Hitler m'a dit
rédigé un questionnaire au sujet des personnalités qui m’intéressent. Je fais établir un fichier complet de toutes les personnes influentes, dans tous les pays. Ces fiches contiendront les seuls renseignements qui comptent. Celui-ci accepte-t-il de l’argent ? Peut-on l’acheter d’une autre manière ? Est-il vaniteux ? A-t-il des dispositions érotiques ? Quel type de femme préfère-t-il ? Est-il homosexuel ? Il faut donner beaucoup d’attention à cette dernière catégorie, car on peut s’attacher ces gens-là par des liens indissolubles. Cet autre a-t-il à cacher quelque chose de son passé ? Est-il accessible au chantage ? A-t-il des dispositions ou manies particulières : sports, marottes ou spleen. Aime-t-il les voyages ? C’est avec cela que je fais de la vraie politique, que je gagne des gens à ma cause, que je les force à travailler pour moi, que j’assure ma pénétration et mon influence dans chaque pays. » Une telle organisation, lui dis-je, représentait un travail immense et des frais énormes.
— « Avons-nous jamais reculé devant les difficultés ? Une propagande sans moyens suffisants n’est pas seulement improductive : elle déchaîne aussitôt la contre-propagande sans avoir rien à lui opposer. On se fait une idée bien fausse de la propagande. L’effort qui consiste à gagner, par des moyens normaux, la sympathie des foules n’est qu’un des côtés du problème et certainement un petit côté. Agir sur les foules, c’est seulement préparer le terrain. Le vrai travail, le seul qui soit d’une importance décisive, consiste à s’attacher enterre étrangère des personnages importants, et même des groupes ou des partis. Il me semble que c’est chose assez facile à comprendre. Je crée dans un pays quelconque une zone d’influence. C’est tout, mais c’est assez. Les succès politiques, tels qu’il me les faut, ne s’obtiennent que par la corruption systématique des classes dirigeantes et possédantes. L’argent, la jouissance, la vanité, c’est-à-dire l’appétit du pouvoir, voilà les registres ou les claviers de notre propagande. C’est dans la guerre qui vient que je recueillerai les fruits de ce travail souterrain, car aucun de mes adversaires ne sera en mesure de m’opposer quelque chose d’approchant. La France qui, autrefois, a eu ses Fouché et ses Talleyrand, n’est plus qu’une nation de boutiquiers timides et circonspects de juristes et de bureaucrates. Ces gens-là ne veulent plus courir de risques ni jouer gros jeu. Ils ne joueront plus jamais qu’au demi-centime. »
J’avais l’impression qu’Hitler fanfaronnait et écartait trop facilement les obstacles. Ne s’exagérait-il pas la faiblesse des adversaires et le rendement probable de son travail souterrain ?
Hitler me répondit vivement que cette tactique était la seule possible et qu’il était sûr du succès : « Si nos diplomates cacochymes croient pouvoir conduire la politique comme un honorable commerçant conduit ses affaires, en respectant les traditions et le bon usage, grand bien leur fasse. Quant à moi, je fais une politique de force, ce qui veut dire que je me sers de tous les moyens utiles, sans me soucier ni des usages, ni d’un prétendu code de l’honneur. À ceux qui, comme Hugenberg et sa bande, jettent les hauts cris, me reprochent de ne pas tenir ma parole, de rompre les contrats, de pratiquer la tromperie et la dissimulation, je n’ai rien à répondre, sinon qu’ils peuvent faire de même et que rien ; ne les en empêche. On devrait tout de même comprendre que nous ne sommes plus au XIX e siècle, que nous avons fait une révolution et que de tout temps, les régimes révolutionnaires ont rompu les barrières de la tradition ; que j’emploie tous les moyens de la ruse et de la feinte, ou que je mette mes armées en marche, je ne vois pas où est la différence. Pour ma part, je la cherche en vain. On me dit que la guerre sanglante passe pour convenable, ou du moins inévitable, à certains moments, dans le monde civilisé. La guerre sourde, au contraire, serait condamnable. Pourquoi ? C’est une distinction sophistique, c’est de la morale pour vieillards. L’avantage que j’ai sur ces peuples de bourgeois démocrates, c’est justement de n’être arrêté par aucune considération de doctrine ou de sentiment. Exige-t-on que, par générosité, je fasse fi de cette position avantageuse, tout simplement parce que
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