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Histoire Romaine

Histoire Romaine

Titel: Histoire Romaine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Theodor Mommsen
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que leur plastique est trop nue : le Romain les repousse
bien davantage encore, parce que l’allégorie, même sous le plus léger de ses
voiles, vient obscurcir la sainteté sévère de ses idées pieuses. Il n’a pas
conservé le plus lointain souvenir des mythes primitifs qui ont couru le monde ;
il ne sait rien, par exemple, du Père commun des hommes survivant à un immense
déluge, alors que la tradition s’en est conservée chez les Indiens, les Grecs, et
même chez les Sémites. Les dieux de Rome ne se marient pas : ils n’engendrent
point d’enfants comme les dieux grecs ; ils ne circulent pas invisibles
parmi les mortels ; ils n’ont pas besoin de boire le nectar. Ces notions
immatérielles sembleront bien effacées à des critiques superficiels : et
pourtant tout démontre quelle impression profonde et vivace elles avaient faite
sur les âmes. Si l’histoire ne disait pas combien elles ont exercé plus de
puissance que n’en eurent jamais en Grèce les figures divines créées à l’image
des hommes, le nom tout romain de la Religion ( Religio ), expression
du lien moral par lequel elle nous attache, nous apporterait aussitôt une idée
et une appellation qui n’ont rien de commun avec la langue et la pensée des
Hellènes. Comme l’Inde et l’Iran avaient puisé aux mêmes sources, l’une, les formes
pleines et splendides de son épopée religieuse ; l’autre les abstractions
du Zend-Avestâ, ainsi les mêmes notions religieuses ont été le point de départ
des mythologies grecque et romaine. Mais, tandis qu’en Grèce on s’attache
davantage à la personne des dieux, à Rome l’idée de la Divinité prédomine. En
Grèce, l’imagination se meut dans la liberté : à Rome, elle s’arrête
devant, un type obligé.
    Les arts sont l’expression de la vie d’un peuple ; non
pas seulement dans leurs travaux sérieux, mais aussi quand ils la reflètent
dans les jeux et la plaisanterie. En tout temps et surtout aux époques où, pour
la première fois, l’homme est entré dans l’entière et naïve possession de son
existence, ces jeux, loin d’exclure la pensée sérieuse, l’enveloppent et la
vêtissent. Les éléments primitifs de l’art ont été les mêmes en Grèce et en
Italie ; la danse grave des armes, et les sauts déréglés ( triumpus , θρίαμβος, όι-θυραμβος ) ;
les mascarades des hommes au ventre plein ( σάτυροι satura ), qui terminent la fête, affublés de peaux de brebis ou de bouc, et
se livrant à des jeux de toutes sortes ; le joueur de flûte accompagnant
ou réglant la danse solennelle ou folle des accents mesurés de son instrument, tous
ces détails sont communs aux Italiques et aux Hellènes.
    Nulle part autant qu’ici n’apparaît en plein jour l’étroite
affinité des Hellènes et des Italiotes ; et nulle part aussi les deux
peuples ne se sont jetés dans des directions plus opposées. Chez les Latins, l’éducation
des jeunes gens se fait à huis clos, dans l’étroite enceinte de la maison
paternelle : en Grèce, on poursuit avant tout les perfectionnements
multiples et harmonieux de l’esprit et du corps ; l’on invente la gymnastique
et la pœdeutique, ces deux sciences nationales que tous pratiquent à l’envi, et
qu’ils estiment comme les institutions les meilleures. Le Latium est stérile en
productions artistiques : les peuples sans culture ont fait autant de
progrès que lui : en Grèce, une rapide et incroyable fécondité fait
jaillir les mythes et la plastique sacrée des notions religieuses populaires ;
puis bientôt surgit tout ce monde merveilleux de la poésie et de la statuaire
que nous n’avons plus revu depuis. Dans le Latium, les vérités, puissantes et
reconnues de la vie publique et privée sont la prudence, la richesse, la force :
il a été donné aux Grecs d’obéir par-dessus tout à la bienheureuse suprématie
du beau. Sensuel et idéal tout ensemble, leur culte enthousiaste s’attache au
brillant et toujours jeune Éros ; et quand leur courage faiblit dans les
combats, la voix d’un chantre divin les l’anime.
    Telles étaient, les deux nations par qui l’antiquité a atteint
le point culminant de sa civilisation ; il y a chez elles parité de
naissance, et divergence des voies parcourues. Les Hellènes ont eu sur leurs
rivaux l’avantage de l’intelligence plus compréhensive, et d’un plus lumineux
éclat : mais le sentiment profond de l’universel dans le

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