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Histoire du Consulat et de l'Empire

Histoire du Consulat et de l'Empire

Titel: Histoire du Consulat et de l'Empire Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jacques-Olivier Boudon
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lors, elle avait voyagé en Autriche, en Italie et en Allemagne, sans jamais renoncer à revenir à Paris. Lorsqu'elle tente de s'en approcher en 1806, s'installant dans la région d'Auxerre, puis à Meulan, elle s'attire de nouveau les foudres du prince : « Ne laissez pas approcher de Paris cette coquine de Mme de Staël, ordonne-t-il à Fouché ; je sais qu'elle n'est pas éloignée 16. » Or, l'exil intérieur est un enfermement dont Napoléon connaît les effets. Germaine de Staël le vit comme une torture : « Paris est un séjour si agréable et si nécessaire à ceux qui y ont vécu que c'était un nouveau moyen de terreur dans la main de Bonaparte que la puissance d'en éloigner 17. » Pourtant, elle continue d'écrire et de publier. Elle fait paraître Corinne en 1807. Ce roman dont l'intrigue est située dans l'Italie de 1795 déplut à Napoléon pour les idées libérales qu'il contenait. Cependant, pour le moment, le régime laisse Mme de Staël à sa solitude. Ce n'est qu'en 1810, avec la publication du livre De l'Allemagne, que les relations entre Napoléon et Germaine de Staël s'enveniment. Il est vrai que loin d'être isolée, Mme de Staël est parvenue à rassembler autour de sa personne une pléiade de savants et d'hommes de lettres qui forment ce que l'on appellera le « groupe de Coppet ».
    Sans être ouverte, l'opposition au régime est un d,es points communs à ces intellectuels venus de toute l'Europe. A côté de Benjamin Constant dont la fidélité s'émousse, de Camille Jordan, de Gerando, de Mathieu et Adrien de Montmorency, on voit apparaître à partir de 1804 Auguste Schlegel dont l'aide fut précieuse 256
     

    L'ENCADREMENT DE LA VIE POLITIQUE
    pour la rédaction de De l'Allemagne, puis, en 1805, Prosper de Barante. Chamisso et Friedrich Schlegel s'y côtoient. Mme Récamier est elle-même attirée par l'écho de Coppet. La comtesse de Boigne s'y rend à plusieurs reprises : « Pendant l'été de 1808, écritelle dans ses Mémoires, Coppet avait été très brillant : le prince Auguste de Prusse y avait fait un long séjour. Il était fort amoureux de Mme Récamier. Plusieurs étrangers et encore plus de Français s'étaient groupés autour de la brillante et spirituelle opposition de Mme de Staël. Cette société, en se séparant, avait été répandre dans toute l'Europe les mots et les pensées dont elle stigmatisait le gouvernement impérial 18. » Cette grande assemblée fut la dernière, Napoléon durcissant dès 1809 le régime imposé à l'hôte de Coppet.
    D'autres écrivains, d'abord favorables au régime, sont également contraints au silence, à l'image de Benjamin Constant qui ne publie quasiment plus rien entre 1803 et 1 814, ou encore de Marie-Joseph Chénier que Napoléon met en demeure de se taire : « Si M. Chénier se permet le moindre propos, faites-lui connaître que je donnerai l'ordre qu'il soit envoyé aux Iles Sainte-Marguerite. Le temps de la plaisanterie est passé. Qu'il reste tranquille ; c'est le seul droit qu'il ait 19. » La menace suffit souvent à annihiler toute tentative de rébellion. Dès lors il n'est pas nécessaire d'emprisonner les écrivains.
    Seuls, finalement, Sade et le poète Théodore Desorgues ont connu l'enfermement, mais dans leur cas, les raisons ne sont pas uniquement d'ordre politique.
    Ces avertissements adressés aux écrivains visent aussi les immortels, membres de l'Académie française, mis en garde contre toute tentation de parler des événements contemporains. « Qu'a de commun l'Académie française avec la politique ? se demande Napoléon. Pas plus que les règles de grammaire n'en ont avec l'art de la guerre 20. )} Le message est clair, même si l'Empereur a peu à craindre d'une assemblée reformée en 1803 et qui ne compte guère d'opposants au régime. L'entrée de Destutt de Tracy en 1808, puis l'élection mouvementée de Chateaubriand en 1811 ne sont pas de nature à modifier la composition de l'Académie française où l'on entre surtout après avoir rendu des services au régime, à l'exemple de Esménard ou Lacretelle qui s'étaient distingués en mettant leur plume au service de la censure impériale.

5. LA CENSURE DE L'INFORMATION
    Avec la littérature, c'est finalement la presse qui est la plus touchée par l'effort du régime pour contrôler les esprits. Napoléon s'en méfiait depuis son avènement. Il avait déjà réduit son influence en 1800 en limitant le nombre de journaux autorisés à Paris, mais

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