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Histoire de France

Histoire de France

Titel: Histoire de France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques Bainville
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près de vingt ans, c’était un effort considérable de discipline, d’organisation, d’argent même. Richelieu, appuyé sur le roi, avait exercé une véritable dictature que le peuple français avait supportée impatiemment, mais sans laquelle l’œuvre nationale eût été impossible. Les grands n’étaient plus seuls à se révolter. Plus d’une fois les paysans se soulevèrent à cause des impôts, les bourgeois parce que la rente n’était plus payée. La grandeur du résultat à atteindre, la France au Rhin, la conquête des « frontières naturelles », la fin du péril allemand, l’abaissement des Habsbourg, c’étaient des idées propres à exalter des politiques. Comment la masse eût-elle renoncé joyeusement à ses commodités pour des fins aussi lointaines et qui dépassaient la portée des esprits ? Plus tard les Français ont eu un véritable culte pour la politique de Richelieu, devenue une tradition, un dogme national, respecté même par les révolutionnaires. De son vivant, les contemporains ne se disaient pas tous les jours qu’aucun sacrifice n’était de trop pour abattre la maison d’Autriche. À la vérité, la mort du grand cardinal fut ressentie comme un soulagement.
    Pour la sécurité de la France, il fallait pourtant continuer sa politique et l’on retombait dans les faiblesses et les embarras d’une minorité. Un roi de cinq ans, une régente espagnole, un ministre italien : mauvaises conditions, semblait-il, mais corrigées par une chose importante. Richelieu laissait une doctrine d’État, et, pour la réaliser, une administration, une organisation, une armée aguerrie, des généraux expérimentés. Choisi, formé par Richelieu, Mazarin connaissait ses méthodes et il avait la souplesse qu’il fallait pour les appliquer dans des circonstances nouvelles. Cet étranger, cet Italien, avide d’argent et de profits, si prodigieusement détesté, a pourtant fait pour le compte de la France une politique que la plupart des Français ne comprenaient même pas. Il eut le talent de plaire à Anne d’Autriche, au point qu’on a cru à leur mariage secret. Il lui inspira confiance, et, malgré les cabales, malgré une véritable révolution, elle ne l’abandonna jamais, pas plus que Louis XIII n’avait abandonné son ministre. C’est ainsi que cette régence troublée mena au terme l’œuvre de Richelieu. Sans doute il n’y avait plus qu’à récolter. Encore fallait-il ne pas arrêter en chemin l’entreprise nationale.
    Sur tous les fronts, la guerre continuait, cette guerre qui, pour l’Allemagne, fut de trente ans. En 1643 une victoire éclatante à Rocroy, où la redoutable infanterie espagnole fut battue par Condé, donna aux Français un élan nouveau. L’Empire n’en pouvait plus. L’Espagne faiblissait. Le chef-d’œuvre de Richelieu avait été de retarder l’intervention, de ménager nos forces. La France, avec ses jeunes généraux, donnait à fond au moment où l’adversaire commençait à être las.
    Dès le temps de Richelieu on avait parlé de la paix. L’année d’après Rocroy, des négociations commencèrent. Le lieu choisi pour la conférence était Munster, en Westphalie. Mais la paix n’était pas mûre. Quatre ans se passèrent encore avant qu’elle fût signée, sans que la guerre cessât. On négociait en combattant et Mazarin comprit que, pour obtenir un résultat, il fallait conduire les hostilités avec une nouvelle énergie. Les campagnes de Turenne en Allemagne, une éclatante victoire du Grand Condé à Lens sur les Impériaux unis aux Espagnols décidèrent enfin l’Empereur à traiter. La paix de Westphalie fut signée en octobre 1648.
    Cette paix, qui devait rester pendant un siècle et demi la charte de l’Europe, couronnait la politique de Richelieu. C’était le triomphe de la méthode qui consistait à achever la France en lui assurant la possession paisible de ses nouvelles acquisitions. Il ne suffisait pas d’ajouter l’Alsace au royaume. Il fallait encore que cette province ne fût pas reprise au premier jour par les Allemands. Il ne suffisait pas d’humilier la maison d’Autriche, de lui imposer une paix avantageuse pour nous. Il fallait encore, pour que cette paix fût respectée, pour que le résultat d’une lutte longue de plus d’un siècle ne fût pas remis en question, que l’Empire fût affaibli d’une façon durable et qu’il ne pût se réunir « en un seul corps ». Au traité de

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