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Hommage à la Catalogne

Hommage à la Catalogne

Titel: Hommage à la Catalogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: George Orwell
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ayant quelque chose à voir avec le P.O.U.M. En l’espace d’un jour ou deux, les quarante membres du comité exécutif furent tous, ou presque tous, incarcérés. Peut-être, en se cachant, un ou deux d’entre eux avaient-ils réussi à échapper ; mais la police adopta un procédé (qu’on ne s’est pas fait faute de largement employer des deux côtés dans cette guerre) qui consistait, quand un homme disparaissait, à arrêter sa femme comme otage. Il n’y avait aucun moyen de savoir combien de personnes avaient été arrêtées. Ma femme avait entendu dire qu’il y en avait eu environ quatre cents rien qu’à Barcelone. J’ai depuis pensé que déjà à cette date il devait y en avoir eu davantage. Et l’on avait opéré les arrestations les plus imprévues. Dans certains cas la police avait même été jusqu’à tirer des hôpitaux des miliciens blessés.
    Tout cela était de nature à jeter dans une profonde consternation. À quoi diable cela rimait-il ? Je pouvais comprendre, de leur part, la suppression du P.O.U.M., mais à quoi cela leur servait-il d’arrêter les gens ? Sans motif, autant qu’il était possible de s’en rendre compte. Manifestement la suppression du P.O.U.M. était avec effet rétroactif : le P.O.U.M. étant à présent illégal, c’était enfreindre la loi que d’y avoir auparavant appartenu. Comme d’habitude, les personnes arrêtées le furent sans avoir été inculpées. Cela n’empêchait pas les journaux communistes de Valence de lancer de façon flamboyante une histoire de « complot fasciste » monstre, avec communication par radio avec l’ennemi, documents signés à l’encre sympathique, etc. Je parlerai de cela plus en détail à la fin de ce livre {7} . Fait significatif, ce n’est que dans les journaux de Valence qu’on la vit apparaître. Je ne crois pas me tromper en disant qu’il n’y eut pas un mot à ce sujet, ou à propos de la suppression du P.O.U.M., dans aucun journal, communiste, anarchiste ou républicain, de Barcelone. Ce n’est pas par un journal espagnol que nous apprîmes la nature exacte des accusations portées contre les leaders du P.O.U.M., mais par les journaux anglais qui parvinrent à Barcelone un ou deux jours plus tard. Ce que nous ne pouvions pas savoir à ce moment-là, c’est que le gouvernement n’était pas responsable de l’accusation de trahison et d’espionnage, et que des membres du gouvernement allaient par la suite la repousser. Nous ne savions vaguement qu’une seule chose, c’est qu’on accusait les leaders du P.O.U.M., et nous tous aussi probablement, d’être à la solde des fascistes. Et déjà partout le bruit courait que des gens étaient secrètement fusillés dans les prisons. À ce sujet, il y a eu pas mal d’exagérations, mais il est certain qu’il y a eu des détenus fusillés, et il ne fait guère de doute que ce fut le cas pour Nin. Après son arrestation, Nin fut transféré à Valence et de là à Madrid, et dès le 21 juin on sut à Barcelone, de façon vague d’abord, qu’il avait été fusillé. Plus tard la nouvelle se précisa : Nin avait été fusillé en prison par la police secrète, et son corps jeté dans la rue. On tenait cette histoire de différentes sources, en particulier de Federica Montseny, ex-membre du gouvernement. Depuis lors, on n’a jamais jusqu’ici entendu dire que Nin fût vivant. Quand, un peu plus tard, les délégués de plusieurs pays posèrent des questions à son sujet aux membres du gouvernement, ceux-ci tergiversèrent et tout ce qu’ils consentirent à dire, ce fut que Nin avait disparu et qu’ils ignoraient absolument où il était. Certains journaux publièrent un récit selon lequel Nin se serait enfui en territoire fasciste. Aucune preuve ne fut fournie à l’appui, et Irujo, ministre de la Justice, déclara par la suite que l’agence de presse « Espagne » avait falsifié son communiqué officiel {8} . D’ailleurs, il est bien improbable qu’on eût laissé s’échapper un prisonnier politique de l’importance de Nin. À moins qu’un jour dans l’avenir on ne le retrouve vivant, je crois que la supposition qui s’impose est qu’il a été assassiné en prison.
    Et ça n’en finissait pas, ces arrestations, cela dura des mois, tant et si bien que le nombre des détenus politiques, sans compter les fascistes, finit par s’élever à des milliers. Une chose à remarquer, ce fut l’autonomie des policiers de bas rang. Un grand

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