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Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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qui ne vont guère ensemble, avec la rage du mourant, une ardeur de vie, de folie, qu'on n'a guère qu'au premier amour.
    Vu de près, cela faisait peur. Il était tellement à sa passion, à son emportement pour le chapeau, pour la patente de cardinal-ministre, qui sait? pour la tiare, qui sait? pour la Régence (sa fureur alla à ce point), qu'il n'y avait plus moyen de lui parler d'affaires courantes. Tout restait là. Mais on n'osait rien faire sans lui. Pour l'absolue nécessité, on hasardait d'entre-bâiller la porte, et il entrait alors dans des accès quasi-épileptiques. Sacrant, jurant, il se précipitait, courait, comme un chat-tigre, tout autour de sa chambre en sautant par dessus les chaises. On refermait, craignant d'être mordu.
    Voilà l'homme qui, aux grands jours, maniait l'hostie, faisait Dieu. Bouffon, brouillon, rieur et furieux, il massacrait la messe en blasphémant, grinçant ... Vraie figure de damné.
    Il était le vivant enseignement du sacrilége. Un Dieu si résigné, sous la main de Dubois, on fut curieux de voir ce qu'on pouvait lui faire impunément. On vit un frénétique, à l'église du Marché-Neuf (où l'on expose aujourd'hui les noyés), en plein jour, ôter ses culottes, sauter sur l'autel, le salir, barbouiller la Vierge et Jésus ( Buvat , 164). À Saint-Thomas du Louvre, tout se trouve un matin déshonoré de fiente humaine ( Buvat , 172). Au fond du faubourg Saint-Antoine, on prend des fous, qui, indignés de la patience du Christ, le font rôtir entre deux maquereaux, châtimentsymbolique, entre Dubois et le Régent ( Buvat , 171).
    L'affaire du Marché-Neuf fit grand bruit. On purifia solennellement l'église, et on eut soin que le fou mourût à la première torture qu'on lui donna. On pouvait dire pourtant qu'à ce moment Dubois avait fait davantage. Il avait barbouillé de sa malpropre intrigue l'Église universelle. Il avait fait qu'en cette année chacun démentît son principe, salît sa conscience, outrageât son Dieu intérieur.
    Voyons dans le détail cette opération dégoûtante:
    France. 1 o Ce que le Régent avait eu, dans sa vie si souillée, c'était d'être après tout un homme d'esprit, avec un goût naturel, généreux, pour les libertés de l'esprit. Ce qu'il avait de pire (et de pire que les vices mêmes), ce que Dubois cultiva à merveille, c'était un instinct bas, animal, d'adorer ses petits quand même . On a vu son étrange amour pour son aînée. Elle morte, pour les autres (plus innocemment) il reste un faible et plat père de famille, voulant pour elles de royaux mariages. Avec cela, Dubois le mena par le nez.
    Il n'y avait rien à faire en Angleterre. Les mariages étaient en Espagne. De là de grands ménagements pour cette cour. De là, servitude pour Rome, servitude aux Jésuites. On fait la révérence à la Bulle Unigenitus . On l'inflige au Parlement même (nov. 1720). Cascade inouïe de bêtises. Le Régent fait le sot et ne trompe personne. Et cela au moment éclatant des Lettres persanes , entre Voltaire et Montesquieu.
    2 o Pour Dubois et le Régent, si dépendants de l'Angleterre,la grosse question est de savoir comment elle prendra les mariages espagnols qui vont relier les Bourbons. Que pensera-t-elle de Dubois qui, pour se concilier Rome, pensionne le Prétendant, l'appelle Majesté?
    Il a vu l'Angleterre de près et il la sait par cœur. Tant fière, grognante et grommelante qu'elle soit, il sait qu'il y a tel morceau qui va la désarmer. Ce n'est plus l'Angleterre de Cromwell, d'idée haute, de foi violente, d'âpre et profond combat. Celle-ci, l'Angleterre de Blount et de Walpole, est insigne surtout pour la gloutonnerie. Soûlons-la, endormons-la. Qu'elle-même dise ce qu'elle veut, qu'elle fasse la carte du festin. Dubois fait faire à Londres notre traité avec l'Espagne. Deux articles en tout, pas un pour nous, tous deux pour l'Angleterre: 1 o seule elle aura l' assiento , la vente des nègres; 2 o seule elle aura la porte de la fraude, de la contrebande dans le Nouveau Monde. Un tout petit vaisseau, chargé de marchandises à la côte de l'Amérique. Vaisseau miraculeux, toujours vidé et toujours comble, que de grandes flottes viendront renouveler. Commerce ignoble, et qui devint barbare. La fraude se faisait hardiment, au nez des agents espagnols, et, au besoin, à main armée. Tout cela dirigé, commandité de Londres, justement au début de la réforme pieuse de Wesley. La constriction de décence, de petite pratique,

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