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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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mouvement de la pierre qui tombe n’a rien d’un mouvement vital ; car il ne commence point et ne finit pas de lui-même ; mais il est produit par suite d’une circonstance extérieure, par la suppression de l’obstacle qui l’empêchait de gagner son lieu propre, et il s’arrête lorsque ce lieu est atteint [313]. Au contraire, le mouvement local de l’animal a sa source en une représentation et un désir ; il se conforme à ce désir autant que le permettent les conditions mécaniques du mouvement et la constitution organique de l’animal ; il y a donc à la fois chez lui, selon son désir, pouvoir d’initiative et pouvoir d’arrêt, tandis que l’élément ne pouvait ni se mouvoir ni s’arrêter de lui-même. Enfin le mouvement des cieux n’est pas comparable à celui d’un animal.
    Aristote, dans un ouvrage considéré sans doute à tort comme apocryphe [314], critique l’analogie que l’on s’efforçait alors d’établir entre eux ; on avait remarqué que ces mouvements supposaient des parties immobiles dans l’intérieur de l’animal, les points fixes (articulations) autour desquels peuvent tourner les segments du squelette, et de plus un plan fixe extérieur à l’animal, la terre, sur lequel il trouve un point d’appui : de même, dans l’univers, les pôles constitueraient les points fixes p.220 autour desquels tourne le ciel, et la terre sur laquelle il roule. Cette comparaison, poussée plus loin que ne le fait Aristote, amènerait à conclure que le moteur du ciel est de la même nature que celui d’un être vivant, c’est-à-dire de la nature d’une âme. Mais Aristote évite cette conclusion en montrant la faiblesse de l’analogie : en effet ; dans une sphère qui tourne, il est faux qu’il y ait une partie qui soit immobile ; les pôles sont de simples points mathématiques sans réalité physique ; de plus, si l’on assimile le rapport de la terre au ciel avec celui de la terre aux animaux, il faudra dire que la terre est en dehors de l’univers. Contrairement à Platon, Aristote ne voit donc dans le ciel rien qui ressemble à un organisme vivant.
    Ainsi moteur naturel de l’élément, moteur de l’animal et moteur des cieux sont de nature différente. Ils ont pourtant un attribut commun, c’est d’être eux-mêmes immobiles ; Aristote s’oppose avec force à l’idée platonicienne que le principe du mouvement puisse être encore un mouvement. D’une manière absolument générale, un moteur, en tant que tel, ne peut être mû ; car le moteur est ce qui est en acte ce que le mobile est en puissance ; par exemple c’est le chaud en tant qu’il échauffe ; c’est le savant en tant qu’il instruit ; si le moteur était mû comme le veut Platon, il faudrait qu’il fût à la fois et sous le même rapport savant et non savant, chaud et non chaud. Si donc il y a un être qui se meut lui-même, il n’est pas simple, et il se dédouble nécessairement en un moteur immobile et une partie mue par ce moteur ( Physique, VIII, 5).
    Chacune des classes de mouvements (naturel, vital et céleste) nous renvoie à une classe distincte de moteurs immobiles : nature, âme représentative, moteur du ciel. Il y a donc un nombre très grand de pareils moteurs, autant qu’il y a de mouvements distincts ou au moins de séries distinctes de mouvements enchaînés. La notion de moteur immobile coïncide au fond complètement avec la notion de forme ou d’être en acte ; le moteur, c’est l’être en acte en tant qu’il a rencontré un mobile p.221 capable de passer de la puissance à l’acte. Le type de l’action motrice, c’est celle du médecin qui guérit son malade, du statuaire qui sculpte, c’est-à-dire une action qui ordonne les mouvements de telle façon que la matière devienne susceptible de recevoir une forme existant actuellement dans le moteur ; l’action est ordonnatrice en même temps que motrice. Et c’est pourquoi le mouvement cesse dès que le moteur n’agit plus, comme une armée est sans ordre dès qu’elle n’est plus commandée ; il n’est point quelque chose qui pourrait être communiqué au mobile et persister de lui-même ; le mobile comme tel n’a jamais de lui-même que la possibilité de se mouvoir.
    Il reste à voir quelles sont, parmi ces moteurs immobiles, les particularités du moteur des cieux. Comme le mouvement du ciel est continu et uniforme, il lui faut un moteur éternellement en acte et dont l’action soit

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