faute. J’aurais dû le finir au Colt. Ça tirait
partout, j’ai couru, et l’autre géant à mes trousses… Gabčík s’en veut
mortellement et ses amis ne parviennent pas à le consoler. C’est pas grave,
Jozef. C’est déjà énorme, ce qu’on a fait, tu te rends compte ? Le
bourreau en personne ! Vous l’avez blessé ! Heydrich est blessé,
c’est vrai, il l’a vu tomber, mais on dit qu’il se remet doucement à l’hôpital.
D’ici un mois, il sera de retour aux affaires, peut-être même avant, c’est sûr,
c’est increvable, ces bêtes-là. De toute façon, les nazis ont toujours une
chance insolente pour échapper aux attentats (je me rappelle Hitler, en 1939,
qui doit tenir son discours annuel à sa fameuse brasserie de Munich entre
20 heures et 22 heures mais qui quitte la salle à 21 h 07
pour ne pas rater son train, et la bombe qui explose à 21 h 30, tuant
huit personnes). Anthropoïde a lamentablement échoué, voilà ce qu’il pense, et
c’est sa faute. Jan n’a rien à se reprocher. Il a jeté la grenade,

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