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Il suffit d'un Amour Tome 2

Il suffit d'un Amour Tome 2

Titel: Il suffit d'un Amour Tome 2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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empli la vieille demeure d'accablement et de crainte. Le matin même, le chapelain avait dû arracher la comtesse du lit de l'enfant pour pouvoir procéder à la toilette funèbre... Cette douleur faisait un peu honte à Catherine. La jeune femme, assommée par la nouvelle, éprouvait une sorte d'engourdissement proche de l'hébétude. Elle avait la sensation de se mouvoir au milieu d'une épaisse couche d'ouate qui amortissait sa conscience et que la douleur ne perçait pas encore.
    — Que s'est-il passé ? demanda-t-elle d'une voix blanche, si étrangère qu'elle ne la reconnut pas.
    Ermengarde, que Sara avait obligée à s'asseoir dans un fauteuil, leva sur elle un pauvre visage défait, des yeux ourlés d'écarlate à force d'avoir pleuré.
    Une mauvaise fièvre..., balbutia-t-elle. Dans le village, des paysans sont morts pour avoir bu l'eau d'un puits empoisonné. L'enfant en a bu aussi, en revenant d'une promenade avec son précepteur. Il avait soif et s'est arrêté au moulin et a demandé à boire... Le lendemain il délirait. C'est alors que je vous ai appelée. Le mire du château a fait ce qu'il a pu... et moi, je n'ai même pas eu la consolation de faire pendre le meunier, ajouta Ermengarde avec une si brusque explosion de sauvagerie que Catherine frissonna... Il est mort le soir même, de sa maudite eau, avec sa famille... Me pardonnerez-vous jamais ? Vous me l'aviez confié... et il est mort... mort mon petit Philippe, si beau !...
    La comtesse enfouit sa tête dans ses mains tremblantes et se remit à sangloter si désespérément que Catherine, émue de pitié, se pencha sur elle, entourant de ses bras les épaules de sa vieille amie.
    — Ermengarde !... Je vous en supplie, cessez de vous torturer ! Vous n'avez aucun reproche à vous faire... Vous étiez pour lui la meilleure des mères, bien meilleure que moi ! Certes, oui... bien meilleure que moi.
    Les larmes montaient à nouveau à ses yeux. Elle allait se remettre à pleurer, elle aussi, quand le chapelain entra sur la pointe des pieds et murmura que tout était prêt, que l'enfant était exposé à la chapelle. Comme mue par un soudain ressort qui restituait pour un instant l'ancienne Ermengarde, la comtesse se leva, saisit la main de Catherine.
    — Venez... dit-elle. Venez le voir !

    A grands pas, entraînant Catherine et Sara, elle quitta la salle d'honneur, s'engagea dans la vis de pierre d'un escalier, suivit une large et courte galerie voûtée dont l'un des côtés, découpé en ogives flamboyantes, était garni de vitraux aux armes de Châteauvillain. Une porte en plein cintre, au bout de la galerie, s'ouvrait sur la chapelle. L'aspect de celle- ci arracha à Catherine une exclamation. Le sanctuaire était assez exigu : une nef voûtée d'arêtes reposant sur d'énormes piliers romans en pierre grise. Au centre, l'enfant en costume d'apparat de velours bleu reposait sur un catafalque de velours noir et or. À ses pieds, jointes, les armes de sa mère et le blason ducal de Bourgogne barré à sénestre de rouge1.
    1. La barre de bâtardise
    Quatre hommes d'armes aux cuirasses étincelantes veillaient aux quatre coins de la couche funèbre, appuyés sur leurs guisarmes, immobiles comme des statues..Une forêt de gros cierges de cire jaune mettaient une lumière de fête dans la petite chapelle aux fenêtres basses. Les vieux murs disparaissaient sous les tentures de velours noir et les bannières.
    La somptuosité de l'apparat déployé saisit Catherine qui tourna vers son amie un regard interrogateur. Ermengarde rougit brusquement, releva la tête dans un geste d'instinctif orgueil.
    — En cet instant suprême, seul compte le sang princier, Catherine !
    fit-elle d'une voix enrouée.
    Sans rien ajouter, Catherine alla s'agenouiller auprès du corps. Saisie d'une sorte de respect, elle osait à peine lever les yeux vers l'enfant, troublée de constater son extrême ressemblance avec son père. Il y avait tant de mois qu'elle ne l'avait vu qu'elle le reconnaissait à peine. Il paraissait si grand, dans son immobilité éternelle, ses petites mains jointes sur J sa poitrine ! Les traits fiers déjà, et les cheveux blonds coupés court étaient ceux mêmes de Philippe... Il était bien son fils et le chagrin de Catherine s'en trouvait aggravé d'une jalousie vague. C'était comme si le petit Philippe avait délibérément tourné le dos à sa mère, se détachait d'elle pour se tourner instinctivement vers celui dont il avait tenu la

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