Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814
même loi.
Au commencement de la guerre en 1792, les généraux étaient constitutionnels, et les ministres girondins ; Rochambeau, La Fayette, Luckner, s’entendaient peu avec Dumouriez, Servan, Clavière et Roland. Il y avait d’ailleurs peu d’élan dans l’armée, on fut battu. Après le 10 août, les généraux girondins Dumouriez, Custines, Kellerman, Dillon, remplacèrent les généraux constitutionnels ; il y eut unité de vue, de confiance et d’action entre l’armée et le gouvernement. La catastrophe du 10 août augmenta l’énergie en imposant la nécessité de vaincre, et il en résulta le plan de campagne de l’Argonne, la victoire de Valmy, de Jemmapes, et l’invasion de la Belgique. La lutte de la Montagne et de la Gironde, de Dumouriez avec les Jacobins, ramena de nouveau le désaccord entre l’armée et le gouvernement, détruisit la confiance des troupes, qui éprouvèrent des revers subits et nombreux. Il y eut défection de la part de Dumouriez comme il y avait eu retraite de la part de La Fayette. Après le 31 mai, qui fut le 10 août contre la Gironde, après que le comité de salut public se fut assis, et qu’il eut remplacé les généraux girondins, Dumouriez, Custines, Houchard, Dillon, par les généraux montagnards, Jourdan, Hoche, Pichegru, Moreau : après qu’il eut rétabli le mouvement révolutionnaire par les mesures hardies dont nous avons rendu compte, on vit la campagne de l’Argonne et de la Belgique, renouvelée dans celle de 1794, et le génie de Carnot égaler celui de Dumouriez, s’il ne le surpassa point.
Pendant la durée de cette guerre, le comité de salut public se livra aux plus terribles exécutions. Les armées se bornent à tuer sur le champ de bataille : il n’en est pas de même des partis qui, dans les situations violentes craignant de voir renaître le combat après la victoire, se précautionnent contre de nouvelles tentatives par des rigueurs inexorables. L’usage de tous les gouvernements étant d’ériger leur conservation en droit, ceux qui les attaquent, sont pour eux des ennemis tant qu’ils combattent, des conspirateurs dès qu’ils sont vaincus, et ils les tuent ainsi au moyen de la guerre et au moyen de la loi. Tous ces motifs dirigèrent à la fois la politique du comité de salut public, politique de vengeance, de terreur et de conservation pour lui-même. Voici les maximes d’après lesquelles il se conduisit à l’égard des villes insurgées. « Le nom de Lyon, dit Barrère, ne doit plus exister. Vous l’appellerez Ville-affranchie, et sur les ruines de cette infâme cité, il sera élevé un monument qui attestera le crime et la punition des ennemis de la liberté. Ce seul mot dira tout : Lyon fît la guerre à la liberté, Lyon n’est plus. » Pour réaliser cet effrayant anathème, le comité envoya dans cette malheureuse ville, Collot-d’Herbois, Fouché et Couthon, qui mitraillèrent ses habitants et démolirent ses édifices. Les insurgés de Toulon éprouvèrent, de la part des représentants Barras et Fréron, un sort à peu près semblable. À Caen, à Marseille, à Bordeaux, les exécutions furent moins générales et moins violentes, parce qu’on les proportionna à la gravité de l’insurrection, qui fut intérieure et ne fut pas étrangère.
Au centre, le gouvernement dictatorial frappa, dans ce qu’ils avaient de plus élevé, tous les partis avec lesquels il était en guerre. La condamnation de la reine Marie-Antoinette fut dirigée contre l’Europe ; celle des vingt-deux, le fut contre les Girondins ; celle du sage Bailly, contre les anciens constitutionnels ; enfin celle du duc d’Orléans, contre certains membres de la Montagne, qui passaient pour avoir tramé son élévation. La veuve infortunée de Louis XVI fut envoyée la première à la mort par le sanglant tribunal révolutionnaire. Les proscrits du 2 juin la suivirent de près ; elle périt le 16 octobre, et les députés girondins périrent le 31. Ils étaient au nombre de vingt-et-un, Brissot, Vergniaud, Gensonné, Fonfrède, Ducos, Valazé, Lasource, Silléry, Gardien, Carra, Duprat, Beauvais, Duchâtel, Mainvielle, Lacaze, Boileau, Lehardy, Antiboul, et Vigée. Soixante-treize de leurs collègues, qui avaient protesté contre leur arrestation, furent emprisonnés comme eux, mais on n’osa point leur faire partager le même supplice. Pendant les débats, ces illustres accusés montrèrent le courage le plus
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