Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
Vom Netzwerk:
les autres vertus des quatre associés quise chargèrent de la grande entreprise, corrompre la vertu de Dubois .
    Law, jadis, pour jouer, avait fait faire de gros louis, lourds, à emplir la main. Cela ravissait les joueurs. Il pensa judicieusement que, dans l'agiotage au vol qui se faisait, on trouverait charmant d'avoir de gros billets, et il en fit de dix mille francs. Le bon Savoyard Chambéry, simple et rond, tout droit en affaires, en mit pour cinq millions en portefeuille, et, comme il eût porté un panier de pêches ou de fraises, il alla jovialement porter à Dubois cette primeur. Dubois se mit à rire. Il était besogneux pour son affaire de Rome. Il savait les Romains sensibles aux friandises. Il fut tenté pour eux. Il songeait bien aussi que le million anglais, après tout, n'était qu'un million, et que le bonhomme, au contraire, en ce premier payement, ouvrait à deux battants l'infini du Mississipi. Tout cela l'amollit. Il sentit son cœur. Qui n'en a? Le plus farouche homme d'État a son jour d'attendrissement. Il eut certain retour pour Law,—qui sait? reconnut la Tencin?
    Le vampire. Dubois ainsi permit et laissa faire. On obtint son inaction. Mais pour que le Système vainquît décidément et supprimât l' Anti-système , il fallait davantage; il fallait acheter l'action énergique et directe, la férocité de M. le Duc. Or, M. le Duc, fort cher en 1718, fut énormément cher en 1719, ayant alors une maîtresse terrible, madame de Prie, moins une femme qu'un gouffre sans fond.
    Lui, il n'était qu'une bête de proie, un brutal chien de meute, violent, mais aveugle et borné. Il pouvaithapper des morceaux, terres, pensions, etc., mais il n'aurait pas su, je crois, faire si bien fonctionner la grande pompe de l'agiotage, qui le 18 septembre lui donna huit millions, vingt en octobre, etc. C'est qu'il était alors mené par un esprit (vampire? harpie?), un être fantastique, insatiablement avide et cruellement impitoyable, qui, six années durant, aspira notre sang.
    Elle semblait née de la famine, des jeûnes que son père, le fournisseur Pléneuf, fit aux armées, aux hôpitaux. Déjà grande, elle eut pour éducation la ruine. Pléneuf, trop bien connu, se sauva à Turin. Sa mère, belle et galante, vivota d'une cour d'amants, qui, n'étant pas jaloux, la partageaient en frères. On parvint à marier la fille à un homme qui prit pour dot l'ambassade de Turin, ambassade nécessiteuse où elle eut les souffrances du pauvre honteux qui doit représenter. Elle devint demi-italienne, grâce, finesse et séduction,—au dedans vrai caillou, l'altération du torrent sec en août, ou d'un vieil usurier de Gênes.
    Elle croyait, en rentrant, profiter d'abord sur sa mère, lui prendre, par droit de jeunesse, ses fructueux amants. Ils furent fidèles. La mère, beauté bourgeoise et bien moins fine, avait je ne sais quoi d'aimable qui retint. Cela aigrit la fille; elle ne lui pardonna pas de rester belle et d'être aimée encore. Elle la cribla d'abord de dards vénéneux, de vipère. Puis, comme elle n'en mourut pas, elle lui joua le tour, dès qu'elle fut puissante, de faire revenir son mari. Enfin, elle lui tua ses amants un à un, travailla à la faire périr à coups d'aiguille.
    L'avénement de madame de Prie chez M. le Duc, c'est celui de la hausse. Jusque-là il avait pour maîtresse la Mancini (Nesle, née Mazarin). Mais dans l'été, celle-ci l'emporta décidément. Elle s'empara de lui juste au moment de la curée, la razzia d'août et de septembre. Maîtresse alors et du duc et de tout, elle fait revenir son père, Pléneuf, donne à ce vieux voleur la caisse de la guerre, le profit de l'affaire d'Espagne (septembre-octobre, ms. Buvat ).
    Law craignait le vautour.—Il trouva l'araignée.—Mais qu'est-ce que le vautour, la bête qui n'a que bec et griffes, comparé aux puissances des affreuses araignées de mer, des suceurs formidables qui aspirent en faisant le vide, qui tirent parti de tout, qui des os extraient la moelle, et du craquant squelette savent encore se faire une proie? [Retour à la Table des Matières]
CHAPITRE XII
LA CRISE DE LAW
Août-Septembre-Octobre 1719
    Montesquieu parle quelque part d'une pièce de ce temps-là: Ésope à la cour , et dit qu'en sortant de la voir, il se sentit la plus forte résolution qu'il ait jamais eue d'être honnête homme. Cette pièce avait fait aussi impression sur Law. Ruiné par le Système, il écrivait en 1724: «On a mis sur la scène

Weitere Kostenlose Bücher