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Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Titel: Histoire De France 1724-1759 Volume 18 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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(du 15 au 31 janvier), on transporte Damiens à Paris. La nuit du 18, à deux heures du matin, par la barrière de Sèvres, c'est comme un tourbillon, un tremblement de terre. Force carrosses, force cavalerie qui va le pistolet au poing, comme en ville prise. Paris apparemment est du parti de Damiens et voudrait le sauver? Malheur aux curieuses en bonnet de coton! Gare aux fenêtres! Fermez, ou l'on fait feu! ( Barbier , VI, 345.)
    C'est un mystère d'État. Silence. La Gazette de France n'ose en dire que trois mots. Et le Mercure n'en parle que pour dire qu'il n'en peut parler. La magistrature le défend.
    Les magistrats bien décidés à plaire hésitent encore. À qui plaire? Qui est la cour en ce moment? Le gouvernement existe-t-il? Argenson et Machault sont àcent lieues de croire qu'ils vont tomber en même temps, Choiseul, l'agent zélé de Vienne, qui venait d'arriver pour seconder la Pompadour, se donna le plaisir d'aller voir Argenson et de lui dire sa chute. Il n'en voulut rien croire. «Bah! dit-il, le roi m'aime.» Il se croyait le favori . Choiseul sort. Une lettre du roi, sèche et dure, lui dit de partir. La lettre, au contraire, pour Machault était affectueuse, il partait honoré, remercié, avec pension.
    Ainsi la Pompadour, faisant la part du feu, sacrifiant Machault, fut rétablie, et plus haut que jamais. Avec son Autrichien Choiseul et son ami Bernis, pendant tout février, elle fit un travail très-agréable au roi, un maquignonnage secret pour gagner les Enquêtes, calmer le Parlement et désarmer les fanatiques. Le roi désirait vivre, et Vienne désirait tourner tout vers la guerre. La Pompadour voulait se venger, s'affermir en brisant le Dauphin, les Jésuites. Elle faisait entendre secrètement aux Parlementaires qu'elle était avec eux, intéressée comme eux à la suppression des Jésuites. Damiens réellement leur avait porté un grand coup; les deux cents enfants retirés le 6 janvier de leur collège n'y rentrèrent pas; l'herbe poussa dans les cours de Louis-le-Grand ( J. Quicherat ). Leur guerre américaine à l'Espagne et au Portugal rappela leur passé régicide et leur élève Jean Châtel. Kaunitz était contre eux, donc Choiseul et Bernis. Sur ce terrain commun, on put négocier avec les Jansénistes en février, en août ( Rich. , VIII, 363-399).
    Le 1 er février, l'exil de d'Argenson marquant bien la situation, et montrant le Dauphin et les Jésuites enbaisse, on sut comment on ferait procès. On n'employa pas Damiens à écraser les jansénistes avec qui on négociait. On ne compromit point les conseillers chez qui Damiens avait servi. Leur présence, en effet, leurs paroles fières et imprudentes auraient pu gâter tout. Maupeou et ses consorts craignaient l'éclat, le bruit. Le peuple leur était si hostile que le 29, tenant une audience publique, ils n'osaient plus sortir; ils s'esquivèrent par certaine porte de derrière.
    Leur plan pour Damiens, dont ils ne sortirent pas, quoiqu'il fût démenti en tout, fut de supposer qu'il était l'instrument gagé d'un parti. Quel parti? anglais? janséniste? jésuite? on ne l'éclaircit point.
    On tenait fort à faire de Damiens un vaurien et un libertin. On fit comparaître les siens, père, frères, femme, fille, pour le charger et parler contre lui. On les terrifia, les faisant accusés , et non simples témoins. Épouvantés, ils dirent le pis qu'ils purent, au fond très-peu de chose. Sa vieille femme surtout lui reprocha d'être souvent six mois sans revenir coucher.
    Ses maîtres ne l'accusèrent que de manies, mais plusieurs déclarèrent qu'ils tenaient fort à lui. Et lui aussi il fut souvent attaché à ses maîtres. Quand il revit M. de Maridor, il s'attendrit beaucoup et s'essuya les yeux. On voit, par la déposition remarquable de ce témoin, le bien, le mal. Il servait bien. Il avait de l'esprit et de la piété, mais n'avait pas passé impunément par les Jésuites: il dissimulait par moment, et se mêlait de trop de choses (194).
    Ce qui surprend, c'est que la petite dame entretenuequi lui fut si fatale «et lui jeta un sort,» ne lui reprocha rien dans sa déposition, sauf d'avoir montré répugnance à faire certaines commissions, autrement dit de n'avoir pas aimé le métier de mercure galant. Il avait l'air sinistre, parlait seul et se regardait dans les glaces. Du reste, point méchant, ni adonné au vin, dit-elle (182).
    Ainsi les maîtres, pas plus que les parents, ne le chargèrent. De lui et de lui

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