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Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Histoire De France 1715-1723 Volume 17

Titel: Histoire De France 1715-1723 Volume 17 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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entendre dans la foule exigeante, fort insolemment familière, de ces demandeurs acharnés.—Quelle résistance? aucune;—une mollesse incroyable, une aveugle, une lâche générosité pour être quitte et se débarrasser en donnant tout à tous.
    Et tranchons par le mot brutal, mais vrai, de Saint-Simon: «La filasse? non pas ... le fumier.»
    Triste soutien dans la violente crise et les périls de Law. En 1718, on parlait de le pendre. En 1719, on parlait de l'assassiner.
    Les Anglais le menaçaient fort. Pendant plusieurs années, fort à leur aise ils avaient spéculé sur les variations de nos monnaies; ils exportaient les monnaies fortes. Ils ne pardonnèrent pas à Law les mesures qui frappèrent ce trafic en juillet. Nos projets d'établissement au Nouveau Monde leur plaisaient peu. Leur Compagnie du Sud regardait de travers notre Compagnie des Indes. Elle y voyait le grand obstacle à la hausse de ses actions.
    Stairs, leur ambassadeur, n'était qu'un Écossais, mais d'autant plus porté à dépasser les Anglais mêmespar son zèle furieux. Il était né sinistre, et il avait eu une terrible enfance. Il eut le malheur en jouant de tuer son frère. On prétendait (à tort?) qu'au passage du Prétendant (1716), il avait aposté un Douglas pour l'assassiner. Il avait la figure d'un coquin à tout faire, et ce qui le rendait plus dangereux encore, c'est qu'il l'eût fait en conscience. C'était un coquin patriote.
    Il prit occasion des demandes d'argent que le Prétendant avait fait à Law (le 5 août), et du secours que celui-ci lui fit passer. Il jeta feu et flamme, cria que l'alliance était rompue, que Law armait l'ennemi de l'Angleterre. De septembre en décembre, il le poussa de ses menaces. Rien ne dut agir plus sur Law et sur sa femme pour leur faire accepter, désirer à tout prix la protection du duc de Bourbon et de sa bande. C'était bien peu que le Régent.
    Protection forcée d'ailleurs et imposée, comme celle des brigands d'Italie, qui ne permettraient pas au voyageur de marchander leur passe-port. Les Condé avaient toujours été de ces redoutables mendiants à qui il faut bien prendre garde. Forts de la gloire militaire de Rocroi, de Fribourg, mais non moins forts des souvenirs du grand massacre de Paris, ils demandaient et exigeaient. Leurs sinistres portraits d'éperviers, de vautours, de dogues, ont tous un air d'âpreté famélique. La vie humaine était légère pour eux. On le savait par le père de M. le Duc, ce nain terrible qui, sans cause, par jeu, empoisonna Santeuil. On ne le sut pas moins par son frère Charolais. On l'aurait su peut-être mieux par M. le Duc lui-même, s'il eût trouvé le moindre obstacle. Il n'avait fait nul crimeencore, et chacun avait peur de lui. Dans ce temps d'indécision, lui seul ne flottait pas. Dur et borné (bouché, dit Saint-Simon), n'ayant ni scrupule, ni ménagement, ni convenance, il allait devant lui. On le vit au coup d'État d'août 1718, où il dit nettement qu'il serait contre le Régent si on ne lui donnait la dépouille du duc du Maine. On le vit en décembre, quand il empoigna sa tante et la garda chez lui; de quoi elle eut si peur qu'à tout prix, en s'humiliant, elle se jeta dans les bonnes mains du Régent, et fut si aise alors qu'elle lui sauta au cou de joie.—On craignait d'autant plus ce borgne à l'œil sanglant, qu'avec les apoplexies du Régent, la vessie de Dubois, il était trop visible qu'il allait avoir le royaume.
    Les Condé, en 1600, avaient douze mille livres de rente, dix-huit cent mille en 1700. Ajoutez les grosses pensions stipulées en 1718. Profonde pauvreté. Mais, comme elle augmenta en 1719, lorsque M. le Duc, en madame de Prie, épousa la famine, l'impitoyable abîme qui, pour son coup d'essai, avale en un mois vingt millions ( Ms. Buvat , 1083).
    Que fût-il arrivé si Law, tellement menacé des Anglais, se fût mis en travers du prince agioteur, s'il eût bravé le borgne et sa vipère? Je le laisse à penser. Certes, des hommes plus vaillants que lui auraient fort bien pu avoir peur, se sauver. Il resta pour son déshonneur. Sa femme et sa fortune, ses rêves utopiques le firent rester sous le couteau.
    Voilà le spectacle de honte.
    Les malheureux rentiers, refoulés de la Banque, qui exigent leurs reçus, sont en foule au Trésor pouravoir ces reçus. Ils y font la queue jour et nuit. Ils couchent, mangent dans la rue, pour ne pas perdre leur tour. Enfin celui qui l'a, à la longue, ce bienheureux reçu,

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