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Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Histoire De France 1724-1759 Volume 18

Titel: Histoire De France 1724-1759 Volume 18 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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famille sombrement muette, les murmures, les mines maussades le piquent. N'est-il donc pas le maître? Pour faire dépit à tous, il la déclare maîtresse, et, pour comble, à Pâques.
    Quelle chute après cette bâtarde des Condés, que le roi appelait princesse ! Celle-ci, la grisette, la robine (comme on dit tout bas), n'est pas née . Eh bien! c'est tant mieux. Le roi la crée et la fait naître ; il y met son plaisir.
    En quinze jours il la décore, l'honore, lui donne un train et des palais. Il la titre du nom sonore d'une maison éteinte. Elle est et restera la marquise de Pompadour (26 avril-6 mai 1745).
    Le roi était si mal avec sa famille au départ pour la Flandre, qu'il ne dit pas même adieu à la reine. Il aurait bien voulu laisser ici le paquet le plus lourd, son gros jeune dévot. Mais cela était difficile. Arrivé le 9 mai au camp, devant Tournai, il apprit dans la nuit que l'ennemi marchait, qu'il y aurait bataille. Il défendit qu'on éveillât son fils, partit, voulant peut-êtrequ'il ne le joignît pas à temps. Mais le Dauphin fit hâte, ne lui donna pas ce plaisir.
    L'armée était très-forte (aux dépens de celle du Rhin); elle n'avait guère moins de quatre-vingt mille hommes. Et tout cela était mené par un malade, par Maurice, hydropique, à qui, au départ, on venait de faire la ponction. Ce que ce héros de la mode avait tant poursuivi, et par tant de moyens, intrigues et coups d'audace (plus que coups de génie), le commandement en chef, il l'avait, et, mourant, il ne voulait pas le lâcher. Autant qu'il le pouvait, il cacha son état. Il assiégeait Tournai, mais souffrait tellement qu'il vit par l'œil d'autrui, chargea ses lieutenants de chercher, de choisir un lieu propice à la bataille ( Rich. ).
    En passant l'Escaut on trouvait trois villages, Autoing, Fontenoy et Barry, où l'on fit trois redoutes, et de plus les villages avaient devant eux deux ravins. Cela paraissait fort. Ce qui gâtait la chose, c'est que l'armée française avait dans le dos la rivière. Sa retraite c'était l'Escaut.—Des ponts étaient jetés tout prêts, un spécialement pour le roi en cas d'échec. La retraite de tant de mille hommes à la file sur des ponts étroits est une opération scabreuse. Notez que pour garder ces ponts, on mit sur les deux rives un corps de vingt mille hommes qui restait l'arme au bras.—Notez que pour garder le roi on immobilisa encore sa Maison, une armée de six mille hommes d'élite avec une batterie de canons. Plan étonnant, d'après lequel les combattants réels n'étaient plus guère que cinquante mille. Notre supériorité de nombre était parfaitement annulée.
    Maurice vint de Tournai dans une carriole d'osier, vit fort bien le danger (dit Richelieu [35] ). Mais le temps lui manquait pour changer de position. L'ennemi avançait, conduit par un fils du roi George, le duc de Cumberland, et le roi allait arriver.
    Le 11 mai, de bonne heure, le brouillard s'étant élevé, notre artillerie tirait déjà. Le roi était placé un peu haut et près d'un moulin, de manière à voir sans danger. Couvert de sa Maison, de ses canons à lui, il était gai. Et, dans ce groupe de seigneurs, de ministres, qui l'entouraient, pendant que le Dauphin priait tout bas sans doute, il se mit à chanter et à faire chanter une chanson, trop gaie, de corps de garde. Cela ne parut pas humain, au moment d'une si grande destruction d'hommes. «C'était bravoure?»—J'en doute. Les très-braves sont calmes et froids dans les grandes attentes.
    Les Anglais, Hollandais, Hanovriens regardaient cependant comment percer à nous. Il fallait franchir les ravins; puis on était en face de trois redoutes, de Barry sur la droite (regardant les Anglais), d'Autoing à gauche et Fontenoy au centre. Dans ces redoutes tonnaient cent vingt canons. L'embarras cependant pour Cumberland n'était pas médiocre de s'être avancé là, si près du roi de France, nez à nez et de reculer. Le vieil Autrichien Kœnigseck conseillait de tâter, de ne pas trop s'engager à fond. Cependant le prix étaitgrand. Non pas Tournai, mais le roi même. Pour qui se souvenait de Poitiers, de Pavie, de nos rois prisonniers, cette présence de Louis XV était une grande tentation.
    Il y avait des gens acharnés. De même que chez nous la brigade irlandaise flairait le sang anglais, dans les rangs anglais le Refuge, les fils des protestants altérés de combat, auraient donné leur vie pour prendre le petit-fils de Louis XIV.

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