Interdit
l’adultère.
Il ouvrit la bouche, mais aucun mot n’en sortit. Il secoua
brutalement la tête comme pour parer un coup.
— Je ne sais pas, grogna-t-il. Je ne sais pas !
Mais il l’avait su. Ne serait-ce qu’un court instant. Ambre
le sentait aussi clairement que la chaleur de son corps.
Pendant un bref moment, les ténèbres avaient perdu un
peu de leur pouvoir sur lui. Quelques étoiles éclatantes
avaient jeté une faible lueur dans la nuit dense qui envelop-
pait le passé de Duncan.
— Pourquoi ne puis-je pas me rappeler ? demanda-t-il
sauvagement.
— Laissez faire le temps, dit-elle doucement. Vous ne
pouvez vaincre les ténèbres. Vous ne pouvez que vous
glisser entre elles.
Elle sentit la tension quitter le corps de Duncan avant
même qu’il ne s’en rende compte. Elle retira sa main de la
sienne et ouvrit la porte de la chaumière. Avant qu’elle n’ait
pu passer le seuil, Duncan la tira en arrière.
Surprise, elle se tourna vivement vers lui. Il lui soute-
nait le menton de sa main puissante avec une délicatesse
surprenante. Elle ferma les yeux un instant pour savourer
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ELIZABETH LOWELL
la douceur qui émanait de leur contact. Son inquiétude pour
elle était comme le soleil printanier : chaud, sans être
brûlant.
Et la passion derrière cette inquiétude était un torrent
de feu sauvage.
— Je ne voulais pas vous rendre malheureuse, dit-il.
— Je sais, murmura-t-elle en rouvrant les yeux.
Elle était si proche de lui qu’elle distinguait les éclats de
vert, de bleu, d’or et d’argent qui créaient la couleur noisette
de ses yeux.
— Alors pourquoi ces larmes dans vos yeux ?
demanda-t-il.
— Parce que j’ai peur pour vous, pour moi, pour nous.
— Parce que je ne me souviens pas ?
— Non. Parce que vous pourriez vous souvenir.
Il inspira vivement.
— Pourquoi ? Que pourrait-il y avoir de mal à cela ?
— Et si vous étiez marié ?
— Je ne pense pas. Je sentirais une absence comme je
sens celle de mon épée.
— Et si vous deviez allégeance à un seigneur normand ?
demanda Ambre avec désespoir en essayant d’étouffer la
passion qu’elle lisait dans les yeux de Duncan.
— En quoi cela serait-il important ? Les Saxons et les
Normands sont en paix.
— Cela pourrait changer.
— Et le ciel pourrait tomber, aussi.
— Mais si vous êtes l’ennemi de Lord Robert ? Ou
d’Erik ?
— Erik vous aurait-il amené un ennemi ? contra
Duncan.
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INTERDIT
Elle voulut parler, mais il l’interrompit.
— Et si j’étais simplement un chevalier revenu de la
Terre sainte à la recherche d’un seigneur à servir ?
Les mots de Duncan pénétrèrent Ambre comme des
éclairs délicats, déchirant même les ténèbres, ne serait-ce
qu’un bref instant.
Le sourire d’Ambre trembla fébrilement.
— Avez-vous combattu les Sarrasins ?
— Je… Oui !
Son sourire étincela sous l’obscurité soyeuse de sa mous-
tache. Un souvenir lui revenait.
— Je les ai combattus dans un lieu nommé… Bon sang !
Il m’échappe à nouveau !
— Il vous reviendra…
— Mais je me suis battu. Je le sais, dit-il. Aussi claire-
ment que je sais que je veux ceci.
Il se pencha vers elle jusqu’à ce que ses lèvres touchent
les siennes, intensément. Lorsqu’elle voulut s’écarter, il res-
serra son emprise et l’enlaça doucement.
— Un seul baiser, c’est tout ce que je demande. Un
baiser pour l’homme que vous avez tiré des ténèbres.
Ambre se raidit, mais elle ne pouvait résister à la pas-
sion de Duncan, pas plus qu’elle ne pouvait combattre la
sienne.
— Nous ne devrions pas, dit-elle.
— Je sais, murmura-t-il en souriant.
— C’est dangereux.
— Mais c’est si agréable…
Ambre essaya de se défendre, mais elle ne pouvait pas.
C’était effectivement très agréable d’être dans les bras de
son sombre guerrier…
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ELIZABETH LOWELL
— Ouvrez vos lèvres pour moi, chuchota Duncan
contre sa bouche. Laissez-moi goûter votre nectar aussi
délicatement qu’une abeille se délecte d’une violette.
— Duncan…
— Oui, comme ceci…
Cette fois-ci, Ambre ne fut pas surprise de sentir la cha-
leur palpitante de la langue de Duncan qui se glissait dans
sa bouche. Au contraire, ce fut sa retenue qui la surprit. Elle
sentait la passion en lui. C’était comme une mer déchaînée
qui menaçait de faire chavirer sa volonté.
Tout son corps était tendu, brûlant. Il tremblait
d’un
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