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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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l’Ordre. J’avais passé trop
de temps seul sans personne à qui confier mes doutes, sans temps à consacrer à
mes études et à ma profession. Je commençais à me sentir comme un exilé, un
banni condamné à vivre loin des siens. C’était comme si je me réveillais soudain
d’un long sommeil et découvrais que rien de ce que j’avais vécu jusqu’alors
n’était arrivé en réalité. On avait changé ma vie et mon identité sans que je
m’en sois aperçu, sans que j’aie fait autre chose qu’obéir aux instructions.
J’étais mortifié à l’idée de penser que mon propre Ordre semblait indifférent
aux conséquences que cela pouvait avoir sur moi. Qui pouvait s’inquiéter du
fait que le Perquisitore se sente chaque jour un peu plus un frère sans
communauté ? Mon Ordre avait-il été informé que l’un des siens avait été
menacé de mort par les sbires du pape ? Le comte Geoffroy Le Mans, bien
qu’invisible, était mon cauchemar constant. Je savais que ce chien fidèle
n’hésiterait pas un instant à passer le fil de son épée dans la poitrine de mon
fils pour obéir aux ordres de son maître !
    Un matin de septembre, nous fûmes réveillés pour
la première fois par le froid. L’été touchait vraiment à sa fin, l’automne
s’impatientait. Il faisait une chaleur insupportable le jour, et de plus en
plus frais dès que le soleil se couchait. J’avais déjà pressenti ce changement
dans mes vieilles articulations et mes pieds gonflés qui gênaient ma marche.
Heureusement, dans l’une des maisons où nous nous étions arrêtés pour nous
reposer, j’avais pu me préparer une mixture avec de la moelle de vache et du
beurre frais qui soulagea l’inflammation et la douleur.
    À la sortie d’Eneriz, le chemin de Compostelle
tournait vers la gauche jusqu’à la chapelle d’Eunate. Perdue dans la solitude
des champs, son clocher guidait le pèlerin à travers une vaste plaine désolée.
    Plus nous nous en approchions, plus je me disais
qu’Eunate pouvait offrir bien plus que ne semblait le dire son apparence. Là se
trouvait peut-être ce que nous attendions depuis des semaines, le point de
départ, le début de quelque chose. Je sentis les battements de mon coeur
s’accélérer et dus faire un grand effort pour me retenir de courir, abandonnant
Jonas sur le chemin. Je me sermonnais en me disant que je devais à tout prix
maîtriser mes émotions puisque j’étais sans cesse surveillé.
    — Que penses-tu de cette église,
Jonas ?
    — Pourquoi devrais-je en penser quelque
chose ? me répondit-il de ce ton méprisant qu’il avait adopté depuis la
veille où il avait décidé de s’incarner en un empereur tout-puissant.
    — J’aimerais que tu observes avec attention
sa structure.
    — Tout ce que je vois, c’est une église aux
proportions simples.
    — Mais regarde bien sa forme !
insistai-je.
    Il me contempla d’un air dédaigneux :
    — Elle est octogonale, non ? Enfin,
d’ici on ne voit pas tout. Elle est entourée d’un cloître ouvert. Ce qui est
très rare, je crois. En général, il se trouve à l’intérieur.
    — Tu vois ? Quand tu veux bien t’en
donner la peine...
    Le compliment fit son effet. Charlemagne
disparut et laissa de nouveau place au novice.
    — J’ai dit quelque chose d’important ?
    — Tes observations prouvent que nous nous
trouvons devant une église des Templiers qui appartient peut-être aujourd’hui à
mon ordre.
    — Qu’est-ce qui vous permet de le
dire ? me demanda-t-il, intrigué, tandis que nous faisions le tour de
l’édifice.
    — Sa forme octogonale. Toute construction
de ce type vient forcément des Templiers. Tu te souviens, lorsque nous avons
découvert la signification cachée des noms que portaient les médecins arabes à
Roquemaure, je t’avais parlé d’Al-Aqsa, la petite mosquée située dans le Temple
de Salomon à Jérusalem ?
    — Oui.
    — Bien. Alors, laisse-moi maintenant te
raconter une histoire...
    J’enlevai mon chapeau, et m’assis par terre, à
l’ombre, le dos appuyé contre un mur, imité par Jonas. Il faisait une chaleur
accablante et la fraîcheur de la paroi nous fit du bien après tant d’heures
passées sous le soleil.
    — Salomon était un roi très cultivé et
intelligent qui régna sur Israël mille ans environ avant la naissance du
Christ, commençai-je. Pour te donner une idée, sache qu’il est l’auteur du beau
« Cantique des Cantiques » ainsi que des

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