Histoire de la Révolution française depuis 1789 jusqu'en 1814
français, et pénétra dans la péninsule par la Catalogne. Moncey l’envahit aussi par la vallée de Bastan, à l’autre ouverture des Pyrénées, et se rendit maître de Saint-Sébastien et de Fontarabie. La coalition était partout vaincue, et quelques-unes des puissances confédérées commençaient à se repentir de leur trop confiante adhésion.
Ce fut sur ces entrefaites que la révolution du 9 thermidor parvint aux armées, Elles étaient entièrement républicaines, et elles craignirent que la chute de Robespierre n’entraînât celle du gouvernement populaire : aussi l’apprirent-elles avec une désapprobation marquée. Mais, comme les armées étaient soumises au pouvoir civil, aucune d’elles ne s’insurgea. Les insurrections de l’armée n’eurent lieu que du 14 juillet au 31 mai, parce qu’étant le refuge des partis vaincus, leurs chefs avaient, à chaque crise, l’avantage de l’ancienneté politique, et combattaient avec toute l’ardeur des factions compromises. Sous le comité de salut public, au contraire, les généraux les plus renommés n’eurent aucune importance politique, et furent soumis à la discipline terrible des partis. La convention n’eut pas de peine à maintenir les armées dans l’obéissance.
Peu de temps après, le mouvement d’invasion se prolongea en Hollande et dans la péninsule espagnole. Les Provinces-Unies furent attaquées au milieu de l’hiver, et de plusieurs côtés, par Pichegru, qui appela, les patriotes bataves à la liberté. Le parti opposé au stathoudérat seconda les efforts victorieux de l’armée française, et la révolution se fît en même temps que la conquête à Leyde, à Amsterdam, à La Haye, à Utrecht. Le sthathouder se réfugia en Angleterre ; son autorité fut abolie, et l’assemblée des états-généraux gouverna seule la république batave, qui contracta une union étroite avec la France. Cette importante conquête enleva un pied-à-terre aux Anglais, et força la Prusse, menacée sur le Rhin et par la Hollande, à conclure à Bâle avec la république française, une paix à laquelle ses revers et les affaires de Pologne l’avaient depuis quelque temps disposée. La paix se fit aussi avec l’Espagne alarmée de nos progrès sur son territoire. Figuière et le fort de Roses avaient été pris, et Pérignon s’avançait dans la Catalogne, tandis que Moncey, après s’être rendu maître de Villa-Réal, de Bilbao, de Vittoria, marchait contre les Espagnols retirés sur les frontières de la vieille-Castille. Le cabinet de Madrid demanda la paix. Il reconnût la république française, qui lui restitua ses conquêtes et qui reçut en échange la partie de Saint-Domingue, possédée par l’Espagne. Les deux armées aguerries des Pyrénées passèrent à l’armée des Alpes, qui, par ce moyen, envahit bientôt le Piémont, et déborda en Italie.
Ces pacifications partielles et les revers des troupes coalisées dirigèrent les efforts de l’Angleterre et de l’émigration d’un autre côté. Le moment était revenu de prendre le point d’appui contre-révolutionnaire dans l’intérieur. En 1791, lorsqu’il y avait unanimité en France, les royalistes avaient tout espéré des puissances étrangères ; aujourd’hui les dissidences du dedans, et les défaites de l’Europe, ne leur laissaient d’autre ressource que les conspirations. Les tentatives malheureuses, comme on le sait, ne désespèrent jamais les partis vaincus : il n’y a que la victoire qui lasse et qui épuise, et c’est ce qui, tôt ou tard, ramène la domination de ceux qui attendent.
Les événements de prairial et la défaite du parti jacobin avaient décidé le mouvement contre-révolutionnaire. À cette époque, la réaction qui avait été conduite par les républicains modérés, devint généralement royaliste. Les partisans de la monarchie étaient encore aussi divisés qu’ils l’avaient été depuis l’ouverture des états-généraux jusqu’au 10 août. Dans l’intérieur, les anciens constitutionnels qui avaient leur siège dans les sections, et qui se composaient de la classe moyenne riche, n’entendaient pas la monarchie comme les royalistes absolus. Ils éprouvaient toujours la rivalité et l’éloignement d’intérêt naturels à des bourgeois contre des privilégiés. Les royalistes absolus eux-mêmes n’étaient pas d’accord : le parti qui s’était battu dans l’intérieur, sympathisait peu avec celui
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