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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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hardiment sur Tournai, et, les Anglais ayant voulu délivrer cette place importante de la barrière hollandaise, la barrière dressée au traité d’Utrecht contre la France, furent battus à Fontenoy, en présence de Louis XV (1745). Cette victoire fameuse, presque légendaire (« Messieurs les Anglais, tirez les premiers »), suivie de plusieurs autres succès, nous donnait bientôt toute la Belgique. Louis XV entrait triomphalement à Anvers. Les Hollandais, qui avaient de nouveau renversé la République et rétabli le stathoudérat, comme au siècle précédent, étaient mis à la raison par la prise de Berg-op-Zoom. Mais il ne nous suffisait pas d’être victorieux aux Pays-Bas. Le théâtre de la guerre était plus vaste. Nous étions battus en Italie, et, comme au seizième siècle, la Provence était envahie par les Impériaux. Frédéric II achevait ce qu’il avait à faire en Allemagne, battait les Saxons, entrait à Dresde, puis, nous trahissant de nouveau, s’arrangeait avec l’Autriche qui lui laissait la Silésie tandis qu’il reconnaissait le nouvel empereur François de Lorraine. Enfin et surtout les Anglais, maîtres de la mer, avaient pu un moment débarquer sur les côtes de Bretagne. La lutte s’était étendue aux colonies et nous nous défendions de notre mieux au Canada et aux Indes où Dupleix édifiait avec de faibles moyens une œuvre grandiose. Qu’arriverait-il donc si la guerre continuait ? Peut-être garderions-nous les Pays-Bas autrichiens. Mais alors aucune paix avec l’Angleterre ne serait possible. Nous perdrions nos colonies. Les hostilités se perpétueraient avec l’Autriche et nous savions désormais qu’il ne fallait pas compter sur Frédéric. Mieux valait liquider tandis que nous tenions des gages. Ainsi cette première guerre de Sept Ans s’acheva par une paix blanche (1748).
    Le traité d’Aix-la-Chapelle a passé pour un monument d’absurdité. C’est de lui qu’il devint proverbial de dire : « Bête comme la paix. » Mais, quand le principe de la guerre a été mauvais, comment la paix pourrait-elle être bonne ? Tout ce que nous avions gagné, au dix-huitième siècle, à reprendre contre les Habsbourg la politique qui était opportune au dix-septième, c’était d’avoir agrandi la Prusse et détruit l’équilibre de l’Europe. De la faute commise par la France en 1741, Frédéric fut le bénéficiaire. Déjà, pendant la campagne, il avait été l’arbitre de la situation, nous prêtant son concours autant qu’il y avait intérêt et pas une minute de plus. L’arbitre il le serait encore bien mieux puisqu’il était plus fort qu’avant. Dès ce moment, il était clair que la Prusse aspirait à prendre en Allemagne la place de l’Autriche et que cette ambition n’était plus démesurée. Alors, si la France s’obstinait dans une politique antiautrichienne, elle travaillait pour Frédéric. Si nous changions de système, si nous renversions nos alliances, nous devions avoir Frédéric pour ennemi. Dans les deux cas, l’Angleterre, avec qui nous n’avions rien réglé, avec qui notre rivalité coloniale continuait, trouvait un soldat sur le continent. Voilà ce que nous avait coûté l’erreur du parti de Belle-Isle, l’anachronisme de la lutte contre la maison d’Autriche. La politique française avait perdu sa clarté. Elle avait cessé d’être intelligible à la nation et elle l’était à peine, dans cette masse de contradictions, pour ceux qui dirigeaient les affaires et qui avaient besoin avant tout de retrouver une ligne de conduite. L’extrême complexité d’une Europe et d’un monde qui se transformaient tous les jours aggravait le conflit des opinions et des théories, et ce conflit rendait lui-même plus difficile la tâche de notre politique, ouvrait la porte aux intrigues et aux intrigants. C’est dans cette confusion que se forma le célèbre « secret du roi », superposition d’une diplomatie à une autre, surveillance d’une diplomatie par une autre. Il faudra encore du temps avant que le désordre causé par la folle guerre de la succession d’Autriche soit réparé et que la politique française retrouve une méthode.
    Rien de plus singulier d’ailleurs que l’état des esprits en France au milieu du dix-huitième siècle. Jamais il n’y a eu autant de bien-être chez nous qu’en ce temps-là. Jamais la vie n’a été aussi facile. Nous pouvons en juger par la peinture, le mobilier, les

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