Interdit
d’héritiers.
Elle s’était préparée en conséquence. Sa main ne tremblait
pas lorsqu’elle la tendit à Ariane.
L’expression de la Normande disait assez clairement
qu’elle n’aimait pas être touchée. Elle regarda Duncan, n’y
vit aucun réconfort et prit la main d’Ambre.
Malgré sa préparation, le chaos d’émotions mêlant ter-
reur, humiliation et trahison qui tempêtait en Ariane faillit
faire tomber Ambre à genoux.
Ariane était une femme de grande passion, et cette pas-
sion était noire.
— Lady Ariane, dit Duncan, êtes-vous stérile ?
— Non.
— Accepterez-vous votre devoir en tant qu’épouse ?
— Oui.
Ambre chancela, luttant contre les émotions sauvages
que la jeune Normande gardait sous son sang-froid.
— Ambre ? demanda Duncan.
Elle ne l’entendit pas. Tout ce qu’elle entendait était le cri
de trahison qui emplissait le cœur d’Ariane.
— Ambre.
La voix de Duncan était sévère.
— Elle dit… la vérité, dit-elle, le souffle court.
Puis, elle relâcha la main d’Ariane. Elle ne pouvait plus
supporter le chagrin et la rage qui animaient son âme.
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ELIZABETH LOWELL
Ces sentiments étaient trop similaires à ceux de Duncan.
— Ma fille, tout va bien ? demanda Cassandra.
— Ce qu’elle ressent est… supportable.
Ariane la regarda avec indignation.
— Vous savez, dit-elle d’un ton ferme. Vous savez .
Maudite sorcière, qui vous donne le droit de tourmenter
mon âme ?
— Silence, dit brutalement Cassandra.
Elle se précipita aux côtés des deux femmes, sa robe
écarlate brûlant vivement par contraste avec le noir des
vêtements d’Ariane et l’or que portait Ambre.
— La seule qui a été tourmentée, c’est Ambre, dit-elle.
Regardez-la et voyez, le feu sombre qui brûle en vous en
secret l’a aussi consumée.
Ariane pâlit.
— Sachez aussi que, quel que soit votre secret, continua
l’Érudite, il demeure un secret. Ambre touche les émotions,
non les faits.
Le silence régna tandis qu’Ariane observait Ambre. Elle
voyait la pâleur de son visage et les traits tirés de sa bouche.
— Seulement les émotions ? murmura-t-elle.
Ambre hocha la tête.
— Dites-moi, continua la Normande. Qu’est-ce que je
ressens ?
— Vous plaisantez.
— Non. Je pensais ne plus avoir de sentiments. Qu’est-ce
que je ressens ?
Ce fut le ton d’Ariane, qui traduisait une curiosité pure
et simple, qui poussa Ambre à répondre.
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INTERDIT
— La fureur, murmura-t-elle. Un cri jamais exprimé.
Une trahison si profonde qu’elle a presque anéanti votre
âme.
Le silence s’étira, encore et encore.
Puis, Ariane se tourna vers Duncan, ses yeux plissés
débordant de mépris.
— Vous m’avez forcée à partager ce que je m’étais caché
même à moi-même, dit-elle. Vous l’avez forcée à endurer ce
qu’elle n’a pas mérité.
— J’ai le droit de savoir la vérité sur nos fiançailles,
dit-il.
Ariane balaya l’air de la main.
— Vous avez dénigré mon honneur et l’honneur de celle
que vous appelez votre « arme », dit-elle laconiquement.
Duncan tapa sur l’accoudoir du plat de la main.
— J’ai été trahi par ceux en qui j’avais confiance, siffla-
t-il. C’est ma façon de m’assurer que cela ne m’arrive plus.
— Trahi, répéta Ariane d’un ton neutre.
— Oui.
— Nous avons au moins une chose en commun, dit-elle
en haussant les épaules. Mais est-ce suffisant pour se
marier ?
— Nous n’avons d’autre choix que de nous marier.
Duncan se pencha en avant. Son regard était aussi dur
que de la pierre.
— Serez-vous une épouse fidèle, demanda-t-il froide-
ment, loyale à votre mari plus qu’à votre père normand ?
Ariane étudia l’expression féroce de Duncan pendant
un moment avant de se tourner vers Ambre.
Elle lui tendit la main.
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ELIZABETH LOWELL
— Oui, dit-elle.
— Oui, répéta Ambre.
— Cela changera-t-il si je prends Ambre pour maî-
tresse, qu’elle vit dans ce château et que je partage ma
couche avec elle quand bon me semblera ?
La discipline Érudite d’Ambre vola en éclats. Alors que
le soulagement et l’espoir d’Ariane montaient en flèche, ses
propres émotions submergeaient presque la vérité de ce
qu’elle apprenait par le toucher.
— Pas du tout, dit Ariane. Je m’en réjouirai.
Duncan parut surpris.
— Je ferai mon devoir, dit Ariane d’une voix parfaite-
ment calme, mais l’idée du lit
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