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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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culte de l’empereur. Le retour des Cendres, c’était aussi un programme, celui d’une attitude « énergique », on voulait dire provocante, au-dehors, et la revanche des traités de 1815.
    Cette politique, si téméraire, si dangereuse qu’on a pu appeler le parti de Thiers le parti de la fanfaronnade, avait pourtant la faveur de l’opinion publique. Mais l’opinion publique, c’étaient la bourgeoisie, les députés, les journaux. La grande masse du pays restait immobile, étrangère à ces débats. Elle n’était même pas consultée. On conçoit que Thiers, à ce moment-là plus qu’à aucun autre, ait été hostile au suffrage universel : il savait bien que la France rurale donnerait son appui à la politique pacifique, celle du roi, parce qu’il n’était pas possible d’intéresser le paysan au pacha égyptien Méhémet-Ali, dont la cause soulevait autant d’enthousiasme que naguère celle de la Grèce en avait soulevé. Il y avait déjà plusieurs années que les exploits de Méhémet-Ali, conquérant oriental, retentissaient en Europe, ajoutaient à la question d’Orient, toujours ouverte depuis le dix-huitième siècle, un élément dangereux, en menaçant au sud la Turquie menacée au nord par les Russes. Jusqu’alors la monarchie de Juillet s’était efforcée de jouer le rôle de médiatrice entre la Russie et l’Angleterre, toujours rivales en Orient. La politique française posait en principe l’intégrité de l’Empire ottoman, pièce de l’équilibre européen, dans l’idée qui avait été celle de Talleyrand depuis le Congrès de Vienne : compenser l’abandon des conquêtes de la France par l’interdiction des conquêtes aux autres puissances. Cette méthode, Thiers la changea radicalement. Ce qu’il cherchait en Orient, c’était un succès par une victoire du héros Méhémet-Ali, en amenant le sultan de Constantinople à laisser la Syrie au conquérant égyptien. Cette action séparée, aussitôt connue en Angleterre, y détermina une violente riposte : une coalition contre Méhémet-Ali, en réalité contre la France accusée de troubler la paix européenne. Et cette coalition, c’était celle des quatre grandes puissances : Angleterre, Russie, Prusse et Autriche. Le traité du 15 juillet 1840 renouait le pacte de Chaumont. C’était la guerre, celle que Louis-Philippe avait redoutée, la lutte inégale « d’un contre quatre ». À l’explosion des sentiments belliqueux qui se produisit alors chez les Français, on put juger de leurs illusions, de leur méconnaissance du danger. Henri Heine, à Paris, observait « un joyeux enthousiasme guerrier plutôt que de la consternation : le mot d’ordre commun est : guerre à la perfide « Albion ». Louis-Napoléon Bonaparte, non moins bon observateur, marqua ce moment par une manifestation nouvelle : il débarqua à Boulogne, d’où son oncle, jadis, avait menacé la puissance anglaise. Il fut cette fois enfermé au fort de Ham, d’où il s’évadera bientôt. De cette seconde équipée, son étoile ne devait pas souffrir. Thiers continuait à travailler pour lui.
    Quelque imprudent qu’il fût, Thiers se rendait compte qu’un conflit avec les Anglais serait dangereux. Il se flatta d’apaiser l’Angleterre et de tourner tout l’effort de la France vers une guerre contre la Prusse et l’Autriche où de faciles victoires apporteraient la revanche de Waterloo, détruiraient les traités de 1815. Ce qui surgit alors, au moins égal en intensité au sentiment national français, ce fut un nationalisme germanique, aussi violent qu’en 1813, signe avant-coureur des ruées et des invasions prochaines. C’était ainsi déjà que, cent ans plus tôt, le parti antiautrichien avait jeté la France dans une guerre inutile. C’était ainsi qu’en 1792 les Girondins avaient ouvert la guerre de peuple à peuple. Cependant l’entraînement chez nous était tel qu’il gagnait la famille royale elle-même. « Mieux vaut, disait le duc d’Orléans, périr sur le Rhin et le Danube que dans le ruisseau de la rue Saint-Denis. » Presque seul, malgré son ministre, l’opinion et son entourage même, Louis-Philippe tint bon pour la paix, sachant que l’Angleterre ne lui permettrait pas plus qu’elle ne l’avait permis à la Révolution et à Napoléon ler de reprendre la politique des conquêtes. Bravant l’impopularité, il s’interposa, désapprouva le langage belliqueux de Thiers, et, au mois

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