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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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plus
florissante ; mais ni le bon sens ni les faits connus ne peuvent autoriser à
croire que les Saxons firent un désert du pays qu’ils avaient conquis. Après
avoir assuré leur domination et satisfait leur vengeance, l’intérêt personnel
engagea sans doute les Barbares à conserver les dociles paysans des campagnes
aussi bien que leurs troupeaux. Dans toutes les révolutions, les animaux
deviennent la propriété utile de leurs nouveaux maîtres, et les besoins mutuels
ratifient tacitement le pacte salutaire  des travaux et de la subsistance. 
Wilfrid, l’apôtre de Sussex [4425] ,
reçut, en présent du prince qu’il convertit la péninsule de Selsey, près
Chichester, avec la propriété de quatre-vingt-sept familles qui l’habitaient.
Ce saint personnage les affranchit sur-le-champ de toute servitude spirituelle
et temporelle, et deux cent cinquante esclaves des deux sexes reçurent le
baptême des mains de leur respectable maître. Le royaume de Sussex, qui
s’étendait depuis la mer jusqu’à la Tamise, contenait sept mille familles : on
en comptait douze cents dans l’île de Wight ; et en suivant ce calcul
approximatif, il paraîtra probable que l’Angleterre était cultivée par un
million de serfs, ou vilains , attachés aux terres de leurs maîtres
absolus. Les Barbares indigents se vendaient souvent, eux et leurs enfants,
même à des étrangers, en servitude perpétuelle [4426] . Cependant les
exemptions spéciales accordées aux esclaves nationaux [4427] , annoncent qu’ils
étaient moins nombreux que les étrangers et les captifs qui avaient perdu la
liberté ou changé de maître par les hasards de la guerre. Lorsque le temps et
la religion eurent adouci la férocité des Anglo-Saxons, les lois encouragèrent
la pratique de la manumission ; et leurs sujets, d’extraction galloise ou
cambrienne possédèrent, avec le titre honorable d’hommes libres d’un rang
inférieur, des terres et tous les privilèges de la société civile [4428] . Cette
politique humaine était propre à leur assurer la fidélité du peuple fier et
indocile qui habitait les confins du pays de Galles et de Cornouailles, et
qu’ils avaient récemment soumis. Le sage Ina, législateur de Wessex, réunit les
deux nations par les liens de l’alliance domestique, et l’on remarque quatre seigneurs
bretons du Sommersetshire placés honorablement à la cour du monarque saxon [4429] .
    Les Bretons indépendants retombèrent, à ce qu’il paraît,
dans l’état de barbarie primitive dont ils étaient imparfaitement sortis.
Séparés par leurs ennemis du reste du genre humain, ils devinrent bientôt, pour
le monde catholique, un objet de scandale et d’horreur [4430] . Les
montagnards du pays de Galles professaient encore le christianisme ; mais ces
schismatiques indociles rejetaient avec  opiniâtreté les mandats du pontife romain
relativement à la forme de la tonsure de leurs clercs, et au jour de la célébration de la fête de Pâques. L’usage de la langue latine fut aboli,
et les Bretons furent privés de l’usage des arts et des sciences que l’Italie
avait communiqués aux Saxons qu’elle avait convertis : le pays de Galles et
l’Armorique conservèrent et propagèrent la langue celtique, ancien idiome de
l’Occident ; et les bardes, anciens compagnons des druides, ont encore été
protégés, dans le seizième siècle, par les lois d’Élisabeth. Leur chef,
officier respectable des cours de Pengwern, d’Aberfraw ou de Caermathaen,
accompagnait à la guerre les domestiques du roi ; les droits des Bretons à la
monarchié, qu’il chantait à la tête de l’armée, excitaient le courage des
soldats et justifiaient leurs rapines ; et le chanteur avait droit, pour
récompense, à la plus belle des génisses qui se trouvaient dans le butin. Les
bardes inférieurs, dont les uns enseignaient, les autres apprenaient la musique
vocale et instrumentale, visitaient successivement dans leur arrondissement les
palais des  rois, les maisons des nobles et celles des plébéiens, et
fatiguaient de leurs demandes importunes des peuples déjà épuisés par les
besoins du clergé. Les bardes subissaient des examens ; on fixait leur rang à
raison de leur mérite, et l’opinion générale d’une inspiration surnaturelle
excitait le génie de ces poètes, et la confiance de leurs auditeurs [4431] . L’extrémité
septentrionale de la Bretagne et de la Gaule, dernier refuge de la liberté
celtique, était

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