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Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814

Titel: Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François-Auguste-Marie-Alexis Mignet
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démocrates chrétiens   ; dans une époque philosophique, des démocrates politiques.
    Robespierre et Saint-Just avaient donné le plan de cette démocratie, dont ils professaient les principes dans tous leurs discours   ; ils voulaient changer les mœurs, l’esprit et les habitudes de la France   ; ils voulaient en faire une république à la manière des anciens. La domination du peuple, des magistrats sans orgueil, des citoyens sans vices, la fraternité des rapports, le culte de la vertu, la simplicité des manières, l’austérité des caractères   ; voilà ce qu’ils prétendaient établir. On trouvera les mots sacramentels de cette secte dans tous les discours des rapporteurs du comité, et surtout dans ceux de Saint-Just et de Robespierre. Liberté et égalité pour le gouvernement de la république   ; indivisibilité pour sa forme   ; salut public pour sa défense et sa conservation   ; vertu pour son principe   ; Être suprême pour son culte   : quant aux citoyens, fraternité dans leurs relations mutuelles   ; probité pour leur conduite   ; bon sens pour leur esprit   ; modestie pour leurs actions publiques, qu’ils devaient rapporter au bien de l’état, et non à eux-mêmes   ; tel était le symbole de cette démocratie. Le fanatisme ne peut pas aller plus loin. Les auteurs de ce système n’examinaient pas s’il était praticable   ; ils le croyaient juste et naturel, et, ayant la force en main, ils voulaient l’établir violemment. Il n’y eut pas un de ces mots qui ne servît à la condamnation d’un parti ou de quelques hommes. Les royalistes et les aristocrates furent poursuivis au nom de la liberté et de l’égalité   ; les Girondins, au nom de l’indivisibilité   ; Philipeaux, Camille Desmoulins et les modérés, au nom du salut public   ; Chaumette, Anacharsis Clootz, Gobel, Hébert, tout le parti anarchiste et athée, au nom de la vertu et de l’Être suprême   ; Chabot, Bazire, Fabre-d’Églantine, au nom de la probité   ; Danton, au nom de la vertu et de la modestie. Aux yeux des fanatiques, ces crimes moraux contribuèrent à leur perte autant que les conspirations qu’on leur reprochait.
    Robespierre était le patron de cette secte, qui avait, dans le comité, un zélateur plus fanatique et plus désintéressé que lui   : c’était Saint-Just qu’on appelait l’ Apocalyptique. Il avait un visage régulier, à grands traits, d’une expression forte et mélancolique   ; un œil pénétrant et fixe   ; des cheveux noirs, plats et longs. Ses manières étaient froides, quoique son âme fût ardente. Simple dans ses habitudes, austère, sentencieux   ; il marchait sans hésitation à l’accomplissement de son système. À peine âgé de vingt-cinq ans, il se montrait le plus hardi des décemvirs, parce qu’il était le plus convaincu d’entre eux. Passionné pour la république, il était infatigable dans les comités, intrépide dans ses missions aux armées, où il donnait l’exemple du courage, partageant les marches et les périls des soldats. Sa prédilection pour la multitude ne le portait pas à courtiser ses penchants, et, loin de prendre son costume et son langage comme Hébert, il voulait lui donner de l’aisance, du sérieux et de la dignité. Mais sa politique le rendait plus redoutable encore que ses croyances populaires. Il avait beaucoup d’audace, de sang-froid, d’à-propos et de fermeté. Peu capable de pitié, il rédigeait ses mesures de salut public en formules, et mettait de suite les formules à exécution. La victoire, la proscription, la dictature lui paraissaient-elles nécessaires, il les demandait aussitôt. À la différence de Robespierre, il était un véritable homme d’action. Celui-ci, comprenant tout le parti qu’il pourrait tirer de lui, se l’était attaché de bonne heure dans la convention   ; Saint-Just, de son côté, avait été porté vers Robespierre par sa réputation d’incorruptibilité, par sa vie austère et par la conformité de ses idées avec les siennes.
    On conçoit combien devait être terrible leur association, à cause de la popularité, des passions envieuses et dominatrices de l’un, du caractère inflexible et des vues systématiques de l’autre. Couthon s’était joint à eux   ; il était personnellement dévoué à Robespierre. Quoiqu’il eût un visage doux et le corps à moitié paralysé, il était d’un fanatisme impitoyable. Ils formèrent dans le comité

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