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Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814

Titel: Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François-Auguste-Marie-Alexis Mignet
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Saint-Just dénonce les comités   ; il est interrompu par Talien   : Billaud-Varennes attaque violemment Robespierre   : déchaînement général de la convention contre les triumvirs   ; ils sont mis en arrestation. – La commune s’insurge, et délivre les prisonniers. – Danger et courage de la convention   ; elle met les insurgés hors la loi. – Les sections se déclarent pour elle. – Défaite et supplice de Robespierre et des insurgés.
     
    Pendant les quatre mois qui suivirent la chute du parti Danton, le pouvoir des comités s’exerça sans opposition et sans retenue. La mort devint le seul moyen de gouvernement, et la république fut livrée à des exécutions journalières et systématiques. C’est alors que furent inventées les conspirations des prisons, encombrées avec la loi des suspects, et qu’on vida avec celle du 22 prairial, qui pourrait être appelée la loi des condamnés   : c’est alors que les envoyés du comité de salut public remplacèrent tout-à-fait, dans les départements, ceux de la Montagne, et qu’on vit, dans l’ouest, Carrier, le protégé de Billaud   ; dans le midi, Maignet, le protégé de Couthon   ; dans le nord, Joseph Lebon, le protégé de Robespierre. L’extermination en masse contre les ennemis de la dictature démocratique, qui avait déjà été pratiquée à Lyon et à Toulon par des mitraillades, devint plus horrible encore par les noyades de Nantes, par les échafauds d’Arras, de Paris et d’Orange.
    Puisse cet exemple apprendre une vérité, qui, pour le bien des hommes, a besoin de devenir commune, c’est qu’en révolution tout dépend d’un premier refus et d’une première lutte   ! Pour qu’une innovation soit pacifique, il faut qu’elle ne soit pas contestée. Sinon, la guerre se déclare, et la révolution s’étend, parce que le peuple entier s’ébranle pour la défendre. Lorsque la société est ainsi remuée dans ses fondements, ce sont les hommes les plus audacieux qui triomphent, et, au lieu de réformateurs sages et modérés, on n’a plus que des réformateurs extrêmes et inflexibles. Nés de la lutte, ils veulent se soutenir par elle   : d’une main, ils combattent pour défendre leur domination   ; de l’autre, ils fondent leur système pour la consolider   ; ils tuent au nom de leur salut, ils tuent au nom de leurs doctrines   : la vertu, l’humanité, le bien du peuple, tout ce qu’il y a de plus saint sur la terre, ils l’emploient à motiver leurs exécutions, à protéger leur dictature. Jusqu’à ce qu’ils s’usent et qu’ils tombent, tout périt pêle-mêle, et les ennemis et les partisans des réformes   ; la tempête emporte et brise une nation entière contre une révolution. Qu’on cherche ce qu’étaient devenus, en 1794, les hommes de 1789, et on les verra entraînés également dans ce grand naufrage. Dès qu’un parti se fut présenté sur le champ de bataille, il y appela tous les autres, et tous les autres, comme lui, y furent tour-à-tour vaincus et exterminés, et les constitutionnels, et les Girondins, et les Montagnards, et les décemvirs eux-mêmes. À chaque défaite, l’effusion du sang devint plus grande, et le système de tyrannie plus violent. Les décemvirs furent les plus impitoyables, parce qu’ils furent les derniers.
    Le comité de salut public, en butte aux attaques de l’Europe et à la haine de tant de partis vaincus, pensa que le ralentissement de la violence occasionnerait sa perte   ; il voulut à la fois comprimer ses ennemis et s’en défaire. « Il n’y a que les morts qui ne reviennent pas, disait Barrère. – Plus le corps social transpire, ajoutait Collot-d’Herbois, plus il devient sain. » Mais les décemvirs, ne supposant pas leur puissance éphémère, aspiraient à fonder la démocratie et recherchaient dans des institutions une garantie pour le temps où ils renonceraient aux supplices. Ils avaient au plus haut degré le fanatisme de certaines théories sociales, comme les millénaires de la révolution anglaise, auxquels on peut les comparer, avaient celui de certaines idées religieuses. Les uns partaient du peuple, comme les autres partaient de Dieu   ; voulaient l’égalité politique la plus absolue, comme les autres l’égalité évangélique   ; aspiraient au règne de la vertu, comme les autres au règne des saints. En toutes choses la nature humaine va aux dernières limites, et produit, dans une époque religieuse, des

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