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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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voyait s’engager dans des entreprises de plus en plus hasardeuses, affronter la Lorraine, l’Alsace, l’Allemagne, la Suisse. Louis XI le sentit perdu. Désormais il se garda d’intervenir autrement qu’en lui suscitant des ennemis. Il fit confiance au temps, attendit son heure. Il donna même Saint-Quentin pour que le duc de Bourgogne se tournât d’un autre côté. Ce côté, c’était celui de Granson et de Morat où les cantons suisses infligèrent deux graves défaites au puissant duc. Il ne s’en remit pas. Rien ne lui réussit plus. Devant Nancy, dont il voulait faire la capitale de son État, la tête d’une Lotharingie nouvelle, il trouva une mort misérable (1477).
    Plus grand bonheur ne pouvait arriver à la France. Sans effort de notre part, un ennemi dangereux était abattu. Et puis, Charles n’avait pas de fils : ses apanages retourneraient donc à la couronne. Ils n’y retournèrent pas sans des difficultés qui eussent été plus grandes si le Téméraire n’avait fini dans un désastre : Louis XI dut encore mettre des garnisons en Bourgogne, en Picardie et en Artois. Quant à l’héritière, Marie de Bourgogne, les Pays-Bas lui restaient en propre. Elle était déjà à marier, presque fiancée à Maximilien, le fils de l’empereur Frédéric. On reproche à Louis XI de ne pas lui avoir donné son fils. Mais le dauphin n’avait que huit ans et Marie de Bourgogne avait des rancunes contre la maison de France. Elle porta les Pays-Bas dans la maison d’Autriche. Funeste mariage ! Trois siècles plus tard, Louis XV disait devant le tombeau de Marie et de Maximilien : « Voilà l’origine de toutes nos guerres. » Cependant, sur le moment même, le mal ne parut pas si grand. L’empereur germanique était si faible, si dépourvu de ressources, que son fils ne songea même pas à revendiquer l’héritage entier de Charles le Téméraire. Quant à donner un prince du sang pour époux à Marie de Bourgogne, comme le suggérait Commines, Louis XI refusa avec raison. Pas plus que son père, il ne se souciait de recommencer les apanages, de ressusciter peut-être un parti bourguignon.
    D’ailleurs, il recueillait de toutes parts. Le bon roi René, le roi d’Aix, mourait bientôt lui laissant l’Anjou, tandis que la Provence, allant à un héritier sans enfants, revenait peu après à la France. Un accident de cheval enlevait Marie et mettait fin aux dernières difficultés de la succession de Bourgogne. La paix d’Arras fut conclue avec Maximilien. Alors Louis XI posséda paisiblement. Picardie, Bourgogne, Provence et Roussillon, Maine et Anjou : voilà ce qu’il laissait à la France. Énorme progrès, non seulement par l’étendue et la richesse de ces provinces, mais parce qu’elles groupaient ce qui était épars et formaient autant de barrières contre les invasions. On ne peut mieux dire que Michelet : « Le royaume, jusque-là ouvert, se ferma pour la première fois et la paix perpétuelle fut fondée pour les provinces du centre. » De plus, la grande féodalité ennemie de l’État s’éteignait. Il ne restait plus à craindre que la maison de Bretagne. Louis XI avait achevé de réduire les grands vassaux ; le duc de Nemours fut décapité. Déjà le connétable de Saint-Pol l’avait été pour trahison. Enfin, autre résultat du règne : dès 1475 il avait été signé à Picquigny, avec l’Angleterre, une paix définitive, qui fermait la guerre de Cent Ans.
    Tout cela, ce grand pas vers l’unité et la sécurité de la France, sans guerre. Louis XI n’aimait pas le risque des batailles et il avait une armée pour intimider l’adversaire plutôt que pour s’en servir. Quel gré lui en a-t-on eu ? Aucun. Ce roi vivait sans luxe, entouré d’hommes obscurs, Olivier le Dain ou le médecin Coctier. Il était avare du sang de son peuple, et ne menait à l’échafaud que des princes traîtres ou rebelles. Sa légende n’en est pas moins sinistre et elle a porté jusqu’à nous les racontars du temps, tout ce que les agents bourguignons propageaient. Les foules sont romanesques et sentimentales. Pour elles, Louis XI, tout en calcul, qui choisissait ses victimes utiles, resta l’homme noir. On plaignit Saint-Pol et Nemours. On se défendit mal d’admirer Charles le Téméraire, un de ces hommes qui, à l’exemple de Napoléon, frappent les imaginations jusque par leur fin tragique. Mais, pour Louis XI, le résultat seul comptait. Il mettait loin en

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