Histoire des colonisations: Des conquetes aux independances, XIIIe-XXe siecle
l’exportation en France et en Angleterre. Ce trafic du sucre et des épices, assuré par la flotte la plus nombreuse de l’époque, est assuré par ces deux compagnies géantes qui font la fortune du pays, la VOC aux Indes orientales, plutôt préoccupée de commerce et volontiers pacifiste, et la West India Company , plus agressive, plus belliqueuse qui fonde New Amsterdam, les colonies hollandaises du Brésil et Curaçao (1634).
Le problème, pour les Anglais surtout, était que les Hollandais les ruinaient chez eux, car ils pouvaient vendre les produits de la Baltique (bois de construction pour les navires, blé, lin) à meilleur prix que les marchands anglais eux-mêmes. De plus, les Hollandais étaient omniprésents — océan Atlantique, Méditerranée, océan Indien, mer Baltique —, barrant la route aux initiatives des marchands et navigateurs anglais, en pleine expansion eux aussi.
Il fallait les chasser du panorama.
Cette détermination prend corps lorsque la guerre civile s’achève en Angleterre et qu’une sorte d’unité nationale se reconstitue qui a pour objectif de mettre fin à l’hégémonie économique et maritime des Hollandais. Il en résulte trois guerres anglo-hollandaises, en 1652-1654, puis en 1664-1667, puis en 1672-1674 — la France prenant alors la relève de l’Angleterre — et, pour les mêmes motifs, de 1674 à 1678.
Le coup d’envoi des hostilités avait été la promulgation, par Cromwell, des Actes de Navigation (1651) qui stipulaient que les produits entrant en Angleterre devaient être transportés soit sur des navires anglais, soit sur des navires du pays d’origine. Il y avait là une « provocation » à l’égard des Hollandais, courtiers des mers, et qui jouaient les transporteurs grâce à leur fret peu élevé. Les tarifs, que Colbert promulguait quelques années plus tard, avaient, au reste, la même fonction, en France.
Les traités qui suivirent ces guerres se traduisirent, à Breda, par l’abandon par les Hollandais de New Amsterdam, devenue New York — mais, en échange, ils obtenaient le Surinam, ce qui constituait néanmoins un coup d’arrêt à la puissance hollandaise. Certes, celle-ci contrôlait toujours des « Loges » à Moka, Bassorah et en Inde sur la côte de Coromandel ; au Bengale, elle comptait une vingtaine de comptoirs ; à Bangkok, Malacca, elle était toujours présente. Mais, au XVIII e siècle, les dividendes de la Compagnie des Indes orientales tombèrent de 40 % à 25 %, à moins encore ; et, en Atlantique, la perte du Nord-Brésil au bénéfice du Portugal qui l’a récupéré ne fut pas compensée par le maintien au Surinam.
La puissance du Capital avait été vaincue par la force des armes. Malgré ses dons économiques, malgré son dynamisme, la Hollande avait dû baisser pavillon, ses flottes n’ayant pas su combattre aussi bien que celles des Anglais. Plus exactement, les bourgeois hollandais ne lui assurèrent plus les soins nécessaires depuis qu’elles n’étaient plus aussi « rentables » que des capitaux placés ailleurs ou autrement.
La déchéance hollandaise fut irréversible.
Frappée par l’Angleterre lors de la quatrième guerre de 1780 à 1784, la Hollande perdit encore Ceylan et Le Cap à la suite des guerres de la Révolution et de l’Empire ; et toujours à l’avantage de la Grande-Bretagne, au point qu’on pouvait dire, dès le XVIII e siècle, qu’elle était devenue « une chaloupe accrochée à une des flottes de Sa Majesté Britannique ».
Outre-mer, l’Angleterre prenait la relève des Provinces-Unies, mais accompagnée de la France : la relève était ainsi conflictuelle, et ce, dès la paix d’Utrecht (1713). De plus on se battait désormais sur le territoire même des colonies, pas seulement sur mer, ce qui, certes, avait commencé au Canada, mais s’étendit désormais à l’Inde, et plus tard à l’Afrique.
V ISÉES SUR LES COLONIES ESPAGNOLES
Le commerce oriental était une belle affaire, mais l’or et l’argent d’Amérique constituaient une tentation à laquelle les corsaires et les puissances montantes — l’Angleterre et la France — pouvaient difficilement résister. Au XVI e siècle, Drake avait donné l’exemple, et, depuis le désastre del’Invincible Armada, Versailles ou Westminster — et les armateurs ou hommes d’affaires tout autant — se demandaient comment faire pour mettre la main sur le magot. Le capter au
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