Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814
faut que le glaive des lois se promène partout avec rapidité, et que votre bras soit présent partout ! » Ainsi fut créée cette puissance terrible, qui dévora d’abord les ennemis de la Montagne, qui dévora ensuite la Montagne et la commune, et qui ne finit qu’en se dévorant elle-même. Le comité disposait de tout sous le nom de la convention, qui lui servait d’instrument. C’était lui qui nommait et destituait les généraux, les ministres, les commissaires représentants, les juges et les jurés ; c’était lui qui frappait les factions ; c’était lui qui avait l’initiative de toutes les mesures. Par ses commissaires, les armées et les généraux étaient sous sa dépendance, et il dirigeait d’une manière souveraine les départements ; par la loi des suspects, il disposait de toutes les personnes ; par le tribunal révolutionnaire, de toutes les existences ; par les réquisitions et le maximum, de toutes les fortunes ; par la convention effrayée, des décrets d’accusation contre ses propres membres.
Enfin, sa dictature avait pour appui la multitude, qui délibérait dans les clubs, gouvernait dans les comités révolutionnaires, dont on payait la coopération par un salaire journalier, et qu’on nourrissait avec le maximum ; elle tenait à ce régime, qui exaltait ses passions, qui lui exagérait son importance, qui lui accordait la première place, et qui paraissait tout faire pour elle. Les novateurs, séparés par la guerre et par leurs lois, de tous les états et de toutes les formes de gouvernement, voulurent s’en séparer encore davantage. Ils établirent, pour une révolution inouïe, une ère toute nouvelle ; ils changèrent les divisions de l’année, les noms des mois et des jours ; ils remplacèrent le calendrier chrétien par le calendrier républicain, la semaine par la décade, et firent le jour du repos non plus au dimanche, mais au dixième jour. L’ère nouvelle data du 22 septembre 1792, époque de la fondation de la république. Il y eut douze mois égaux de trente jours, qui commencèrent au 22 septembre, dans l’ordre suivant, vendémiaire, brumaire, frimaire, pour l’automne ; nivose, pluviose, ventose, pour l’hiver ; germinal, floréal , prairial, pour le printemps ; messidor, thermidor, fructidor , pour l’été. Chaque mois eut trois décades ; chaque décade dix jours, et chaque jour reçut son nom de sa place dans la décade ; ils s’appelèrent primidi, duodi, tridi, quartidi, quintidi, sextidi, septidi, octi di, nonidi, décadi, Cinq jours complémentaires furent rejetés à la fin de l’année, pour la présenter entière ; ils reçurent le nom de Sans-Culotides, et furent consacrés, le premier à la fête du Génie, le second à celle du Travail, le troisième à celle des Actions, le quatrième à celle des Récompenses, le cinquième à celle de l’Opinion. La constitution, de 1793 conduisait au calendrier républicain, et le calendrier républicain à l’abolition du culte chrétien. Nous verrons bientôt la commune et le comité de salut public proposer chacun le leur, la commune le culte de la raison, le comité de salut public le culte de l’Être suprême. Mais il faut auparavant rendre compte d’une nouvelle lutte entre les auteurs eux-mêmes de la catastrophe du 31 mai.
La commune et la Montagne avaient opéré cette révolution contre la Gironde, et le comité seul en avait profité. Pendant les cinq mois dont il vient d’être rendu compte, de juin à novembre, le comité ayant pris toutes les mesures de défense, était naturellement devenu la première puissance de la république. Le combat se trouvant en quelque sorte fini, la commune aspira à dominer le comité, et la Montagne à ne pas l’être par lui. La faction municipale était le dernier terme de la révolution. Opposée de but au comité de salut public, elle voulait, au lieu de la dictature conventionnelle, la plus extrême démocratie locale, et au lieu de culte, la consécration du matérialisme. L’anarchie politique et l’athéisme religieux, tels étaient les symboles de ce parti, et les moyens par lesquels il comptait établir sa propre domination. Une révolution est l’effet des divers systèmes qui ont agité le siècle dont elle est originaire. Ainsi, pendant la durée de la crise en France, le catholicisme ultramontain fut représenté par le clergé réfractaire ; le jansénisme, par le clergé
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