Histoire Romaine
quelles formes s’est constituée la
ligue samnite. Ce qui est sûr, c’est que dans le Samnium, aucune cité ne
dominait sur les autres : c’est qu’il n’y avait point de ville centrale ou
chef-lieu commun, ainsi que Rome l’était devenue pour les Latins. La puissance
publique reposait directement dans les communautés rurales, puis dans l’assemblée
générale de leurs délégués ; celle-ci, en cas de besoin, nommant les
généraux de l’armée. La politique de la ligue fut d’ailleurs ce qu’on la
suppose aisément nullement agressive, et se contentant de pourvoir à la défense
des frontières. Il n’appartient qu’à un État uni, centralisé, d’éprouver des
pressions puissantes, et de poursuivre l’extension méthodique de son territoire.
Aussi voit-on l’histoire des deux nations latine et samnite se refléter tout
entière dans le système diamétralement opposé de leurs colonisations. Ce que
les Romains gagnent à la guerre est gagné pour l’État : les terres
occupées par des Samnites, le sont par de libres bandes, sorties de leur patrie
pour faire du butin, et que la patrie abandonne à leur sort, heureux ou
malheureux. D’ailleurs, les conquêtes faites par eux sur les côtes de la mer
Tyrrhénienne et Ionienne, appartiennent à une époque toute postérieure au temps
des rois romains, ils viennent de se fixer seulement dans la région où nous les
trouverons plus tard. Leur migration a produit un ébranlement considérable chez
les peuples italiques ; et l’un de ses contrecoups les plus remarquables
est l’attaque dirigée contre Cymé par les Tyrrhéniens de la Mer supérieure , les Ombriens et les Dauniens ,
en l’an 230 de Rome [102] .
Il semble, s’il est possible d’en juger d’après les récits du temps, embellis
par la légende, que vainqueurs et vaincus s’étaient réunis en une seule armée
comme cela arrive parfois en cas pareil ; les Étrusques donnant la main à
leurs ennemis de l’Ombrie ; les Japyges refoulés au Sud par les Ombriens, se
joignant aussi à eux tous. L’entreprise échoua : la science militaire des
Grecs et la bravoure du tyran Aristodème réussirent cette fois à soustraire la
belle et élégante ville maritime aux fureurs de l’orage barbare.
Chapitre IX – Les
Étrusques.
Le peuple des Étrusques, ou des Rases [103] , ainsi qu’il se
nommait lui-même, diffère essentiellement des familles latines et sabelliques, et
aussi des races helléniques. Ces différences sont marquées tout d’abord dans
les caractères ethnographiques : au lieu de la stature fine et équilibrée
des Grecs et des Italiques, les figures étrusques sculptées nous représentent
des corps ramassés et solides, de grosses têtes, des bras épais. Ce que nous
savons des moeurs et des usages des Étrusques nous atteste aussi une divergence
profonde et originaire. Leur religion a un caractère sombre et fantastique ;
elle se complait dans les mystères des nombres, dans les images et les
pratiques licencieuses et cruelles. Elle est aussi éloignée du rationalisme
exact des Romains que de l’anthropomorphisme serein et brillant de la Grèce. Toutes
ces indications, le plus important des attributs de la nationalité, la langue
les confirme. Jusqu’ici, on n’a pu trouver à l’Étrusque sa place et son rang
certains dans le tableau des idiomes, loin qu’on ait pu même en interpréter les
restes arrivés jusqu’à nous, l’étrusque a eu deux époques, voilà ce qui est sûr.
Dans la première et la plus ancienne, les voyelles sont par tout conservées ;
l’ hiatus est évité avec soin. Plus tard, il rejette les voyelles
et les consonnes finales ; affaiblit ou élude les voyelles dans le corps
du mot, et de doux et sonore qu’il était, il se transforme en un parler d’une
rudesse et d’une dureté excessives. Ainsi Tarquinius devient Tarchnas ; Minerva , Menrva ; Menelaos , Polydeukes , Alexandros sont changés en Menle , Pultuke , Elch∫entre .
Veut-on une autre preuve de la rudesse en même temps assourdie de la prononciation ?
L’ o et l’ u , le b et le p ,
le c et le g , le d et le t ,
se confondent de très bonne heure dans cette langue. Comme chez les Latins, et
dans les plus durs dialectes de la Grèce, l’accent y est ramené sur la syllabe
initiale. Les consonnes aspirées sont également modifiées : tandis que les
Italiques les rejettent toutes à l’exception de la labiale aspirée b ,
et aussi de l’ ƒ ;
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