Indomptable
instinctivement sur
son ventre. Un frisson qui n’avait rien à voir avec la matinée
humide se cristallisa sous sa peau.
— Des nouvelles du bâtard normand ? demanda Eadith.
Un haussement d’épaules fut la seule réponse de Rufus.
Ses yeux s’allumèrent lorsqu’il aperçut Meg qui se tenait
debout de l’autre côté du feu.
— Venez près de moi, ordonna-t-il.
Calme en apparence, Meg contourna le feu et s’approcha
de Rufus, s’arrêtant tout près de lui. La lueur dans ses yeux
quand il la regarda lui serra l’estomac, et de la bile lui monta
à la gorge.
L’expression sur le visage d’Eadith était à la fois de l’irri-
tation et de la résignation. La convoitise bien connue des
mercenaires pour la maîtresse du château de Blackthorne
avait été un des leviers qu’Eadith avait actionnés pour que
Rufus laisse tomber Duncan. Elle n’était pas en mesure de
pouvoir se plaindre lorsque Rufus exposait sa convoitise à
tous.
— Attendez au moins jusqu’à demain lorsque la lune se
lèvera, dit Eadith avec impatience. Il sera beaucoup plus
satisfaisant de la baiser quand ce bâtard normand sera là
pour regarder.
Meg fut envahie par la nausée. Le frisson sous sa peau
s’intensifia malgré la chaleur du grand feu.
— C’est quoi cette folie ? demanda-t-elle avec un calme
douloureux.
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ELIZABETH LOWELL
— Ce n’est pas de la folie, rétorqua Eadith. C’est juste
une revanche sur le bâtard normand et la sorcière Druide
de la Vallée qui est sa putain.
— Quelle revanche.
Il n’y avait ni question ni émotion dans la voix de Meg.
Seul un calme anormal demeura alors que la glace s’empa-
rait de son âme.
— Vous auriez dû laisser mourir le bâtard normand
quand je lui ai fait boire le poison, s’exclama sauvagement
Eadith. Ensuite, j’aurais pu persuader Duncan de prendre le
château, et tout aurait été parfait. Mais le bâtard a survécu,
et j’aurai tout de même ma revanche malgré votre
intervention.
— Duncan. Où est-il ?
La voix de Meg était encore monocorde, sans émotion,
presque inhumaine.
Eadith haussa les épaules.
— Parti au nord avec ses chevaliers, et bon débarras !
Les clans aux frontières mettront fin à la vie de ce traître
avant qu’il ne puisse profiter des fruits de sa trahison.
Le regard imperturbable de Meg poussa les mercenaires
à se regarder les uns les autres avec un sentiment croissant
d’incertitude. Un murmure circula parmi eux tandis qu’ils
mesuraient le calme troublant de leur prisonnière Druide
de la Vallée.
Seule Eadith ne se laissa pas troubler par les yeux verts
impassibles de Meg. La vengeance qu’Eadith avait cherchée
depuis la défaite de sa famille face aux Normands était
enfin à portée de main.
— Laissez-moi vous dire ce qui vous attend, traîtresse,
dit Eadith avec un plaisir évident. Lorsque la lune se lèvera
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INDOMPTABLE
demain, votre seigneur bâtard viendra avec trois fois votre
poids en or et en pierres précieuses.
Un léger soubresaut du corps de Meg fit trembler en
musique les bijoux qui lui restaient. Les petits cris s’étei-
gnirent presque aussitôt qu’ils s’étaient fait entendre.
— Nous prendrons la rançon, poursuivit Eadith.
Ensuite, vous serez offerte aux mercenaires pendant que
votre mari observera. Lorsque cela aura fini de nous amuser,
nous le tuerons.
Meg ne dit rien.
— Êtes-vous trop simple d’esprit pour comprendre ce
que vous coûtera le fait d’être du côté des Normands ?
demanda Eadith avec colère. Bientôt, vous connaîtrez ce
que j’ai enduré. Vous allez vous retrouver orpheline, veuve,
sans enfant et salie !
Meg pencha la tête, entraînant le frémissement des clo-
chettes en or. Ce fut le seul bruit qu’elle fit pendant quelques
secondes.
— Dominic le Sabre ne viendra pas pour moi, dit Meg.
— Il viendra. Il le faut. Sinon, vous mourrez.
— Alors, je vais mourir. Demandez à ce qu’un prêtre
vienne me confesser.
La certitude dans la voix de Meg finit par pénétrer le
sentiment de triomphe d’Eadith. Elle la fixa du regard,
choquée.
— Que dites-vous ? demanda Rufus, s’approchant telle-
ment près d’elle qu’elle eut à pencher la tête en arrière pour
voir son visage. Dominic viendra, bien entendu, à votre
secours. Sans vous, il perdrait le château de Blackthorne.
— Face à qui ? demanda Meg sans ménagement.
Duncan ne le prendra pas. Vous ne pouvez
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