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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Michelet
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Bible de l'humanité .)
    On a juré mille fois devant moi que l'Italie ne pourrait renaître jamais. Elle est renée, vit et vivra.
    Eh bien! je jure à mon tour que l'Indostan revivra; qu'il revivra, et de lui-même, et par des races amies.
    Non, certes, par les Anglais, gras, vieux, riches et endormis. Non pas, certes, par les Russes, que l'on connaît depuis deux ans, et qui sont l'horreur du monde.
    Les Russes y viendront sans doute. Il faut bien qu'ils engraissent l'Inde de leurs corps, comme ont fait les autres peuples. Ils y fondront plus vite encore, disparaîtront comme neige. Et bien plus que les Anglais, ils laisseront un souvenir exécré de barbarie.
    Tout cela est à la surface. L'Inde est comme l'Océan, et rien n'y bouge en dessous. Elle revivra par sa race guerrière dont la discorde seule a créé, et récemment a sauvé l'empire anglais. Si elle s'aide des Européens, ce sera de ceux du Midi, Provençaux, Catalans, Grecs, Siciliens, Maltais, Génois, de ces races sobres, qui résistent à tout climat et qui sont aussi durables que l'est peu l'homme d'Angleterre dans la dévorante Asie.
    Une telle paix demandait des fêtes. Elles furent fort irritantes. On trouva d'un comique amer qu'une statue triomphale, après Rosbach et tant de hontes, fût érigée à Louis XV. Des épigrammes sanglantes furent attachées au piédestal.
    Tout cela en pleine banqueroute. Le Roi ne paye rien aux Français; il réduit de moitié la rente; mais il paye les étrangers. L'Autriche, après cette guerre ruineuse que l'on fit pour elle, reçoit jusqu'au dernier sou les subsides arriérés, pas moins de trente-quatre millions.
    Nos Autrichiens s'arrondissaient. Toute la légion lorraine, les Choiseul, Praslin, Stainville. Choiseul achète Chanteloup, se donne un grand fief en Alsace. Son revenu primitif, de six mille livres de rentes, a profité tellement qu'il a un million de rentes, si nous en croyons Barbier.
    On ne supprime qu'un impôt. Mais un autre le remplace. Tout impôt de guerre persiste. Les dons gratuits des villes s'exigeront pendant cinq ans. Le second vingtième de guerre durera encore six ans. Le premier vingtième se classe dans l'impôt perpétuel et reste pour l'éternité.
    Le 31 mai 1763, fanfares! Le Roi, avec une armée, gardes à pied, gardes à cheval, fait son entrée redoutable, et tient son Lit de justice. Il impose au Parlement... quoi? ces édits odieux qu'on n'ose même publier encore. Le secret est commandé aux magistrats. Contraste étrange! grand bruit et grande lâcheté!
    Les remontrances, violentes et sur un ton inouï, firent entendre que l'autorité par cet abus de la forcese suicidait, qu'en foulant la loi aux pieds, la royauté supprimait la base même qui soutenait la royauté.
    Le Parlement de Rouen, non moins hardi, affirma que la propriété est un droit antérieur et supérieur à celui du gouvernement, réclama pour la nation son imprescriptible droit d'accepter librement la loi.
    La Cour des Aides alla plus loin. Par l'organe de son président, le jeune et courageux Malesherbes, magistrat de vertu antique et d'admirable candeur, elle prononça le mot solennel et décisif, demanda le grand remède, l'appel des États généraux (23 juillet 1763).
    Les Parlements, peu amis des philosophes, leur empruntent désormais des doctrines, des paroles même. Celui de Rouen a parlé comme eussent fait Quesnay, Mirabeau (dont l' Ami des hommes a paru dès 1755). En 1763, les Entretiens de Phocion par Mably, sous forme plus faible, font accepter les idées qui ont étonné naguère dans le Contrat social de 1762. Malesherbes, ami des philosophes, qui dans la direction des affaires de la librairie servit si bien Rousseau et tous, donne à la pensée commune une formule forte et simple: l'appel à la nation.
    Irait-on jusqu'à l'action? La puissance judiciaire frapperait-elle la royauté? Les Parlements de Grenoble, Besançon, Rouen, Toulouse, citent, appellent en justice l'homme du roi, leur gouverneur de Province. Le plus violent fut à Toulouse. Le gouverneur Fitz-James avait mis les magistrats aux arrêts dans leurs maisons. Le Parlement, à son tour, voulut arrêter Fitz-James.
    La question révolutionnaire se posait avec netteté: laquelle des deux autorités avait le droit d'arrêter l'autre?
    Si les Parlements s'unissaient sur ce point, si Paris surtout appuyait ici Toulouse, on sautait d'un coup vingt-cinq ans, on passait sans transition à l'année 89, et le cataclysme

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